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Grégoire Barrère, l'électrochoc salutaire : "Mon coach m'a bien défoncé"

Laurent Vergne

Mis à jour 23/05/2022 à 00:10 GMT+2

ROLAND-GARROS 2022 – Vainqueur de Taro Daniel en cinq sets dimanche, Grégoire Barrère a franchi le premier tour sur la terre battue parisienne. Une vraie satisfaction, d'autant que le Français était au fond du trou il y a encore quelques semaines. Il était loin d'imaginer qu'il serait en mesure de rentrer dans le grand tableau. Puis tout a changé...

"Les résultats sont logiques pour les Français, seul Barrère a tiré son épingle du jeu"

Même si l'espoir fait vivre, la réalité, elle, ne s'embarrasse pas de chimères. Ce Roland-Garros, pour le tennis français, a toutes les "chances" de figurer au rang des éditions faméliques. Alors, chaque coin de ciel bleu sera bon à prendre. Le premier est venu de Grégoire Barrère dimanche. Face à Taro Daniel, le Francilien avait un premier tour "jouable". Ce fut compliqué, il a été mené une manche à rien puis deux sets à un, il a même pris une bulle au passage, mais a fini par s'en sortir (3-6, 6-2, 0-6, 6-3, 6-4). Une victoire qui fait donc du bien au clan tricolore mais, surtout, au principal intéressé, qui en avait bien besoin.
Petit coup d'œil dans le rétro. A l'été 2019, Grégoire Barrère intègre à 24 ans le Top 100 pour la première fois de sa carrière. Un aboutissement. Il va y rester une année entière, avec un pic au matricule 80, avant d'en sortir. La chute a été d'abord progressive, puis brutale puisque, au début du mois de mai 2022, il a glissé au 247e rang. Retour à la case départ en somme. Pas évident, à 28 printemps. C'est dire si, pour lui, cette victoire à Roland-Garros a valeur de bouffée d'oxygène. "Il y a trois semaines, je ne m'imaginais pas du tout ici. Je suis surpris d'en arriver là aujourd'hui", a-t-il avoué dimanche après avoir franchi le cap du 1er tour.

Série noire

Sur les courts comme en dehors, le Français a vécu une période très compliquée au carrefour des années 2021 et 2022. "Je me suis fait désosser ma voiture dans le parking à Boulogne, dit-il en rigolant, même s'il n'a pas franchement savouré sur le moment. Il n'y a pas eu que ça depuis le début de saison. J'ai eu le Covid à Noël, donc j'étais positif 15 jours. L’Australian Open me disait : 'Tu peux prendre l'avion', mais la compagnie me disait non. Finalement, au bout de 15 jours, j'ai pu partir. Je suis arrivé là-bas, moi en plus qui ai besoin d'être très entraîné, sinon je ne suis pas un monstre physique de base, j'ai fait quatre jours d'entraînement sur place. J'étais un loukoum. C'était vraiment dur."
A Melbourne, Barrère a disparu dès le premier tour des qualifications. Puis, de retour sur le circuit challengers en Europe, malgré une finale à Quimper fin janvier, il a enchaîné les mauvais résultats, jusqu'à cet enchaînement de quatre défaites en mars-avril. A Saint-Brieuc, fin mars, son entraîneur Marc Gicquel avait tiré une première fois le signal d'alarme. "Je ne vais pas aller le voir dans le vestiaire parce que je vais lui rentrer dedans, avait confié ce dernier à Ouest France. On ne l'a pas senti investi sur le terrain."
Quinze jours plus tard, la nouvelle raclée prise d'entrée à Split contre Christopher O'Connell a fait déborder le vase. Cette fois, il y a eu explication de texte. Marc Gicquel lui a fait une ordonnance, et une sévère. "C'est clair qu'il y a toujours des conversations dans une carrière qui sont importantes, explique le joueur. Celle-ci en fait partie. J'étais un peu perdu. Je ne m'entraînais pas bien. Je faisais les choses, mais les intentions n'étaient pas là à l'entraînement. Et mon coach m'a bien défoncé à ce moment, comme il sait bien me le faire de temps en temps. C'est très rare, donc je sais que quand il le fait, c'est que cela ne va pas du tout."
Un électrochoc. Grégoire Barrère a pris conscience qu'il ne pouvait plus continuer sur les mêmes bases. L'effet a été radical. Il poursuit : "Si je continuais dans ce sens-là, ça n'allait pas le faire du tout. Le lendemain, on est reparti à l'entraînement. Je ne vous cache pas que le niveau n'était vraiment pas terrible, mais au moins, j'essayais. Je me suis entraîné longtemps ces derniers temps. Je suis très content que cela paye rapidement. Si j'en suis là aujourd'hui, ça part de cette conversation, où il a su me rentrer dedans et trouver les mots pour que cela fasse 'tic' dans ma tête. Honnêtement, on ne pensait pas que cela paierait aussi rapidement. On s'était dit : on va essayer d'avoir un niveau convenable pour les qualifications de Roland."
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Grégoire Barrère à Roland-Garros en 2022.

Crédit: Imago

Le hold-up d'Aix

Mais il n'a finalement pas eu besoin de passer par le cap si casse-gueule des qualifications, puisqu'il a eu la très bonne idée de sortir sa meilleure semaine de l'année au début du mois de mai à Aix-en-Provence, chez Arnaud Clément. Une finale, perdue contre Benjamin Bonzi, mais elle lui a permis d'accrocher une invitation pour le grand tableau porte d'Auteuil, grâce à des victoires contre Jo-Wilfried Tsonga, Juan Pablo Varillas (oui, celui qui a sévèrement enquiquiné Félix Auger-Aliassime sur le Chatrier), Quentin Halys et Pavel Kotov.
Ce fut son sésame pour le court 14 et sa folle ambiance en mode Coupe Davis, que Barrère a tant apprécié dimanche. "C'est vraiment un court sympa à jouer, admet-il. Quand tu entends le public qui chante la Marseillaise, qui scande ton nom, ça aide, tu as un peu le frisson." Split semble loin. Heureusement. Même si le Français reste lucide. "C'est un peu un hold-up, rappelle-t-il. A Aix, je gagne contre Jo alors qu'il sert pour le match. Donc oui, il y a trois semaines, je ne me voyais pas du tout ici."
Mercredi, il jouera contre John Isner pour une place en 16es de finale de Roland-Garros. Ce serait une grande première pour lui. Il a franchi déjà à cinq reprises le premier tour en Grand Chelem, mais jamais le deuxième. Vu d'où il revient, cela aurait un petit côté invraisemblable. Mais l'essentiel tient à ce fil conducteur retrouvé depuis le coup de gueule de Split. "Je suis très relâché, assure Barrère. Je prends les choses comme elles viennent. Je ne me prends pas du tout la tête. Je joue libéré. C'est plutôt cool. Je rejoue bien à l'entraînement. C'était un peu compliqué en début de saison, mais finalement, mon niveau réaugmente, surtout mon niveau moyen. J'espère que cela va payer pour les mois à venir." Ça paie déjà ici.
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