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Grazie Marco !

Laurent Vergne

Mis à jour 06/06/2018 à 08:57 GMT+2

ROLAND-GARROS 2018 – Quelle histoire ! Personne n'aurait misé un demi-centime d'euro sur Marco Cecchinato il y a dix jours. A raison. L'Italien est en demi-finale et, mardi, il a livré le match de sa vie et celui de la quinzaine contre Novak Djokovic. Tant mieux pour lui. Pour nous, aussi, car son épopée parisienne sauve pour l'instant de la torpeur un tournoi qui manquait d'envergure.

Marco Cecchinato

Crédit: Getty Images

C'était il y a une semaine à peine. Comme beaucoup, je me suis pressé sur le petit court numéro 7 en cette fin de matinée. Là, Marco Cecchinato dispute son deuxième tour. Mais ce n'est pas lui que je suis venu voir. Le public non plus. L'attraction, c'est son adversaire, Marco Trungelliti. L'Argentin est la belle histoire de ce début quinzaine.
Battu en qualifications, trop loin sur la liste des lucky losers pour avoir une chance raisonnable d'intégrer le tournoi principal, il est en famille à Barcelone, avant qu'une épidémie de forfaits ne lui ouvre les portes du grand tableau. 10 heures de voiture plus tard avec son frère, sa mère et sa grand-mère, il est de retour à Paris pour jouer, et gagner, son match du premier tour face à Bernard Tomic.
Cuit physiquement et sans doute plus encore mentalement après avoir été la coqueluche des médias pendant 48 heures, Trungelliti s'incline nettement contre Cecchinato. Sa belle aventure s'arrête là et tout le monde a une pensée pour lui. On aurait aimé qu'il prolonge son début d'épopée. Personne, et surtout pas moi, n'imagine alors que celui qui vient d'y mettre fin va reprendre le flambeau de l'improbable.
D'un Marco à l'autre, c'est un nouveau conte de fées, moins épique au rayon transports mais sportivement bien plus remarquable, qui s'amorce. Il n'en est encore qu'à ses prémices. Six jours et trois victoires plus tard, toutes plus ébouriffantes les unes que les autres, contre Pablo Carreno Busta, David Goffin et Novak Djokovic, Marco Cecchinato est en demi-finales de Roland-Garros.

Tout aurait pu s'arrêter d'entrée

C'est un destin à la Pernfors, à la Verkerk, ou à la Kuerten qu'est en train de se tailler le Sicilien. Le premier s'était arrêté aux portes de la finale, le deuxième s'y était effondré, le troisième avait gagné le tournoi. Avec ce qui l'attend, Dominic Thiem puis, possiblement Rafael Nadal, j'ai beaucoup de mal à envisager une trajectoire semblable à celle de Guga pour Cecchinato.
D'autant qu'il devrait maintenant retrouver face à lui des joueurs à 100% physiquement, ce qui n'était pas le cas d'un Goffin essoré par son combat en deux jours face à Monfils et à un degré moindre d'un Djokovic en mode torticolis pendant un set et demi au moins. Pas sûr non plus que les deux joueurs susnommés laissent filer autant d'occasions que Djokovic mardi.
Mais après tout, peut-être est-il dangereux de minimiser les chances d'un joueur dont le parcours ne répond jusqu'ici à aucune logique. Tout est dingue ici. Cecchinato aurait pu ne pas être là du tout et il aurait pu ne plus y être depuis longtemps. D'abord, il y a eu cette histoire de paris. Suspendu 18 mois pour son implication dans une affaire de matches truqués, il s'en est tiré sur la forme, pas sur le fond, pour un vice de procédure qui a poussé le Comité olympique italien à annuler la sanction. Mais si c'est une tâche sur sa carrière, ce n'en est pas une sur son tournoi.
Sportivement, Cecchinato a pris du galon au printemps en décrochant son premier titre à Budapest (en sortant des qualifications s'il vous plait, preuve que l'art de la surprise est une seconde nature chez lui) mais, ici, à Paris, il aurait pu passer totalement inaperçu. Il s'en est fallu d'un rien. Au premier tour, Marius Copil, le gros serveur roumain pourtant guère amateur de terre battue, a mené deux manches à rien face à lui. Cecchinato s'en était tiré 10-8 au cinquième. La première victoire de sa carrière dans un tournoi du Grand Chelem. A 25 ans...

Un bien fou

Depuis, il virevolte. Plus encore que bravo, on a surtout envie de lui dire merci d'égayer un peu une quinzaine bien morne jusqu'ici. Il reste encore cinq jours et une dizaine de matches pour donner de l'amplitude à cette édition 2018, mais pour l'heure, son parcours écrase tout le reste. Surtout en ce début de deuxième semaine, qui a vu ses deux chocs les plus attendus (Serena - Sharapova et Thiem - Zverev) tourner court, ou ne pas tourner du tout. Son match contre Djokovic a fait un bien fou à ce Roland-Garros et le Lenglen l'a bien compris. Il s'est enflammé comme jamais cette année, pas même pour le Goffin-Monfils pourtant bien ficelé lui aussi.
On a trop pesté contre l'absence de renouvellement, sur le trust permanent d'une poignée de joueurs sur le dernier carré des Majeurs des années durant pour ne pas se réjouir d'y trouver, enfin, une part de découverte. D'autant que Super Marco a le jeu séduisant pour accompagner son histoire. Cette main de velours, ce revers à une main, ces amorties si souvent bien senties... Il prendra peut-être trois sets vendredi. C'est même, honnêtement, le scénario le plus probable, tant Thiem parait enrobé de certitudes.
Peut-être va-t-il aussi finir par réaliser tout ce qui lui arrive, ce qui serait le pire de tout en entrant sur le Chatrier (où il n'a encore jamais mis les pieds...) pour affronter l'Autrichien. Mais quoi qu'il arrive, son parcours laissera une trace, et ce dernier tie-break contre Djokovic a déjà sa place dans le gotha. Alors, grazie mille signore !
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Marco Cecchinato

Crédit: Getty Images

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