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Rapport fédérations sportives : Oudéa-Castéra pointée pour son salaire comme dirigeante du tennis
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Publié 22/01/2024 à 14:42 GMT+1
Le salaire d'Amélie Oudéa-Castéra en tant que directrice générale de la FFT fait partie des rémunérations que la commission d'enquête sur les fédérations sportives juge "anormales", un montant qu'elle a "minimisé" en le jugeant comparable à celui de son prédécesseur. En fin de journée, la ministre de l'Education et des Sports a dénoncé un rapport parlementaire "militant" et "instrumentalisé".
Amélie Oudéa-Castéra, ministre des Sports.
Crédit: Getty Images
Au cours de trois heures d'audition en novembre devant la commission d'enquête sur les fédérations sportives, Amélie Oudéa-Castéra, qui se trouve actuellement dans la tourmente en tant que ministre de l'Education, avait indiqué qu'elle avait gagné pendant plus d'un an 500.000 euros brut sur 13 mois dont une prime sur objectif de 100.000 euros lorsqu'elle était directrice générale de la FFT. Elle avait alors précisé que sa rémunération était "très proche de celle de son prédécesseur".
Dans son rapport, la commission d'enquête relève ainsi qu'elle a "minimisé de 86.000 euros" son salaire puisque celui de Jean-François Villotte, qui l'a précédée à ce poste, touchait 373.750 euros brut annuels assortis d'une prime de 37.375 euros. Le rapport fait aussi part d'une demande de l'inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche (IGESR) --non publique jusqu'ici--, datant de février 2022, avant l'arrivée d'Amélie Oudéa-Castéra à la FFT, de "reconsidérer" les dix plus hautes rémunérations, "les avantages en nature", et juge "considérable - voire anormale - compte tenu du statut associatif de l'organisation (...)" la rémunération du directeur général de l'époque.
Ces montants avaient fait réagir pendant la longue audition de la ministre. "Comprenez qu'on puisse s'interroger au niveau du sport amateur qu'une dirigeante de fédération touche 500.000 euros par an alors que je vois dans ma ville de Toulouse qu'on a plein de clubs qui sont exsangues", a taclé le député LFI François Piquemal. "Je comprends très bien que 500.000 euros puissent paraître élevé au regard des standards de vie des Français", avait-elle rétorqué.
Moretton visé par une enquête du parquet de Paris
Autre grief à l'encontre de la ministre, avoir justifié son salaire à la FFT par la richesse de cette fédération qui, a-t-elle dit lors de l'audition, ne recevait pas d'argent public. Elle a rectifié très rapidement après l'audition en expliquant que la FFT avait reçu 1,2 million en 2022 - en réalité 1,45 million selon les parlementaires. Le rapport "s'étonne" aussi que la ministre des Sports "ait pu nommer au sein du comité national, pour renforcer l'éthique et la vie démocratique dans le sport, en mars 2023, M. Franck Latty, président du comité d'éthique de la Fédération française de tennis".
Ce comité "peut être amené à se prononcer sur la gestion de l'ancienne directrice" et "un décret du 4 août 2022 a entendu à juste titre rompre tout lien entre la ministre des Sports et son ancienne fédération". Par ailleurs, le président actuel de la FFT, Gilles Moretton, auditionné par la commission, est visé par une enquête du parquet de Paris, comme six autres dirigeants du sport français soupçonnés d'avoir livré de faux témoignages.
Un rapport parlementaire dénonce "défaillances systémiques" et "omerta à tous les étages"
"Entre-soi" et "omerta à tous les étages" : la commission d'enquête parlementaire sur les fédérations sportives fustige dans un rapport les "défaillances systémiques" du sport français en matière d'éthique, de gouvernance et de lutte contre les violences sexuelles, réclamant la création d'une autorité indépendante de contrôle. A six mois des Jeux Olympiques de Paris 2024, ce rapport rédigé par la députée écologiste Sabrina Sebaihi brosse un portrait au vitriol du fonctionnement des fédérations, dans la droite ligne d'auditions houleuses à l'Assemblée. Le parquet de Paris avait déjà ouvert plusieurs enquêtes à la suite de signalements de la commission sur d'éventuels "faux témoignages" de dirigeants sportifs devant les parlementaires.
Consulté par l'AFP avant sa publication mardi, le rapport de 250 pages considère donc "très élevées voire anormales" les rémunérations de certains d'entre eux. "En février 2022, l'inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche avait appelé à reconsidérer le niveau de rémunération des dix principaux cadres de la Fédération française de tennis et pointé l'absence de procédures de recrutement pour ses principaux cadres", souligne la députée.
Sabrina Sebaihi juge le milieu sportif gangréné par la "culture du secret, du mensonge et du faux témoignage" et "pas suffisamment habitué à rendre des comptes". La parlementaire réclame un "choc de contrôle, de transparence et de culture démocratique", grâce à la mise en place d'une "autorité administrative indépendante chargée de la protection de l'éthique du sport".
Elle pointe aussi les "défaillances de l'Etat" dans ses missions de contrôle, critiquant les nouveaux contrats de délégations mis en place avec les fédérations, "lacunaires" et "assortis d'engagements insuffisamment précis". Sabrina Sebaihi insiste également sur des "accusations graves" visant la fédération française de kickboxing et son club d'Aulnay-sous-Bois en réclamant un "état des lieux".
Dans la foulée de l'audition du journaliste Romain Molina devant la commission, le ministère des Sports avait saisi la justice après avoir eu connaissance de faits susceptibles de révéler un système de chantage de nature sexuelle, dans un club de kickboxing. La Fédération conteste en bloc ces accusations, et assure qu'elle va porter plainte pour diffamation contre Romain Molina. En matière de violences sexuelles, qui secouent le monde du sport depuis les révélations en 2020 de la patineuse Sarah Abitbol, Sabrina Sebaihi dénonce un "long silence", "long déni" et une "longue inertie" du sport français.
Elle considère notamment que la plateforme Signal-Sports lancée par le ministère en 2020 est "invisibilisée", "sous-dimensionnée" et "très largement méconnue". En décembre, l'ex-ministre des Sports Marie-George Buffet avait déjà réclamé dans un rapport une "autorité indépendante" pour prévenir et traiter les violences sexistes et sexuelles dans le sport, une proposition avec laquelle la ministre Amélie Oudéa-Castéra s'était dite en désaccord, privilégiant la cellule actuelle.
Plus tard dans la journée, la ministre de l'Education nationale et des Sports a qualifié le rapport d'enquête parlementaire sur les fédérations sportives de "militant", estimant que ses travaux ont été "instrumentalisés à des fins politiques", a fait savoir son entourage à l'AFP. Les conclusions de ce rapport "jettent sans nuance l'opprobre sur tous les acteurs du sport français", estime aussi Amélie Oudéa-Castéra, dans la tourmente depuis son arrivée à l'Education nationale en raison de la scolarisation de ses enfants dans un établissement scolaire privé huppé.
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