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Masters 1000 Paris Bercy - Pourquoi Félix Auger-Aliassime est le tube de l'automne

Laurent Vergne

Mis à jour 05/11/2022 à 08:37 GMT+1

ROLEX PARIS MASTERS – Trois titres de rang, 16 victoires consécutives, à nouveau une demi-finale à Bercy... On n'arrête plus Félix Auger-Aliassime. Alors qu'il sortait d'un été compliqué, le Canadien a passé la surmultipliée cet automne, au point de franchir un cap. Vu son talent, ce n'est pas forcément surprenant. Il fallait juste que les circonstances s'y prêtent.

Felix Auger-Aliassime

Crédit: AFP

Ce n'est ni une découverte ni un scoop. Félix Auger-Aliassime a tout le potentiel du monde en lui. Athlète magnifique, joueur complet, le Canadien est attendu depuis un moment comme une pointure du futur et même un peu plus tôt que cela. L'ascension fulgurante de Carlos Alcaraz, vainqueur en Grand Chelem et numéro un mondial à 19 ans, a fait éclater tous les schémas connus ces quinze dernières années en termes de précocité. Pour un peu, d'aucuns pourraient trouver que Auger-Aliassime, 22 ans depuis cet été, prend son temps. Mais ce qu'il accomplit à un âge encore jeune reste remarquable.
C'est tout particulièrement vrai cet automne, où il accumule les victoires. 16 de suite, série en cours, avec des titres à Florence, Anvers et Bâle et une demi-finale a minima ici à Bercy. S'il soulève le trophée à l'Accor Arena dimanche, il deviendra même le joueur le plus titré en 2022 en rejoignant Alcaraz avec cinq titres. Pas mal pour celui qui avait perdu ses huit premières finales sur le circuit. Alors, pourquoi maintenant ? "On ne cherche pas à expliquer sinon, après, la magie se perd", sourit son entraîneur, Frédéric Fontang.

Le déclic ? Son couac new-yorkais

Plus sérieusement, le technicien français relève bien un point de départ, mais pas celui que l'on pourrait imaginer. Plutôt que son premier titre à Rotterdam au mois de février, c'est une défaite qui, à ses yeux, a servi de détonateur. "Le déclic, je dirais que c'est la défaite à l'US Open, avance-t-il en guise de surprise. Là, on a eu un temps pour travailler. Ce n'est pas évident d'en avoir pendant la saison parce qu'il y a beaucoup de tournois. C'était un mal pour un bien. Il perd contre (Jack) Draper, Félix ne fait pas un très bon match mais ça nous a donné trois bonnes semaines pour travailler. On s'est appuyé sur la Coupe Davis aussi, pour développer son jeu techniquement, tactiquement."
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Le principal intéressé confirme : "Après l'US Open, j'ai eu le temps de m'entraîner, je suis allé en Coupe Davis assez tôt, j'ai passé beaucoup d'heures sur le court, beaucoup d'heures à m'entraîner physiquement aussi. C'est bien que cela paie aussi rapidement." Mentalement et peut-être plus encore physiquement, il a retrouvé une fraîcheur qui lui avait fait défaut les mois précédents. Quand d'autres tirent la langue ou traînent la patte, lui pète le feu.
Il l'admet, à l'US Open, il ne se sentait "pas très bien". Si le duo ne rentre pas dans les détails, Fontang et son poulain évoquent tout de même le revers comme axe de travail majeur durant cette période post-new-yorkaise. "Il y avait des pistes d'amélioration, par exemple en revers au retour, glisse Auger-Aliassime. Il y a une nette amélioration sur mon retour de service ces derniers temps et aussi sur ma qualité de frappe en revers et cette consistance. Avec ça, je sens qu'il y a de moins en moins de trous dans mon jeu." Depuis trois semaines, aucun de ses adversaires n'a en tout cas trouvé la faille, même les plus menaçants sur le papier au cours de sa folle série, comme Alcaraz, Musetti ou Rune, qu'il retrouvera encore samedi.
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L'indoor, terrain de jeu idéal

Ce n'est sans doute pas un hasard non plus si le Québécois traverse sa meilleure période lors de la saison indoor. A Rotterdam, c'est déjà en salle qu'il avait inauguré son palmarès l'hiver dernier. C'est encore en indoor qu'il aligne les victoires cet automne. Son jeu est taillé pour et, comme il le rappelait en début de semaine, quand on grandit dans le grand froid canadien, on passe six mois de l'année à jouer sur court couvert.
"Puis les conditions changent moins d'un jour à l'autre, c'est donc un peu plus facile d'être constant, note FAA. Quand on sent que certaines choses fonctionnent bien, c'est plus simple de maintenir le même niveau, car il y a moins d'aléas. Ces trois dernières semaines, on jouait avec les mêmes balles, presque les mêmes conditions, même si les balles ont changé ici. C'est vrai que c'est bien pour moi par rapport à la façon dont je joue. J'ai toujours eu beaucoup de succès en indoor." "En salle, les réglages sont un peu plus faciles et son puzzle se met en place plus facilement", ajoute Frédéric Fontang.
Mais au fond, cette période faste devait arriver tôt ou tard. Le jeune homme a trop de qualités et travaille trop bien pour ne pas recueillir certains fruits. "C'est sûr que Félix a de plus en plus les outils pour performer, juge le coach. Chaque année, on essaie de les affûter un peu plus. Là, il traverse une très bonne période. Il est proche du coup juste, bien concentré, le physique va bien aussi."
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"Il est plus jeune, plus beau, plus fort, plus tout : Simon - Auger-Aliassime, respect mutuel

Ensuite, la confiance fait le reste, créant ce cercle vertueux si bénéfique au joueur. "Avec la confiance, témoigne encore Fontang, forcément, on joue mieux les points importants. C'est intéressant pour lui car il a vécu ça à une autre échelle quand il était plus jeune, parce qu'il a beaucoup gagné. C'est ce que vivent les joueurs comme Rafa ou Novak quand ils sont sur une série de victoires. En face, les autres se découragent un peu aussi parfois."
"Les choix sont beaucoup plus clairs et il y a aussi une meilleure sérénité, admet Félix Auger-Aliassime. On l'a vu à certains moments cette semaine où je peux être mené 0-15, 0-30. Je sens que malgré tout, j'ai toujours cette sérénité, cette confiance que je vais réussir à revenir, réussir à faire mon jeu de service, réussir à bien jouer sur les moments importants quand il faut." Sa victoire au premier tour à Bercy contre Mikael Ymer ressemble à une sorte de miracle (il a été mené 6-3, 4-1 et balle de double break contre lui), mais il n'aurait sans doute jamais gagné ce match il y a six ou huit semaines.
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Je pense que j'aurai l'énergie pour finir ce tournoi
Reste deux écueils dans une période aussi faste. Le premier est évidemment d'ordre physique. Il jouera samedi son 17e match depuis le 13 octobre, soit à peine plus de trois semaines. C'est beaucoup. Son staff s'attendait d'ailleurs à un contrecoup à l'Accor Arena et son premier match très laborieux contre Ymer a justifié cette crainte. "Le premier tour était très difficile, je ne me sentais pas très bien, confirme-t-il. Même hier matin (jeudi), avant de jouer Gilles (Simon), je ne me sentais pas au mieux."
Jour après jour, Félix a parfois l'impression d'avoir un corps plus vieux que son âge. "A l'échauffement c'était un peu difficile ce matin (vendredi), explique ainsi Fontang. Mais il a fait une bonne sieste après le repas et c'est reparti. Puis avec la confiance, forcément, on joue mieux les points importants c'est intéressant." Paradoxalement, le Montréalais se sent de mieux en mieux au fil des tours à Bercy au plan physique. "Je pense que j'aurai l'énergie pour finir ce tournoi", promet-il.
Le second danger pourrait tenir à une forme d'euphorie et à un désir d'après. Penser à la suite. A son premier Masters, très vite. Aux Grands Chelems où il rêve de briller, l'an prochain. Mais son équipe veille, Frédéric Fontang en tête : "Le rôle de l'entraîneur, c'est de ramener le joueur dans le moment présent, dans la méthode, qu'il ne se projette pas dans le futur ou dans le passé d'ailleurs. Faire en sorte qu'il reste dans sa bulle, dans ses routines, bien concentré. Mais ce n'est pas trop le genre de Félix de placer le curseur trop haut dans l'emballement quand tout va bien ou celui de la panique en cas de coup dur."
Son émotivité est en réalité bien à l'image de son jeu : stable. Qu'il décroche un quatrième titre de rang ou s'arrête en demie ou en finale ce week-end ne changera rien à la donne. Il est dans le vrai. La pente est toujours forte, mais il la grimpe mieux qu'il ne l'a jamais fait. La route, elle, est toujours aussi droite. Félix Auger-Aliassime sait où il veut aller et, ces temps-ci, il sait aussi comment.
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Félix Auger-Aliassime à Bercy.

Crédit: Getty Images

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