L'OM descend le bilan de Pape Diouf par pub interposée

C'est probablement sans précédent. Pour contester le procédé et le fond d'un livre écrit par un de ses anciens dirigeants, un club de football s'offre une pleine page de publicité dans un quotidien national pour démonter son argumentaire. Ce club, c'est l'OM. Ce livre, c'est celui de Pape Diouf ("C'est bien plus qu'un jeu"). Le quotidien, c'est L'Equipe, dont le "publi-communiqué" publié en page 18 ce dimanche fera date. Intitulé "L'Olympique de Marseille présente Pape Diouf : l"amour du jeu", serti d'une photo de l'ancien président, ce long article n'est pas signé, mais il porte la marque de fabrique de Vincent Labrune, président du conseil de surveillance à l'époque du départ de Diouf, en 2009, et rival bien compris des intrigues de couloir à la Commanderie. Labrune, aujourd'hui président, avait été assez expéditif sur sa rivalité avec Diouf dans son entretien de la veille. La deuxième cartouche n'allait pas tarder à arriver.

Sur le fond, c'est un texte qui se veut caustique et propose une lecture très subjective du livre paru cette semaine sous la signature de Diouf. "La vie est elle possible à l'Olympique de Marseille sans Pape Diouf?" interroge l'auteur "mystère" en ouverture. "La réponse est évidemment non si l'on en croit le roman le plus drôle jamais écrit sur le sujet. L'autofiction que nous offre son auteur est bien en passe de devenir un ouvrage de référence pour les amateurs de psychanalyse." Le texte est truffé d'une ironie cinglante qui porte en elle la marque de la vengeance : "Bien sûr, une autobiographie se rédige à la première personne. Mais à ce niveau-là d'amour du 'je', on ne peut s'empêcher d'être inquiet pour le héros. Résumé rapide pour ceux qui n'auront pas le courage de s'attaquer à cette savoureuse fable marseillaise : le jeune Pape, surmontant les préjugés, devient journaliste et gardien de la morale provençale..." Etc... Deux colonnes sur le même registre.

L'exercice cesserait cependant d'avoir tout intérêt s'il n'était pas, sur le fond, porteur d'éléments dans la bataille des arguments que se livrent les deux hommes depuis quatre ans. Le coeur du message adressé par l'OM à Diouf se trouve dans les dernières phrases de la page : "A la lecture de ce livre extrêmement partial, l'OM tient à rappeler à son auteur que, quelle que soit sa fonction, un employé du club se doit de respecter le carnet de route fixé par le propriétaire. Une fois ce principe de base énoncé, tout le reste n'est que littérature." Un passage qui indique que pareille entreprise n'aurait pas été possible sans la validation de Margarita Louis-Dreyfus, veuve de Robert Louis-Dreyfus, qui avait personnellement congédié Diouf depuis son domicile suisse.

L'OM va jusqu'à donner le salaire de Diouf à l'époque pour amortir l'idée que l'ancien journaliste et agent avait fait don de sa personne pour le club : 1 million d'euros annuel pendant cinq ans, primes comprises. Et il épingle son bilan sur deux points cruciaux. D'abord, la non-maîtrise de la masse salariale : "+140% en l'espace de 60 mois", écrit l'OM : "de 24,3 millions à son arrivée à 58,3 millions à son départ". Puis son incapacité à conserver Eric Gerets. "Le club tient à la disposition de toute personne intéressée le PV du conseil de surveillance de mars 2009 demandant à monsieur Diouf de prolonger au plus vite le contrat de son entraîneur." A Marseille et en dehors, la légende de cette non-prolongation est connue : Diouf ne se serait pas précipité parce qu'il trouvait que Gerets lui faisait de l'ombre. Le président du conseil de surveillance de l'époque : un certain Vincent Labrune. A part ça, le départ de Pape Diouf avait été assorti d'une clause de confidentialité réciproque. A durée déterminée, certainement.