Tour de France 2012: Bradley Wiggins s'est senti "poignardé "dans le dos par Chris Froome

C'était le 12 juillet 2012, lors de la 11e étape du Tour de France. Alors que Pierre Rolland filait vers un succès d'étape de prestige sur les pentes de La Toussuire, l'équipe Sky offrait un psychodrame en mondiovision avec l'attaque de Chris Froome sur son leader et maillot jaune, Bradley Wiggins. L'image était restée comme l'instant fort de ce Tour 2012 par ailleurs assez soporifique. Après un coup de semonce dans l'oreillette, Froome s'était calmé, Wiggins était revenu et tout était rentré dans l'ordre. Fin de l'histoire, nous avait-t-on alors assuré chez Sky. Mais on apprend aujourd'hui par l'intermédiaire d'un des acteurs indirects de la scène, que l'affaire avait failli se terminer tout autrement.

A l'époque, pourtant, les médias avaient été accusés de monter cette scène en épingle. Non, il n'y avait aucun problème, juste une incompréhension, et tout allait bien entre les deux coéquipiers et compatriotes. Sauf qu'on n'avait rarement vu un maillot jaune se faire secouer de la sorte par son propre lieutenant, qui allait également être son dauphin à Paris et son successeur au palmarès. Sean Yates était alors directeur sportif de la formation Sky, qu'il a quittée depuis. Jeudi, il publie son autobiographie ("It's all about the bike") dans laquelle il narre cet épisode. Selon lui, alors que le staff s'efforçait de minimiser l'incident, Wiggins est bien passé à deux doigts de claquer la porte.

Les deux hommes avaient passé un accord: Froome ne devait pas attaquer avant les 500 derniers mètres. "Il n'y avait absolument aucune ambiguïté à ce sujet, assure Yates dans son livre. Là, il pourrait jouer sa carte pour la deuxième place contre Nibali et Evans sans menacer directement la position de Bradley (…) Bradley ne comprenait pas pourquoi il était revenu sur cet accord, alors que tout se passait si bien". Problème, Froome a accéléré à… quatre kilomètres du sommet. "Pendant un instant, je n'ai pas réussi à y croire, poursuit l'ancien directeur sportif, présent dans une des voitures Sky ce jour-là. Brad était à la limite le kilomètre précédent. J'ai été tout de suite très clair dans la radio. Je lui ai rappelé que ce n'était pas le plan et qu'il devait attendre. Ce qu'il a fait." Mais le mal était fait, dès lors.

Sean Yates raconte que Wiggins a eu l'impression d'être "poignardé dans le dos" par Froome. Devant le manque de fermeté de David Braislford, le patron de l'équipe, suite à cette passe d'armes inattendue, Wiggins envoie alors un SMS à Yates. "Je crois qu’il serait préférable pour tout le monde que je rentre chez moi", lui écrit-il. Aussitôt, Yates file dans la chambre de Wiggo. "Il était terriblement déçu, il ne comprenait pas", dit-il encore. Il faudra finalement une longue discussion entre Wiggins, Yates, et Brailsford, pour que le maillot jaune ne reparte pas directement en Angleterre. 10 jours plus tard, Wiggins devenait le premier Britannique à remporter le Tour de France. Après une guerre des nerfs larvée qui a laissé des traces entre les deux hommes.