Rolex Paris Masters - "Il a une marge de progression énorme" : Rune, un diamant encore brut

ROLEX PARIS MASTERS - Sacré à Bercy dimanche, Holger Rune a créé la sensation et a progressé à une vitesse impressionnante cette saison, passant de la 103e place mondiale au Top 10. Mais le Danois de 19 ans en veut plus, à l'image de son collègue Carlos Alcaraz. Tout l'enjeu pour lui à l'avenir sera de réduire l'écart entre un niveau moyen trop fluctuant et cette semaine euphorique parisienne.

Du talent et du cran : Comment Rune a fait plier Djokovic

Video credit: Eurosport

Sidérante et rafraîchissante. Voici comment on pourrait résumer l'aventure qui a mené Holger Rune jusqu'à son premier titre en Masters 1000 à Bercy. Battre cinq membres du Top 10 consécutivement dans une même épreuve sur le circuit (hors tournoi des Maîtres), personne ne l'avait fait avant lui. Mais le faire à 19 printemps avec cette bouille enfantine, c'est encore autre chose. Le Danois est ainsi devenu le plus jeune vainqueur du Rolex Paris Masters depuis 36 ans et un certain Boris Becker, alors âgé de 18 printemps.
Plus fort encore, Rune y est parvenu en détrônant le maître de Bercy, recordman du nombre de titres (6) Novak Djokovic qui disputait qui plus est sa 56e finale en Masters 1000 (pour 38 titres). En termes d'expérience, le Serbe avait l'allure d'un Everest à gravir. Beaucoup en auraient été impressionnés avant même de rentrer sur le court, pas lui. C'est peut-être ce qui sépare les très bons joueurs et ceux qui, comme lui, ont l'âme d'un champion.
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"Quelle maturité de Rune d'être allé chercher à seulement 19 ans un champion comme Djokovic"

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"Peu importe qui je joue, je crois que je peux gagner. Je savais qu'un petit plus était nécessaire pour y parvenir aujourd'hui (dimanche) parce que c'était la finale. Lui en a joué plus, si je ne me trompe pas, plus d'une centaine dans sa carrière. J'ai juste essayé d'utiliser ma jeunesse, le pouvoir de ma volonté, pour faire tout ce que je pouvais pour le mettre sous pression. J'ai super bien joué dans les moments importants, et c'est ce qui a fait la différence. C'est probablement l'un des matches les plus durs que j'ai joués dans ma vie", a-t-il d'ailleurs confié en conférence de presse.
A le voir surpasser en puissance par séquences Novak Djokovic, mais aussi défendre comme un acharné pour remporter quelques points d'anthologie pour revenir de 0/40 en début de deuxième set ou débreaker dans le troisième, on se dit que le Danois ne manque pas d'armes. Il a même peut-être déjà tout pour dominer le tennis mondial. Son adversaire du jour n'a d'ailleurs pas caché qu'il était impressionné par la gamme complète de son bourreau à un si jeune âge.
Alors Rune est-il prêt à tout ravager sur son passage dans les prochains mois ? Attention aux conclusions hâtives. Certes, le Danois a été exceptionnel cette semaine, mais il aurait pu disparaître dès son entrée en lice contre Stan Wawrinka contre lequel il a effacé trois balles de match. Ces performances parisiennes ne sortent pas de nulle part : après deux finales à Sofia et Bâle et un titre à Stockholm où il avait dominé Stefanos Tsitsipas, le gamin débarquait avec une confiance certaine. Cet automne sur dur indoor ne doit pourtant pas faire oublier une certaine irrégularité.
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Djokovic et Nadal ont quand même de beaux restes : le Top 5 points de la semaine parisienne

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Un niveau récent ahurissant mais à consolider

"Il y a eu des très bas et des très hauts cette année. Le très haut était le quart de finale à Roland-Garros et le très bas, c'était ses neuf premiers tours de suite après (6 en fait, mais 9 défaites en 11 matches, NDLR). Ces dernières semaines, il a trouvé deux choses importantes : d'abord, il réussit beaucoup mieux à gérer ses émotions, c'est ce qui lui a permis de gagner le match. S'il est breaké dans le premier jeu du deuxième set, ce n'est pas le même match. Il n'a pas paniqué, il est resté dans son match, il a trouvé des solutions. Il a des capacités mentales hors normes, mais dans le passé, la gestion de l'émotion ne lui permettait pas d'aller chercher ses capacités mentales", a expliqué son nouveau (second) coach Patrick Mouratoglou en conférence de presse.
Et l'entraîneur français d'ajouter : "Ensuite, son jeu est plus structuré. C'est très dur d'être stable au cours d'un match et stable au cours d'une saison quand on n'a pas une vision hyper claire de son jeu et que l'on passe par des phases. Avant, les extrêmes étaient beaucoup plus importants et il pouvait rester jusqu'à la fin du match en défense par exemple. Le fait d'avoir un jeu plus structuré, même s'il y a encore beaucoup de travail évidemment, lui a permis de franchir toutes ces étapes, parce qu'il avait déjà les qualités de jeu en janvier. Après la victoire amène la victoire évidemment."
Pour digérer ses progrès spectaculaires du printemps - il avait gagné son premier tournoi à Munich en écrasant Alexander Zverev au passage avant donc d'atteindre les quarts du côté de la Porte d'Auteuil -, Rune a ainsi eu besoin de quelques semaines. Mais après ce passage à vide de l'été, il a trouvé son second souffle, sans doute en partie inspiré par Mouratoglou, le fameux et si important œil extérieur qui lui a donné une autre perspective, associé à son coach de toujours Lars Christensen.
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L'incroyable réflexe de Rune !

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Mais le Français ne se laisse pas griser par le succès immédiat de leur nouvelle collaboration. Car cette réussite constitue aussi un épiphénomène. "Il joue un tennis assez incroyable depuis trois semaines. Il le joue pour les raisons que j'ai expliquées, mais il y a aussi un côté enthousiasme évident. Il faut être très lucide sur le travail qui lui reste à accomplir. Il a une marge de progression énorme. Il a encore beaucoup de choses dans les secteurs dans lesquels il doit beaucoup progresser. On va s'y atteler dès la présaison – on y est", a-t-il souligné.
Plus que l'éventuelle participation de son poulain au Masters - Rune est actuellement en position de premier remplaçant et se rendra à Turin dans l'espoir de jouer avec le gotha mondial -, c'est vers 2023 que le Danois et son équipe sont d'ores et déjà tournés. Physiquement, le gamin impressionne déjà, notamment au niveau des muscles de jambes qui lui donnent un ancrage déjà formidable. Mais à 19 ans, il peut encore prendre quelques centimètres - il mesure déjà 1 mètre 88 - et développer encore le haut de son corps. De quoi lui donner encore plus de puissance au service et d'envergure au filet, des domaines où l'intéressé est déjà fort mais encore trop irrégulier.
"Il est 10e, c'est super, mais ce n'est pas son ambition, a enfin expliqué Mouratoglou. Son niveau de jeu aujourd'hui, c'est plutôt son niveau de jeu haut. Son niveau de jeu moyen est en dessous mais je pense qu'il est nettement plus haut qu'il ne l'était il y a quelques mois. Il faut qu'on monte son niveau moyen et qu'on développe ce qu'il faut pour que son niveau d'excellence soit encore meilleur si possible. Il est bluffant sur sa capacité à mettre en place les choses. Ce que je lui ai demandé il y a trois semaines, il l'a fait tout de suite, il l'a fait tous les jours, à chaque match et de mieux en mieux. C'est rare. Parce qu'il a trouvé un peu plus de stabilité, il a été capable de faire des choses extraordinaires."
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