Liga : En dehors du terrain, le Barça doit réparer les dégâts

Mis à jour 09/01/2015 à 00:49 GMT+1

Josep Maria Bartomeu - Luis Enrique - Lionel Messi : Les trois noms qui cristallisent actuellement la crise à Barcelone. Les trois composantes d'une institution en train de se liquéfier. Mais comment a-t-elle pu en arriver là ? Et, surtout, comment peut-elle relever la tête ?

Luis Enrique, l'entraîneur du FC Barcelone

Crédit: AFP

Le FC Barcelone est au bord du précipice. Autant le dire tout de suite, la présidence du Barça ne tient plus qu'à un fil. Josep Maria Bartomeu - successeur de Sandro Rosell - ne fait plus qu'éteindre des feux continus depuis des mois. Mercredi, il a tenté de sauver ce qui peut l'être - son honneur notamment - en provoquant des élections anticipées en juin. Elections qu'il perdra probablement. On y reviendra en temps voulu. L'interdiction de recruter l'an prochain (en raison de transferts abusifs de mineurs) et le gaspillage opéré cet été sur le marché des transferts est le gros point noir. Avec la relation Luis Enrique-Messi.

Ce n'est pas tellement l'image du Barça qui est en jeu. Le Barça restera toujours le Barça. L'un des cinq plus grands clubs du monde. Mais l'argent investi - censé supporter le poids d'une année sans recruter - a été dilapidé. Et là, Bartomeu est montré du doigt. En laissant la complète refonte de l'effectif à Andoni Zubizarreta, le président s'est fourvoyé. Un seul transfert a été piloté par Bartomeu : celui de Luis Suarez. Acheté 80 millions, l'Uruguayen sera "l'héritage" laissé aux supporters. Pour le reste, Zubi est le grand responsable...

Josep Bartomeu, le président du Barça en janvier 2015

Crédit: AFP

Transferts

Décevant au Barça, Suarez est (déjà) annoncé de retour en Premier League

08/01/2015 à 12:59

Hormis Claudio Bravo (et à un degré moindre Marc André Ter Stegen), les recrues estivales ne sont pas indiscutables. On passe les tragi-comiques arrivées de Vermaelen (blessé pour plusieurs mois, aucun match cette saison) et du Brésilien Douglas (qui n'a visiblement pas le niveau). Zubi, homme de réseaux mais qui déteste s'asseoir devant un ordinateur pour disséquer les vidéos, paye son omnipotence, ainsi que sa faible propension à déléguer. Il n'a voulu faire confiance qu'en son jugement. Il en paye aujourd'hui le prix fort, avec une image troublée teintée d'incompétence. Quand le pouvoir vous monte à la tête...

Messi s'agace...

Le gros problème, c'est que l'équipe n'est pas au point et affecte directement son joueur le plus emblématique : Lionel Messi. La star argentine est plus qu'agacée par le niveau de ses partenaires. Messi a bien compris que sauf miracle, le Barça ne pouvait pas gagner de titres majeurs, ou en tout cas plus régner sur le football mondial. Les recrues n'apportent pas la plus value souhaitée. Luis Suarez peine à s'adapter au style culé. Des joueurs majeurs (Alvès, Iniesta, Xavi) prennent de l'âge. Et depuis le départ de Fabregas, Messi n'a plus tellement de complices dans le vestiaire. Piqué, Mascherano ou Alvès font partie de sa garde rapprochée. Mais Messi, comme Michael Jordan en son époque des Bulls, inspire le respect voire la crainte à ses partenaires. On lui obéit au doigt et à l'oeil. Il y a mieux pour la convivialité.

...et est devenu plus grand que l'institution

L'Argentin sait qu'il représente 80% du jeu du Barça. Il se rend compte qu'il peut faire la pluie et le beau temps au club. Son espièglerie sur Instagram n'a fait que confirmer ce que l'on pensait. Il est plus grand, actuellement, que l'institution Barça. C'est la (triste?) vérité.

Messi n'a également plus confiance en son président et son entourage, dont certains avaient mis des doutes sur la prolongation de contrat du joueur, prolongation finalement obtenue en mai dernier. Pour Messi, Bartomeu n'est que le prolongement de Sandro Rosell, avec qui le courant n'est jamais passé. Si rien n'est évidemment officiel, il est connu que Sandro Rosell aurait pu vendre Messi pour financer la rénovation du Camp Nou. D'autant qu'avec Neymar, il avait déjà une star planétaire dans son effectif...

Luis Enrique, le pire entraîneur

Quant à Luis Enrique, c'est une confrontation directe entre deux hommes dont il s'agit. Une confrontation que la défaite à San Sabastian a provoquée. La goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Messi n'est finalement que le porte-parole d'un groupe qui ne comprend pas l'ex de Vigo. Ancien joueur du club, "grande gueule" connue et auto leader proclamé, Luis Enrique n'aime pas les fortes têtes. Il veut diriger à sa manière, être le "guide". Sauf qu'il a plusieurs casseroles aux fesses pour assoir sa légitimité.

1. Son incapacité à trouver une formule gagnante. Les joueurs en ont assez de ne pas avoir de continuité dans les équipes proposées. Notamment en défense, là où se construisent les grandes équipes. Il n'y a pas de hiérarchie claire et les joueurs lui en veulent pour ça.

2. La présence de personnes de son staff, notamment le psychologue. Messi, dans les vestiaires d'Anoeta, s'en est d'ailleurs pris à lui alors qu'il tentait d'intervenir dans la discussion musclée (au sujet de sa non-titularisation) entre le joueur et le coach. Mais on pourrait également parler des doutes concernant le jeune entraîneur adjoint Roberto Moreno, 37 ans, qui tente de donner des ordres à des joueurs ayant tout gagné. Sans en avoir, une nouvelle fois, la légitimité. N'est pas José Mourinho (à l'époque adjoint de Sir Bobby Robson) qui veut...

Tout cela a fait dire à l'un des joueurs, sous couvert d'anonymat, que Luis Enrique "est le pire entraîneur que nous ayons eu" ("El Mundo Deportivo"). Ambiance...

Luis Enrique y Leo Messi (Barcelona)

Crédit: Imago

Comment réparer les dégats ?

La première des conséquences a résonné comme un coup de tonnerre, puisqu'il s'agit du renvoi d'Andoni Zubizaretta de son poste de directeur sportif. Un fusible, un parapluie, qui n'a absolument pas calmé la vindicte populaire. Qui en attend plus.

La deuxième, c'est la provocation d'élections anticipées en juin, officielle depuis mercredi.

La troisième tourne autour de Messi, évidemment. Que va-t-il se passer ? Sans être cynique, on peut s'interroger sur son futur et penser que le moment d'un départ - inenvisageable il y a peine quelques jours - est le moment "idéal" pour l'Argentin. A 27 ans, Messi veut encore tout gagner et dominer le football mondial. Aux niveaux individuel (le Ballon d'Or va lui passer sous le nez pour la deuxième année consécutive) et collectifs. A première vue, ça parait difficile de réussir ces deux défis actuellement.

Messi - Luis Enrique, un de trop...

Alors un départ ? Si beaucoup de choses vont encore se passer d'ici juin, les rumeurs vont bon train. Chelsea, évidemment, où joue son meilleur ami Cesc Fabregas. Leurs femmes sont aussi très proches. Les deux joueurs passent leurs vacances ensemble. C'est évidemment la piste numéro 1 à explorer, d'autant que Fabregas est persuadé du talent de coaching de José Mourinho. Quant à l'effectif, il est l'un des plus beaux d'Europe, sinon le plus beau. La firme Adidas, partenaire des Blues et de Messi, verrait évidemment d'un bon oeil la transaction...

A lire : Les 3 raisons pour lesquelles Messi n'ira pas à Chelsea… cet hiver

Si l'on se fie à l'histoire - et comme le rappelait justement Stoichkov il y a peu - toutes les stars étrangères sont sorties par la petite porte du Barça. Maradona, Eto'o, Ronaldinho, Ibrahimovic, Romario, Rivaldo... Messi n'y échappera peut-être pas.

Quid de Luis Enrique ? S'il ne renverse pas la situation sportive et ne regagne la confiance de son vestiaire, alors ce sera fini. Mais pour le remplacer par qui ? "El Mundo deportivo" pense que Jurgen Klopp ou Joachim Low seront approchés. Mais pas avant juin. D'autres médias avancent le nom de Franck De Boer, ancien joueur du club, et baigné dans la philosophie Cruyff à l'Ajax. Le nom de... Xavi Hernandez commence aussi à circuler. Un choix cornélien pour le milieu légendaire. Proche de Luis Enrique, il ne se voit pas lui faire un bébé dans le dos, même s'il a envie de coacher. Il a aussi rappelé récemment que personne ne le manipulerait. Bref, un beau sac de nœuds. Et une drôle de crise pour le FC Barcelone.