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ATP Miami - Finale - Et s'il était temps de respecter Casper Ruud ?

Laurent Vergne

Mis à jour 03/04/2022 à 12:32 GMT+2

MASTERS 1000 MIAMI - Longtemps considéré comme un simple spécialiste de terre battue dont l'ascension au classement était due à ses performances dans des tournois mineurs, Casper Ruud est en train de se muer en un joueur tout terrain. Sa place de finaliste à Miami confirme ses nets progrès sur dur. Le Norvégien mérite d'être considéré à sa juste valeur.

Un premier set serré, puis Ruud s'est envolé pour franchir un cap en Masters 1000

Nick Kyrgios par-ci. Carlos Alcaraz par-là. Voir par-ci et par-là. A Miami, il y a ceux qui ont généré du bruit et de la fureur pour ce qu'ils sont ou ce qu'ils font. Ou les deux. Puis il y a Casper Ruud. Le Norvégien s'est hissé en finale en Floride pour la première fois dans un Masters 1000. Sans faire de bruit. Sans générer une attention démesurée. Comme d'habitude.
La discrétion lui va bien, mais de l'indiscrétion à l'anonymat, il n'y a parfois qu'un pas. Conscient du degré d'intérêt qu'il génère et peut-être plus encore de celui qu'il ne génère pas (en dehors de son pays où son ascension a boosté l'intérêt pour un sport où la Norvège n'existait quasiment pas ce dernier quart de siècle), Ruud semble presque condamné à une certaine forme d'indifférence, dont seuls les résultats pourront le sortir. Voilà pourquoi il estime qu'il jouera dimanche "le match le plus important" de sa carrière.
Décrocher un Masters 1000 marquerait un pas de géant pour lui, et le faire en battant Carlos Alcaraz, la pépite d'El Palmar dont tout le tennis est en train de devenir dingue, serait peut-être plus important encore. Une façon de dire "Moi aussi, je suis là, regardez-moi." Sinon ? Pour résumer, tout le monde passera poliment son tour pour saluer sa place de finaliste. Il y a même fort à parier que les plus taquins se souviendront qu'il a atteint la finale en battant l'improbable Francisco Cerundolo pour mieux oublier qu'il avait, tout de même, écarté Alexander Zverev et Cameron Norrie lors des tours précédents.

7e à l'ATP lundi

Ni le jeu ni la personnalité de Casper Ruud n'invitent et n'inviteront sans doute jamais à l'euphorie collective, même s'il est capable de quelques fantaisies, comme cette balle tombée de haut directement... dans sa poche, lors de son match contre Zverev. Le public a aimé et le lui a fait savoir. Après tout, à défaut d'être Mansour Bahrami, le personnage gagnerait peut-être à être plus et mieux connu. Le joueur aussi. Surtout le joueur.
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C'est dans la poche ! Ruud a réceptionné cette balle avec un certain style

Il est vraiment temps de respecter ce que le Scandinave accomplit depuis maintenant de nombreux mois. Il y a un an, il naviguait autour de la 25e place au classement mondial. Sensiblement la même qu'à l'été 2020. A 22 ans, il avançait doucement, tout doucement, sans que personne ne puisse imaginer le grand bond en avant qui serait le sien entre le printemps 2021 et le printemps 2022. Ruud sera quoi qu'il arrive 7e à l'ATP lundi, plus haut qu'il n'a jamais figuré.
On l'a d'abord catalogué comme un pur terrien, ce qui n'était pas totalement faux. On a raillé sa razzia sur des tournois sans grande envergure en juillet dernier. Trois 250, trois semaines, trois titres, à Bastad, Gstaad et Kitzbühel. Cela lui avait valu une attaque assez frontale de Nick Kyrgios sur les réseaux sociaux. L'histoire d'amour entre ces deux-là remonte à leur confrontation au Masters 1000 de Rome en 2019, quand l'Australien avait été disqualifié. Ruud l'avait traité "d'idiot" après la rencontre.
Lorsque l'ATP a eu la bonne idée de proposer via son compte Twitter officiel aux fans de tennis de poser une question à Nick Kyrgios avant le tournoi de Cincinnati à l'été 2021, Ruud, se sentant peut-être pousser des ailes grâce à son euphorie estivale, n'a pu s'empêcher de demander : "Quel est son tournoi sur terre préféré ?" C'était taquin et pas bien méchant, compte tenu de l'aversion bien connue du joueur de Canberra, mais elle n'a pas fait rire ce dernier. "Ta mère", a-t-il répondu, avant de supprimer son post, puis d'en publier un second : "Tu es un bon joueur mais on sait tous que tu voles des points dans ces tournois."
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Casper Ruud et Nick Kyrgios

Crédit: Getty Images

Surpris de jouer sa première finale de Masters 1000 à Miami

Le Norvégien n'avait évidemment rien volé mais, à défaut d'approuver la forme, chacun avait compris le fond de la pensée de Kyrgios : Ruud gagne des tournois, OK., mais ça ne fera pas pour autant de lui un joueur de premier plan tant que ces titres seront glanés dans des tournois mineurs. De fait, s'il totalise déjà sept titres à son palmarès, ce qui est tout sauf négligeable à son âge, ce sont tous des ATP 250. Lors de son triplé estival, ses victimes en finale ont eu pour nom Federico Coria, Hugo Gaston et Pedro Martinez. Pas exactement des Tops 10.
Mais l'étiquette du très bon joueur de terre faiblard ailleurs tient de moins en moins la route. Ruud a utilisé ses succès sur la brique pilée comme tremplin. Après son triptyque juilletiste, il a su durablement transposer cette réussite sur surface rapide : quart de finale au Canada, puis à Cincinnati et enfin à l'automne à Bercy, avant d'atteindre les demi-finales du Masters à Turin. Il avait aussi, au milieu de tout ça, remporté son premier titre ailleurs que sur terre, à San Diego, juste après l'US Open. Et le voilà donc en finale à Miami. "Ce n'est pas forcément là que j'aurais imaginé jouer ma première finale de Masters 1000, mais je prends", a-t-il souri vendredi. Comme un pied de nez ou une langue tirée à ses détracteurs.
La réalité, c'est que le fils de Christian Ruud, 39e mondial dans les années 90 et qui est aussi son coach, est à sa place dans le Top 10 où il campe depuis maintenant six mois. Et qu'à défaut de susciter la plus folle des passions, il mérite le respect qui lui est dû.

Un palier à franchir dans les quatre tournois majeurs

Au petit jeu des comparaisons, il fait un peu penser à David Ferrer. Il est évidemment encore loin de l'ancien numéro 3 mondial en termes d'accomplissements sur le circuit, mais il est encore très jeune. En revanche, dans la manière d'avancer en toute discrétion comme dans l'expression tennistique sur le court, il y a de cela. Casper Ruud sera-t-il le David Ferrer des années 2020 ? Ce ne serait pas déshonorant. Même si lui vise plus haut. Son rêve, c'est un titre du Grand Chelem.
La reconnaissance passera d'ailleurs par les quatre tournois majeurs du calendrier, là où le bât norvégien blesse encore. Il n'a jamais dépassé les huitièmes de finale, atteints une seule fois, pour une défaite contre Andrey Rublev à Melbourne en 2021. C'est encore trop peu, même si ce n'est sans doute qu'une question de temps.
A cause d'une cheville tordue, il a manqué l'Open d'Australie au dernier moment en janvier alors qu'il nourrissait quelques ambitions légitimes. A Roland-Garros, il n'y a aucune raison pour qu'il ne passe pas, a minima, du statut de figurant à celui du second rôle qu'on remarque. Et on parle bien de strict minimum. Sa défaite (épique) contre Alejandro Davidovich Fokina l'an passé en 16es de finale reste le plus gros crève-cœur de sa jeune carrière. Avant Roland, avant la terre, reste donc un bon bout de dur à avaler dimanche soir. Ça tombe bien, il y a pris goût.
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Plus agressif et plus précis : comment Ruud a sorti Zverev en quarts

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