Ligue 1 (17e journée) : A Rennes, quand Ntep attire la lumière, Pajot grandit dans l'ombre

Ce n'est pas le joueur dont le nom revient le plus souvent dans la bouche des commentateurs. Et pourtant, à 24 ans, Vincent Pajot est un titulaire tout aussi indiscutable qu'Abdoulaye Doucouré ou Paul-Georges Ntep dans une équipe de Rennes invaincue depuis huit rencontres. Avec la muraille Gelson Fernandes et le percutant Doucouré, Pajot a la délicate tâche d'assurer l'équilibre du milieu de terrain à trois de Rennes qui impose sa loi depuis quelques semaines à tous ses adversaires. Il le fait parfaitement, dans un relatif anonymat qui ne le dérange nullement. "Être dans l'ombre, ça me va très bien, assure-t-il. Je suis content de voir Abdoulaye briller, c'est aussi un peu grâce à moi et Gelson qui faisons le boulot derrière pour le mettre dans les meilleures conditions".

Car les rôles sont clairement définis entre les trois joueurs. "Gelson est plus défensif que moi (et) on laisse énormément de liberté à Abdoulaye, a-t-il expliqué. Il a cette faculté à aller de l'avant. On doit parfois lui rappeler de défendre mais il a le coffre pour. Le tout, c'est de garder un équilibre". Et garder l'équilibre, c'est justement son boulot. Combler les brèches quand il y en a, lancer le pressing, apporter le surnombre sur la droite en attaque, Vincent Pajot se multiplie aux quatre coins du terrain sans se disperser - un reproche que Frédéric Antonetti, l'entraîneur précédent de Rennes, lui adressait parfois. "J'ai gagné en maturité, avance Pajot. Je suis un peu moins 'foufou'".

Détecté sur le tard par Rennes, à 17 ans, alors qu'il évoluait à Saint-Leu, Vincent Pajot a connu une maturation plus lente que d'autre jeunes qu'il a côtoyé au centre de formation des rouge et noir, comme Yann M'Vila. En 2010, à 20 ans, il n'était encore "que" capitaine de la réserve rennaise en CFA, malgré ses premières sélections internationales espoir. A l'âge où tant de joueurs ne pensent déjà qu'à monnayer leur talent à l'étranger, il accepte d'être prêté en Ligue 2, à l'US Boulogne. "Cela s'est fait d'un commun accord, avait-il raconté à l'époque. J'avais fait deux ans en CFA, où je me suis aguerri, mais je savais que ce serait difficile d'intégrer le groupe professionnel cette saison. J'ai discuté avec M. Dréossi (alors directeur sportif), il m'a dit qu'il y avait la possibilité d'être prêté".

Il y disputera 44 matches en une saison et à son retour à Rennes, il obtient sa chance en équipe première, jouant 28 matches en 2011/2012 et 33 en 2012/2013. Une pubalgie gâche sa saison 2013/2014. Une période qui lui fait comprendre les exigences du haut-niveau. "Quand on est jeune, on n'a pas forcément de blessures, avait-il expliqué en début de saison. Moi ça m'est arrivé et ça m'a remis un petit peu en question. J'ai eu beaucoup de temps pour réfléchir vu que j'ai passé pas mal de temps en soins. Et en discutant avec certaines personnes, j'ai compris qu'il fallait que je change certaines choses dans mon quotidien. Moi j'ai longtemps vécu seul donc c'est difficile de se faire à manger. Maintenant j'ai ma copine qui vit avec moi donc l'alimentation est différente".

Toujours du fait de sa blessure, il a aussi repris plus tôt que ses coéquipiers pour travailler physiquement. Un investissement qui paye aujourd'hui ses fruits, même s'il dit avoir "encore beaucoup à prouver". Son ascension ne passe cependant plus inaperçue, et Pajot a attiré l'attention de plusieurs clubs après avoir enchaîné les bonnes performances. En fin de contrat à la fin de la saison, il aura le luxe de choisir où il pourra poursuivre sa progression. A Rennes, qui tenterait de prolonger son bail, ou ailleurs.