Mahut "sous le choc"

"J'ai cru à une plaisanterie." Nicolas Mahut n'en revient pas, comme la plupart des observateurs. Son match épique face à John Isner, qui ne sera (a priori) plus jamais égalé en terme de records, va connaître un remake au même endroit et au même tour, un an après. Un hasard estimé entre 0,01% et 0,8% de chance, selon différentes probabilités savantes évoquées par divers spécialistes en mathématiques. Un clin d'oeil incroyable du destin qui lie un peu plus au All-England Club le Français et l'Américain qui ne se sont affrontés que sur gazon (Queen's 2008 et Wimbledon 2010) et ne sont plus croisés sur un court depuis.

C'est surtout un véritable "choc" pour le Français qui présentait encore il y a peu un livre-témoignage sur ce match en marge du dernier Roland-Garros*. "C'est l'intendant des vestiairesqui me l'a annoncé alors que je me préparais à aller à l'entraînement. J'ai dû regarder le tableau moi-même pour vérifier que c'était vrai.J'ai pris le temps, cinq minutes, pour me rendre compte de tout ce qui allait se passer pendant les trois prochains jours, du fait qu'on allait beaucoup en parler..." Il faut dire que la probabilité de revoir ce même match dès le 1er tour était déjà très faible, mais qu'en plus ce soit cette rencontre-là est un fait qui rend un peu plus magique cette affiche, terminée l'an passé au bout de trois jours de compétition, 11h05 de jeu et 70-68 au dernier set sur la victoire de John Isner, après avoir battu records sur records.

Cela faisait en tout cas dix ans que ce hasard ne s'était plus constaté à Londres : la dernière fois était un match entre Arvind Parmar et Andre Sa, qui s'est soldé à deux reprises sur un match en cinq sets et une victoire du premier sur le second... La nouvelle rencontre Mahut-Isner aura-t-elle la même saveur que la première ? Il y a toutes les chances que non... Si Nicolas Mahut et John Isner sont liés à vie à Wimbledon, les organisateurs du prestigieux tournoi du Grand Chelem leur rendront-ils hommage en les faisant jouer sur le court central ? Encore une fois, ce n'est pas sûr. "J'en serais assez surpris. Pour moi,le central est un court mythique, un rêve d'enfant. Ce jour-là, il y aura aussi Federer et Djokovic au programme. Il y a la possibilité de jouer sur le nouveau court N.2, qui sera inauguré cette année, ou évidemment de nouveau sur le N.18."

"Le 18, c'est notre terrain, peut-être que pour le clin d'oeil ils nous programmeront là." D'autant que maintenant, ce court où s'est déroulé ce match en 2010 porte maintenant une plaque "Isner-Mahut, the longest match". "Le danger de nous remettre sur le N.18, ce serait qu'on pense au match de l'an passé en jouant celui de cette année...", estime un Mahut qui n'a rien oublié de ce grand moment. "Tout ça est encore très frais dans ma tête tellement c'est ancré en moi. A la fin du match, c'était la fin du monde. Pendant deux jours et demi, j'ai vécu avec ce besoin profond de gagner. C'était même devenu un devoir pour moi. On n'envisage pas une seconde la défaite. J'ai pris ça comme une gifle, un seau d'eau glacé quand on est en train de dormir."

Le rêve (ou le cauchemar, c'est selon) reprendra donc mardi prochain sur un court encore à déterminer. Avec, encore une fois, la très grande volonté de passer un tour à Londres. Placés dans le même quart de tableau que Roger Federer, Isner comme Mahut viseront une place au 2e tour face au vainqueur du match Almagro-Nieminen. "Nous avons tous les deux des ambitions dans ce tournoi. Il y aura forcément un déçu à l'arrivée.J'arrive en meilleure forme que l'an dernier, plus fort. J'étais 140e, aujourd'hui je suis 100e. (...) Pour le moment, mes entraîneurs m'ont laissé digérer cette annonce. On a encore du temps. J'ai relu des notes que j'avais prises sur le match. C'est un match particulier, mais c'est quand même un premier tour."