"Pas assez d'appui"

Le dernier double échec de Ferrari en Q2 remontait au Grand Prix de Malaisie 2010. Ce jour là, la Scuderia avait attendu, attendu, avant d'envoyer Fernando Alonso et Felipe Massa en piste, au moment d'une averse. Le stratège australien Chris Dyer avait été jugé responsable de ce fiasco et mis au placard. Faut-il s'attendre à un vaste coup de balai dans l'organigramme des Rouges après le retentissant bide australien ? Car la qualification de la 1re manche du Mondial n'a pas juste été gâchée par un contretemps. C'est bien plus grave : c'est matériel.

Samedi matin, la F2012 n'a définitivement pu masquer à Melbourne sa fébrilité hivernale au point d'avouer d'incroyables faiblesses. "Nous avons dû passer les tendres en Q1, et c'est n'est normalement pas une bonne nouvelle", a résumé le pilote espagnol. Un top team passe sans difficulté le cut en Q1 en chaussant le second choix de pneus, des "medium" en l'occurrence. Là, il les fallait de suite, comme une écurie de milieu de tableau... "Effectivement, notre voiture n'est pas superbe en ce moment. Nous savions que nous n'étions à 100%", a repris le champion du monde 2005 et 2006. Un sacré euphémisme.

Une demi-heure plus tôt, environ, l'Ibère avait laissé sa machine dans les graviers. De fort mauvaise humeur. Jusqu'à un mauvais geste envers un commissaire de piste. "C'est arrivé comme ça : j'ai un peu mordu l'herbe au freinage, la voiture est sortie. Je suis parvenu à maintenir le moteur en marche et j'espérais que les marshals seraient capables de me pousser et me remettre en piste", a-t-il expliqué. Sauf que le règlement l'interdit. "Je venais de faire mon chrono (le 5e à cet instant) en pneus "tendre" usés et, avec des neufs, j'aurais pu aller en Q3, mais je n'aurais pas pu me battre pour une place devant", a-t-il ajouté. C'est un fait, Force India, Williams et Toro Rosso ont réussi à hisser une auto en Q3, mais vu les difficultés historiques de la F2012, il était tout sauf certain que l'objectif soit atteint, comme le suggère la 16e place de Felipe Massa.

Concrètement, où est le mal ? "Nous n'avons pas assez d'appui aérodynamique et de vitesse de pointe", inventorie l'as d'Oviedo. Sa perplexité est palpable lorsqu'il ajoute : "Nous avons beaucoup bossé en soufflerie après notre année difficile (en 2011)…" Mais, en éternel optimiste, il se risque alors à cette comparaison : "L'an dernier ici, nous étions à 1.4 seconde, là nous sommes à une seconde en Q1…"Nous espérons passer au départ quelques concurrents sur les lignes devant, et nous battre avec eux". Il devra composer avec le rugueux Pastor Maldonado et les débutants ou assimilés Jean-Eric Vergne et Daniel Ricciardo… Il parle d'un pilotage dominical "défensif" et d'une perspective pas plus réjouissant la semaine suivante en Malaisie, où il aura "la même voiture…"

"C'est vrai que notre but de début d'année était de nous battre devant… Il n'y a pas lieu d'être en colère, ça ne servira à rien", prévient-il, lâchant se mot d'ordre : "Il faut que nous soyons plus unis que jamais." Le directeur Stefano Domenicali, qui pourrait être rapidement dans le collimateur du président Luca di Montezemolo, a abondé : "Nos fans sont déçus mais je les exhorte à être prudents avant de tirer toute conclusion définitive."