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Julia Simon : "J’arrive à mettre un peu plus les mots sur mes sentiments"

Julien Chesnais

Mis à jour 25/01/2022 à 18:42 GMT+1

JEUX OLYMPIQUES - A deux semaines des JO de Pékin, Julia Simon est revenue pour nous sur son début de saison à deux visages, "très mauvais" dans un premier temps puis assez étincelant depuis l’étape du Grand-Bornand (4 podiums en 9 courses). Elle évoque aussi son travail sur la préparation mentale, qu’elle mène depuis quelques mois avec Marie-Laure Brunet. Entretien.

Julia Simon

Crédit: Getty Images

Difficile de faire plus contrasté que votre début d’hiver. Après cinq courses, vous n’aviez pas fait mieux que 25e. Puis tout a changé au Grand-Bornand. Depuis, vous avez signé quatre deuxièmes places en neuf courses, la dernière vendredi sur l’individuel d’Antholz derrière Justine Braisaz-Bouchet. Comment expliquez-vous ce grand écart, cette saison à deux visages ?
Julia Simon : Cela va faire deux ans qu’on travaille avec "Paulo" Giachino (l’entraîneur des Bleues pour le tir, ndlr). On avait décidé de repartir de zéro, de refaire du vrai du tir de biathlète pour ne plus que j’ai ces tirs très engagés qui ne passent qu’une fois sur deux. On savait que ça allait être long à mettre en place. Il y a eu des hauts et des bas l’an dernier (deux victoires en mass-start). Et avant le début de la saison, j’ai senti pas mal de progrès. Mais il fallait vraiment prendre le temps de retranscrire le tir d’entrainement sur la course. J’ai eu du mal. Car le tir d’entrainement et le tir de course, ce sont vraiment deux choses différentes. Il a fallu quelques courses pour comprendre les choses et les appliquer ensuite. Et ça m’a fait un très mauvais début de saison. Mais maintenant, j’ai l’impression d’avoir passé un cap, que les choses sont bien plus posées, bien plus propres.
Quel était votre état d’esprit avant l’individuel d’ouverture à Ostersund (72e, 6 fautes) ?
J. S. : Ça allait bien physiquement. J’avais un dossard sur le dos, donc c’était pour faire le meilleur résultat possible… Cela a été assez difficile à encaisser. Et les mauvaises courses se sont enchaînées. Il y a eu pas mal de remise en question, de doutes et d’incompréhension aussi : pourquoi avais-je fait autant de progrès durant l’été sans finalement parvenir à les retranscrire en course ? Il faut accepter d’avoir besoin de temps.
Au-delà du temps, avez-vous procédé à des ajustements qui expliqueraient votre spectaculaire redressement ?
J. S. : Je n’ai rien changé. J’ai vraiment fait confiance à Paulo. Il me disait qu’il n'y avait pas de raison que ça ne marche pas. Que le tir à l'entraînement était très bon. Qu’il fallait que je reste sur la même dynamique à l'entraînement. C’est dès que j’arrivais en compétition que cela coinçait, avec l'essoufflement, surtout sur mes tirs couchés. Je n’ai rien fait de spécial. Il y a eu juste un petit déclic.
Et quand s’est-il produit, ce déclic ?
J. S. : Au Grand-Bornand clairement (13e du sprint, 2e de la poursuite et de la mass-start). C’était dur d’avoir complètement foiré mon week-end à Hochfilzen. Je ne m’étais pas qualifiée pour la poursuite (66e du sprint, 5 fautes dont 4 au couché, ndlr). Et voir les filles derrière mon écran, c’était vraiment dur dans la tête. Le déclic s’est fait entre Hochfilzen et le Grand-Bornand, ça c’est sûr.
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Simon : "On a démoli ma manière de tirer pour reconstruire"

Comment gérez-vous l’aspect mental de la performance ?
J. S. : Je suis accompagnée par Marie-Laure Brunet. Elle s’occupe notamment du tir, pour essayer de me procurer du calme et de la sérénité derrière la carabine. C’est vrai que c’est encourageant, ça se passe bien. J’arrive à mettre un peu plus les mots sur mes sentiments, mes ressentis. C’est intéressant de travailler sur cet axe-là.
Depuis quand travaillez-vous avec elle ?
J. S. : Depuis mai dernier. Elle est là pour l'accompagner, pour m’aider à mettre des mots, à mieux comprendre. Mais c’est à moi de faire la démarche. Elle ne me dit pas "faut faire ci, faut faire ça". Ça part de moi.
L’été dernier, vous disiez vous sentir trop crispée derrière la carabine. Faire appel à Marie-Laure Brunet, c’était une manière d’y remédier ?
J. S. : Oui exactement, pour réussir à être plus sereine. Je commençais à en avoir marre de faire une 60e place, d’enchainer avec une bonne course puis de finir à nouveau 60e. Je sentais que c’était le moment d'être un peu plus entourée, d’être accompagnée par quelqu'un qui connaît ce sport-là, qui l’a vécu (Brunet a notamment été médaillée de bronze de la poursuite aux JO de Vancouver, en 2010, ndlr). Je pense que c’est quand même important d’être comprise. Ça m'a paru assez facile, comme choix. Et je suis bien contente d’avoir travaillé dans cette voie.
Cette régularité tant convoitée, vous la trouvez enfin. Si la saison avait débuté au Grand-Bornand, vous seriez à la bagarre pour le gros globe avec Marte Olsbu Roieseland et Elvira Oeberg.
J. S. : Ouai, peut-être, mais le général n’est pas du tout un objectif, surtout que mon début de saison a été très mauvais. Donc on ne va pas tout changer. On peut tout refaire avec des si. Mais j’ai enfin trouvé cette régularité. Le but est de travailler le plus possible, de continuer à faire des tirs avec la manière que je veux mettre en place. Et je sais que physiquement ça tient. Même quand je me sens moins bien, ça reste très correct. Donc il faut vraiment réussir à passer ces tirs.
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Julia Simon lors du sprint de Hochfilzen, en décembre 2021.

Crédit: Getty Images

Est-ce que le fait d’avoir été distancée d’entrée au général vous a libéré d’un poids et expliquerait en partie votre réussite actuelle ?
J. S. : Pas du tout. Car le fait d’être très loin m’a sorti complètement de la course pour être sélectionnée sur une mass-start. Je n’avais plus d’autre choix que de "perfer" au Grand-Bornand pour espérer prendre le départ. Donc au bout d’un moment, ça a ajouté un peu d’inquiétude. Ma famille était là pour voir la course, mes amis aussi. Donc c’était important pour moi de pouvoir courir la mass-start ! Et en plus, c’est une course que j’aime bien. Même si je n’ai pas l’objectif de gagner un gros globe ou autre, ça fait quand même mal à la tête de finir 40e, derrière des filles que je devance habituellement.
Quels étaient alors les objectifs fixés en début de saison ?
J. S. : C’était tout simple. Les Jeux Olympiques ! Il n’y a pas de surprise là-dessus. Je voulais aussi remonter sur des podiums. Et là, c’est chose faite avec ses quatre deuxièmes places (qui plus est sur quatre formats différents : poursuite, mass-start (Grand-Bornand), sprint (Oberhof) et individuel (Antholz), ndlr). C’est un premier contrat rempli. J’espère maintenant performer aux Jeux Olympiques.
Vous étiez remplaçante pour vos premiers JO à Pyeongchang. Quels souvenirs en gardez-vous ?
J. S. : C’étaient des beaux moments. J’ai pu vraiment profiter de la cérémonie d’ouverture, à regarder les autres sur la piste en biathlon. J’ai pu également passer pas mal de temps à regarder le ski de fond, car j’adore ça. Mais c’était quand même assez long d’être remplaçante pendant 15 jours. On a envie de mettre le dossard. Mais ce sont des bons souvenirs, j’en ai profité à 100%.
Vous serez titulaire cette fois. Cela serait quoi, des JO réussis ?
J. S. : Avoir une médaille individuelle et une médaille en relais, ça serait vraiment très beau. Après, il faut vraiment prendre les courses les unes après les autres. Sur le sprint, si j’arrive à faire un 10/10 et que je ne fais pas de médaille, je serais tombé sur meilleure que moi. Il faut que je puisse faire mon meilleur biathlon. C’est surtout ça le plus important.
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Julia Simon en action au Grand-Bornand

Crédit: Getty Images

Que connaissez-vous de la piste olympique pour l’instant, hormis qu’elle est située en altitude (1 650m) ?
Pas grand chose ! A part que ce sera effectivement en altitude, qu’il va faire froid et qu’il s’agira de neige artificielle. On verra quand on arrivera sur le site. On prend l’avion dimanche, après quelques jours passés à la maison.
Pour avoir grandi à la montagne, l’altitude ne doit pas vraiment vous effrayer.
J. S. : Non, ça ne me fait pas spécialement peur. Mais je ne me suis jamais trop posée la question. On est à 1 600m à Antholz, ça se passe bien (l’interview a eu lieu samedi, à la veille de la mass-start dont elle a pris la 10e place, ndlr). C’est une question d'adaptation, il faut penser à bien respirer, etc. J’ai grandi à Villard-sur-Doron, un village à 700m d’altitude, à 20 minutes des Saisies. Chaque été, j’allais vivre en alpage avec mes parents qui sont agriculteurs, à 1 700m.
Les Saisies font partie de l’histoire olympique. Les épreuves nordiques des Jeux d’Albertville s’y sont déroulées. Vous n’étiez évidemment pas née, mais cela a dû marquer des membres de votre famille, vos parents peut-être ?
J. S. : Oui, j’en ai entendu pas mal parler. Mon père, qui est pisteur-secouriste l’hiver, était allé voir les épreuves. C’était une autre époque, mais on m’a raconté que les fêtes étaient très belles les soirs de course, que l’ambiance était super dans la station. Les Saisies ont eu la chance d’accueillir les JO en 1992. Donc ça fait un peu rêver.
Cela a dû nourrir votre ambition olympique ?
Je ne sais pas trop vraiment comment c’est venu. Mais oui peut-être !
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