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Miami vintage : Quand Nadal l'effronté faisait déjà des misères au patron Federer

Maxime Battistella

Mis à jour 20/03/2024 à 01:24 GMT+1

Ce mercredi, débute le Masters 1000 de Miami à suivre sur Eurosport. A cette occasion, nous fêtons les vingt ans du premier duel d'une rivalité de légende entre Roger Federer et Rafael Nadal. Le Suisse venait de devenir numéro 1 mondial, entamant un premier règne de 237 semaines d'affilée (un record), tandis que l'Espagnol n'était qu'un adolescent prometteur... avant de créer la sensation. Récit.

Federer - Nadal, Miami 2004

Crédit: Getty Images

Rafael Nadal - Roger Federer

Edition : 2004
Tour : 3e tour
Vainqueur : Rafael Nadal (Espagne)
Adversaire : Roger Federer (Suisse)
Score : 6-3, 6-3
L’affiche avait des allures de David contre Goliath. Et comme dans le récit biblique, l’impensable s’est produit ce 28 mars 2004 sous les projecteurs de Key Biscayne. Ce soir-là, un gamin de 17 ans, tout feu tout flamme, terrasse le numéro 1 mondial Roger Federer, nouvel ogre du tennis mondial. Bondissant, déjà surpuissant en coup droit et doté d’une belle main, Rafael Nadal déjoue tous les pronostics loin de sa terre battue favorite. Un coup de tonnerre dans la nuit floridienne qui préfigure le destin hors du commun de celui que l’on surnommera bientôt le "Taureau de Manacor".
Il a beau n’être encore qu’un adolescent, le Majorquin est alors considéré comme l'un des grands espoirs du tennis mondial. Entré dans le top 100 l’année précédente à 16 ans, Nadal est déjà un phénomène sur terre battue. S’il ne compte pas encore de trophée à son palmarès, il a battu deux membres espagnols du top 10 sur son ocre chéri : Albert Costa (7-5, 6-3), alors 7e à l’ATP, à Monte-Carlo en avril 2003, et surtout son idole, modèle et futur coach Carlos Moya, numéro 4 mondial, un mois plus tard à Hambourg (7-5, 6-4).
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Rafael Nadal à Miami en 2004

Crédit: AFP

J'avais peur de prendre 6-1, 6-1, mais j'étais aussi impatient de jouer le numéro 1 mondial
Pour commencer l’année 2004, Nadal atteint sa première finale sur le circuit ATP à Auckland… sur dur. S’ensuit un bon 3e tour à l’Open d’Australie où il s’incline avec les honneurs face à l’un des favoris du public de Melbourne, Lleyton Hewitt (7-6, 7-6, 6-2). Les progrès du jeune gaucher sont fulgurants, à tel point que lorsqu’il débarque à Miami en ce mois de mars, il est déjà bien installé dans le top 50, affichant un matricule 34 qui fait de lui la 32e tête de série du tournoi. Ce petit bonus lui permet d’être exempté de premier tour, et il se lance finalement face à une gloire du circuit sur le déclin, Goran Ivanisevic.
Invité par l’organisation du tournoi, le Croate est sorti vainqueur d’un combat usant face à Nicolas Escudé et il ne tient pas le choc longtemps. Après la perte du premier set, il abandonne. Le Majorquin n’en demandait pas tant et obtient ainsi ce que le tableau lui promettait : le droit de défier le numéro 1 mondial. Par définition, le défi s’annonce immense, et il l’est d’autant plus que Federer s’affirme alors comme le patron incontesté du circuit grâce à un début de saison exceptionnel marqué par 22 victoires en 23 matches et trois titres : l’Open d’Australie à l’issue duquel il s’est emparé du trône, Dubaï et Indian Wells.
Nadal a énormément de respect pour son adversaire, mais il n’a rien à perdre. Un état d’esprit essentiel avant une telle épreuve de vérité. "J’avais peur de prendre 6-1, 6-1, ou 6-1, 6-2, mais j’étais aussi impatient de jouer justement parce que j’affrontais le numéro 1 mondial. Donc je suis entré sur le court avec une attitude positive, pas en me disant ‘Oh essayons de gagner un jeu et ce sera bien’", expliquera-t-il après la partie. Et contre toute attente, c’est bien l’Espagnol qui domine d’entrée les débats, déjà grâce à ses passings assassins et sa solidité à l'échange, mais aussi et surtout par son agressivité.
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Roger Federer à Miami en 2004

Crédit: Getty Images

La construction d'un leitmotiv tactique

Tactiquement, Nadal et son oncle Toni ont eu tout le loisir de préparer ce rendez-vous majuscule et ont élaboré un plan de jeu clair : avec son coup droit lifté de gaucher, l’Espagnol matraque le revers adverse dans la diagonale. Ce schéma tactique sera un leitmotiv dans les futures confrontations entre les deux hommes, ce premier duel en donne un avant-goût. Complètement pris, incapable d’inverser la dynamique, Federer se fait marcher dessus. Il ne se procurera pas la moindre balle de break, cédant de son côté trois fois son service.
La démonstration du Majorquin dure à peine plus d’une heure (1h10 précisément). Dans leurs 39 duels suivants, Nadal ne gagnera plus vite contre son rival qu’une seule fois, en finale du Masters 1000 de Rome sur terre battue en 2013 (6-1, 6-3 en 1h09). Une question se pose alors, Federer a-t-il sous-estimé son jeune adversaire ? L’intéressé dément alors toute éventuelle suffisance. "J'avais beaucoup entendu parler de lui, je l'avais vu jouer et je n'ai en rien été surpris de sa performance. Mais c'est vrai que, sans être aussi fatigué que lors du match précédent, je sentais que je manquais de jus et de ce temps de réaction immédiat qui aurait été nécessaire pour répondre coup sur coup à son jeu agressif."
Mal remis d’une insolation au moment d’entamer le tournoi contre Nikolay Davydenko, le Bâlois avait ainsi eu toutes les peines du monde à se défaire du Russe (6-2, 3-6, 7-5). Mais même s’il n’était pas à 100 %, il reconnaît que quelque chose le gêne dans le jeu de Nadal. "Il frappe la balle avec beaucoup de lift, ce qui la fait rebondir haut, et c'était un problème pour moi. Je pense qu’au début, je ne m’engageais pas assez dans mes frappes. C’était mieux sur la fin, mais le match est allé globalement dans son sens et il a joué des coups incroyables. C’est ce que les jeunes font…"

Federer et Miami découvrent un phénomène

Bien des années plus tard, Federer reviendra sur ses déclarations et concèdera avoir été surpris par la consistance et la qualité du tennis de Nadal dès ce premier match sur dur. Si l'on analyse d'ailleurs la partie, il est clair qu'à intervalles réguliers, le Suisse manque de vigilance. Comme lors de cet échange à 2-2 dans le deuxième set où, bien qu’aisément sur la trajectoire du passing de coup droit de son adversaire, il laisse échapper sa volée de coup droit, comme déstabilisé par la vitesse de la balle. En même temps que le public floridien, ébahi par la combativité, la vitesse de déplacement, mais aussi le toucher du Majorquin, Federer découvre un phénomène.
Comme un symbole, Nadal, rugissant de plaisir, conclut l’affaire au filet où il aura marqué le point à 13 reprises sur 14 montées. Difficile de faire mieux. Pas de doute : Il est bien allé chercher sa victoire, il n’a pas attendu que le numéro 1 mondial la lui offre. Conquérant, il montre ainsi qu'il est bien plus qu’un extraordinaire défenseur dont les qualités ne pourraient ressortir que sur terre battue. Ce qui ne l’empêche pas de faire preuve d’humilité, déjà. "J'ai bien joué, c'est vrai, peut-être même que j'ai fait le meilleur match de ma vie. Mais il est évident que Federer était loin de son meilleur niveau. S'il l'avait été, je n'aurais eu aucune chance."
Bourreau de travail et formé mentalement à la dure par son oncle Toni, Rafa a le caractère de champion qui lui permettra d’accomplir bien des exploits. Malgré une tendance à tirer trop sur la corde de son physique – il loupera cette année-là Roland-Garros et Wimbledon à cause d’une fracture de fatigue au pied gauche –, ses qualités extraordinaires lui permettront quelques mois plus tard de conquérir son premier trophée sur le circuit sur la terre battue de Sopot en Pologne. Avant de retrouver en avril 2005 Federer, toujours à Miami, pour une première finale de légende…
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