Roland-Garros 2013: Gilles Simon a lutté contre ses démons face à Lleyton Hewitt

Il y a des victoires qui font plaisir. D'autres qui vous enivrent. Puis il y a celles qui soulagent. Ce ne sont pas toujours les plus belles. Mais elles font du bien aussi. Celle de Gilles Simon contre Lleyton Hewitt dimanche est de cette nature. Il suffit de voir l'expression du Niçois après la balle de match. Une vraie délivrance. Une libération. Parce que Simon s'est battu presque autant contre lui-même que contre son adversaire dimanche sur le court Suzanne-Lenglen. Crispé et crispant, il n'a jamais vraiment réussi à se livrer sans arrière-pensée. Pendant son match, après une énième frustration, on l'a entendu hurler un "mais p..., relâche-toi !". Plus facile à dire qu'à faire, évidemment...

Pour un joueur français, aborder un tournoi comme Roland-Garros n'est jamais simple. C'est à la fois excitant et inhibant. Excitant, parce que c'est un énorme privilège que de pouvoir jouer un Grand Chelem chez soi, devant son public. Quatre nations sur un peu plus de 200 ont cette chance. Mais ce cadeau, bien réel, peut receler quelque chose d'empoisonné pour qui ne parvient pas à l'ouvrir comme il faut. "Bien sûr qu'il y a plus de pression à Roland-Garros qu'ailleurs pour nous, les Français, témoigne Gilles Simon. Chaque fois qu'on a envie d'être bon, on se met de la pression. Forcément, à Roland Garros, on a envie d'être même mieux que ça ! Ce n'est pas sur commande, ce n'est pas "j'ai envie d'être bon et je joue incroyable".

Pour "Gilou", dimanche, c'était même plutôt le contraire. "Justement, confirme-il, au début, ça marche même un peu dans l'autre sens, comme tout le monde...! Ça prend un peu de temps de trouver son rythme." Ce n'est pas faute de ne pas être prévenu. Quand il débute une édition de Roland-Garros, Simon sait qu'il ne doit pas se crisper, qu'il est primordial de se défaire de cette considération "à domicile". "Je suis vraiment très déçu de la manière dont j'ai abordé ce match, regrette le numéro trois tricolore, parce que c'était un objectif pour moi de ne justement pas le faire, et j'ai vraiment fait le match que je ne voulais pas faire aujourd'hui." La seule bonne nouvelle, mais elle est de taille, c'est que ce match, il a fini par le gagner. "C’est fait, je m'en sors bien, j'ai réussi à gagner, souligne-t-il. Pour la première fois, j'ai gagné un match après avoir été mené deux sets à zéro. Il restera toujours du positif, mais je ne suis vraiment pas satisfait de cette entrée de tournoi."

Cet effet pernicieux de Roland-Garros sur les joueurs français, surtout vrai dans les premiers tours pour ceux qui, comme Simon, ont un statut à justifier, est peut-être encore plus marqué pour le Niçois que pour un Tsonga ou un Gasquet. D'abord parce qu'il y a eu son échec en Coupe Davis, contre l'Argentine. Un bon Roland-Garros n'effacera rien, mais une sortie de route d'entrée, devant le public français, aurait accentué son trouble. Puis ce tournoi ne lui a jamais vraiment réussi. Et ça ne date pas d'hier. Chez les jeunes, déjà, Simon ramait à Roland. Alors, forcément, il a tellement envie de bien faire qu'il en fait trop. "Il y a beaucoup d'ambition, beaucoup d'attentes, à moi d'arriver à gérer ça, reprend le Français. Mais encore une fois, ce n'est pas non plus mon premier Roland Garros, j'ai l'habitude, mais a priori pas assez l'habitude pour commencer mieux que ça. J'espère vraiment pouvoir jouer mieux que ça au prochain tour." Gilles Simon ne sera sans doute vraiment libéré de ses démons parisiens que s'il parvient à se glisser en deuxième semaine. D'ici là, il va encore devoir lutter contre lui-même.