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De Londres à Londres, du "Young Gun" au Maître, l'ascension de Daniil Medvedev en 10 dates-clés

Laurent Vergne

Mis à jour 24/11/2020 à 15:14 GMT+1

Daniil Medvedev a fini 2020 tambour battant en s'imposant à Bercy et surtout dimanche soir lors du Masters de Londres, le plus grand titre de sa carrière à ce jour. De son entrée dans le Top 100 il y a tout juste quatre ans à son explosif automne 2020 en passant par son second semestre 2019, retour sur la montée en puissance progressive d'un joueur pas comme les autres.

2016 - 2020 : L'ascension de Daniil Medvedev

Crédit: Eurosport

Londres, novembre 2016

Novembre 2016. Daniil Medvedev est à Londres. Pas pour jouer le Masters mais pour recevoir un chèque de 50000 dollars, pour avoir remporté le "Young Guns Contest" de son équipementier Tecnifibre, organisé en partenariat avec l'AFP. Toute l'année, il s'est tiré la bourre avec d'autres jeunes joueurs de la marque française, dont Grégoire Barrère. A l'O² Arena, il a même l'honneur de tenir une conférence de presse après la rencontre entre Stan Wawrinka et Kei Nishikori.
Le Russe, alors âgé de 20 ans, est encore inconnu du grand public… et d'une bonne partie des médias. On lui demande s'il a un lien de parenté avec l'ancien finaliste de Roland-Garros, Andrei Medvedev. "Non, il est Ukrainien, je suis Russe", répond-il poliment. "Et êtes-vous en famille avec le président russe, Dmitri Medvedev ?" "Non plus". S'il n'appartient pas encore à l'élite, cette année 2016 l'a tout de même vu effectuer un bond de géant. 330e mondial en début de saison, il vient de s'incruster pour la première fois dans le Top 100. Il finira 2016 au 99e rang. Son objectif ? "Être dans le Top 10 d'ici un an ou deux." Bientôt, tout le monde saura qui il est.

Chennai, janvier 2017

Lors du premier tournoi de la saison, à Chennai, en Inde, Medvedev profite à fond d'un tableau ouvert après l'élimination de Marin Cilic, tête de série numéro un. Il bat successivement Thiago Monteiro, Yen-Hsun Lu, Jozef Kovalik et Dudi Sela pour atteindre la finale, la toute première de sa carrière professionnelle sur le grand circuit. En dépit de sa logique défaite en deux sets en finale contre Roberto Bautista Agut, cela n'en reste pas moins une semaine capitale dans sa carrière. Elle lui permet de bondir de 34 places au classement pour se hisser au 65e rang. Le voilà ancré pour de bon dans le Top 100.

Wimbledon, juillet 2017

"Ma surface préférée, c'est le gazon et j'adorerais briller à Wimbledon", nous avait confié Medvedev fin 2016. C'est là, six mois plus tard, qu'il va signer le premier grand coup d'éclat de sa carrière. Au All England Club, le Moscovite installé dans le Sud de la France est opposé à Stan Wawrinka. Le Suisse, récent finaliste à Roland-Garros, est en délicatesse avec son genou gauche. De fait, on ne le reverra plus en 2017 après ce match.
Mais pour Medvedev, vainqueur en quatre sets (6-4, 3-6, 6-4, 6-1), cette toute première victoire en Grand Chelem face à une figure majeure du circuit constitue un premier message envoyé. "Je n'avais encore jamais gagné un match en Grand Chelem alors, même si je n'avais pas battu Stan, ça aurait été une des plus grandes victoires de ma vie, dit-il. Mais que ça arrive contre lui, mon premier succès contre un Top 10, je n'ai pas de mots. Je m'en souviendrai toute ma vie."
Mais il reste du travail, dans le jeu comme dans le comportement. Son aventure tourne court : au tour suivant, il s'incline contre le Belge Ruben Bemelmans en cinq sets, et jette des pièces au pied de la chaise d'arbitre, comme pour insinuer que celui-ci était corrompu. Il s'en défend ("C'était stupide d'avoir fait ça, mais ça ne voulait pas dire ça", assure-t-il) mais l'ATP lui inflige une lourde amende.

Sydney, janvier 2018

Daniil Medvedev a connu une première petite crise de croissance en 2017. Le gros travail effectué avec son entraîneur français, Gilles Cervara, n'a pas encore tout à fait porté ses fruits. En termes de classement, il semble buter sur un palier. 65e après sa finale à Chennai, il a atteint la 48e place en cours d'année mais fin 2017, il est retombé à son niveau de janvier. Pire, en perdant les points de sa finale à Chennai, il recule même au 84e rang début janvier 2019. Mais pas de panique. Medvedev sait où il va, son coach aussi. Et il ne va pas tarder à rebondir.
Le Russe débute sa saison à Sydney. Et confirme qu'il aime le mois de janvier. Il sort notamment Philipp Kohlschreiber au 1er tour et Fabio Fognini en demie avant de s'imposer en finale contre le tout jeune Alex De Minaur, 18 ans, en reversant complètement le match (1-6, 6-4, 7-5). A 21 ans, Daniil décroche ainsi le tout premier titre de sa carrière. Son absence de réaction étonne après la balle de match. Il s'est juste retourné vers son clan, le visage presque fermé. Pas de hurlements, pas d'effondrement au sol. Certains s'en étonnent. "Plus de je ressens d'émotions, moins je les montre, en particulier quand elles sont positives, précise-t-il. Je suis comme ça. Mais c'est incroyable et croyez-moi, je suis vraiment très, très heureux." Cette quasi-impassibilité dans la victoire deviendra une marque de fabrique.

Tokyo, octobre 2018

Daniil Medvedev avance par paliers. Il peut donner l'impression de plafonner pendant plusieurs mois puis, d'un seul coup, sur quelques semaines, quelques tournois, il surgit pour enchainer les grosses performances. Sa carrière a toujours fonctionné de la sorte jusqu'ici. 2018 n'échappe pas à cette règle. S'il a conquis son 2e titre à l'été à Winston Salem (avec un tableau relativement peu relevé, sa victoire la plus probante survenant en finale contre Steve Johnson, 34e mondial), il a plutôt déçu dans les tournois majeurs. Puis à l'automne, c'est le grand bond en avant.
Il passe d'abord tout près de battre Dominic Thiem à Saint-Pétersbourg, puis vit une semaine de rêve à Tokyo. Issu des qualifications, Medvedev aligne des victoires contre Schwartzman, Klizan, Raonic, Shapovalov puis Nishikori en finale. Le tout sans perdre un seul set. C'est son premier titre dans un tournoi de cette envergure (ATP 500). Peu après, il enchaine des demi-finales à Moscou puis Bâle. Fin 2018, le voilà 16e mondial. D'autres, plus jeunes, ont grimpé plus vite et plus haut que lui, à l’image d’Alexander Zverev. Mais si Medvedev donne parfois l'impression de prendre son temps, le cap, lui, est bien fixé.

Melbourne, janvier 2019

Pour la première fois, il atteint la seconde semaine d'un tournoi du Grand Chelem en se hissant en huitièmes de finale de l'Open d'Australie. Un cap important, mais paradoxalement, c'est surtout dans la défaite qu'il va tirer des enseignements positifs. Medvedev s'incline certes en quatre sets contre Novak Djokovic, non sans avoir sérieusement bousculé le numéro un mondial pendant les trois premières manches, en lui imposant un vrai combat à l'échange.
Lors de l'accolade au filet après la balle de match, il murmure quelques mots à l'oreille du Serbe, provoquant chez lui un rire. "Il m'a demandé s'il m'avait fait transpirer aujourd'hui, et j'ai rigolé, parce que je pense que la réponse est évidente", confie le Djoker. Ce Djokovic-là va ensuite marcher sur l'eau jusqu'à détruire Rafael Nadal en finale. Même vaincu, Medvedev quitte Melbourne avec la certitude de pouvoir rivaliser avec les meilleurs. Cette conviction-là vaut quelques victoires.

Cincinnati, août 2019

Finaliste à Washington puis Montréal (sa première finale en Masters 1000), Daniil Medvedev entame tambour battant la tournée nord-américaine sur dur, mais avec une pointe de frustration. Néanmoins, la confiance est là et il va capitaliser dessus. Lorsqu'il arrive à Cincinnati, le voilà pour la première fois parmi les dix premiers mondiaux. Dans l'Ohio, il éliminé Edmund, Paire, Struff puis son ami Andrey Rublev pour atteindre le dernier carré.
Il y retrouve un certain Novak Djokovic, tout juste auréolé de sa victoire à Wimbledon le mois précédent. Autoritaire, le Moscovite s'impose en trois sets (3-6, 6-3, 6-3). C'est sa première victoire contre un numéro un mondial. Le lendemain, pour sa troisième finale en trois tournois, il prend le meilleur sur David Goffin (7-6, 6-3). Ce premier sacre en Masters 1000 s'accompagne d'une entrée dans le Top 5 mondial. En l'espace de trois semaines et trois tournois, il a définitivement changé de statut. Et on n'a encore rien vu.

New York, septembre 2019

Lorsque débute l'US Open 2019, Medvedev compte forcément parmi les outsiders à surveiller de près. Sauf qu'il n'a encore jamais dépassé les huitièmes en Grand Chelem et que beaucoup craignent qu'il ne soit entamé physiquement et mentalement par sa folle cavalcade estivale. Mais le garçon a de la ressource. Son parcours est pourtant loin de s'apparenter à une promenade de santé. Il lâche un set au 2e tour contre Hugo Dellien, en affichant une évidente frustration comme cela lui arrive encore parfois.
Puis en 16es de finale, c'est l'incident contre Feliciano Lopez. Daniil s'en prend à un ramasseur de balle, adresse un doigt d'honneur qu'il voulait discret mais que l'écran géant du court Louis-Armstrong révèle à tout le public. A partir de là, le Russe devient la tête de turc de Flushing. Conspué, pris en grippe, il va prendre du plaisir à mettre de l'huile sur le feu. Medvedev à New York, dans cette quinzaine, c'est un peu Maurice Pialat en 1987 à Cannes : "Si vous ne m'aimez pas, je peux vous dire que je ne vous aime pas non plus !"
En réalité, il adore ça, se nourrit de cette hostilité. Hué à chaque apparition, il ne se démonte pas et se hisse en finale en battant Stan Wawrinka en quarts puis Grigor Dimitrov en demie. Puis vient le chef-d'œuvre de la finale contre Rafael Nadal. Vaincu en cinq sets et près de cinq heures par l’Espagnol, c'est pourtant lui qui a donné à ce match une dimension inoubliable en revenant alors qu'il était mené deux sets et un break. Mieux, il se réconcilie avec le public lors d'un discours aussi émouvant que drôle. Au-delà du joueur, c'est le personnage Medvedev qui se rend incontournable. Et précieux.

Paris, novembre 2020

2020, drôle d'année. Pour tout le monde. Pour Daniil Medvedev aussi. Lui qui après avoir tant joué les six mois précédents, avait décidé d'attaquer piano 2020 pour monter progressivement en puissance, se trouva fort dépourvu quand le coronavirus fut venu. Lors de la reprise, au cœur de l'été, il ne s'en tire pas si mal, avec une demi-finale à l'US Open.
Malgré tout, sans disparaitre, il n'est plus au centre du jeu. Jusqu'à Bercy, où il redevient pleinement lui-même, s'imposant en patron avec notamment des succès face à Schwartzman, Raonic et Zverev. Ce n'est pas son premier titre en Masters 1000. C'est le troisième. Mais celui-ci restera sans doute très important. C'est le retour du Medvedev du second semestre 2019, et la preuve qu'il l'a digéré. Il ne s'agissait pas d'une parenthèse enchantée mais trop belle pour être vraie. Medvedev est fait pour durer.
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Un set et demi pour trouver la clé puis Medvedev a écoeuré Zverev : le résumé de la finale

Londres, novembre 2020

Dans la foulée de son titre à Bercy, il a le vent dans le dos mais sa première expérience malheureuse au Masters un an plus tôt incite à la prudence. A tort. Le Russe va surfer sur sa vague. Cinq matches, cinq victoires, pour décrocher le plus grand titre de sa carrière. Premier joueur à battre les numéros un, deux et trois mondiaux au Masters, premier joueur à s'imposer en ayant été mené une manche à rien en demie puis en finale, il achève 2020 sur un gigantesque point d'exclamation.
Le "petit" Daniil de 2016 a bien grandi. La différence ? "Cette fois, le chèque est beaucoup plus gros", plaisante-t-il en référence aux 50000 dollars des "Young Guns". Quatre ans après son passage en catimini à Londres, Daniil Medvedev est devenu quelqu'un. Un joueur majeur, désormais 4e mondial, et plus très loin du podium. Après ses premiers titres en 2018, ses premiers Masters 1000 et sa première finale de Grand Chelem en 2019 et son premier Masters en 2020, il semble encore posséder une marge de progression. C'est peut-être le plus prometteur pour lui alors qu'il n'a encore que 24 ans.
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Maître tacticien, maître de ses nerfs : Comment Medvedev a renversé Thiem

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