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COVID-19, contrats et marché des transferts : Ce que prévoit la FIFA pour déminer la situation

Philippe Auclair

Mis à jour 31/03/2020 à 18:04 GMT+2

A situation exceptionnelle, décisions exceptionnelles : la FIFA s'apprête à dévoiler son "plan de bataille" pour aider les clubs à surmonter cette période inédite. Comment gérer les fins de contrats ? Les fênetres des prochains marchés des transferts ? Voici, en exclusivité, les pistes de la fédération internationale.

Gianni Infantino

Crédit: Getty Images

La seule certitude est qu'il n'y en a désormais plus, que nous vivons sans savoir de quoi demain et après-demain seront faits. Le football n'allait certainement pas échapper à ce qui vaut pour tout le reste, la différence étant que le football, lui, comme les autres sports, est l'esclave de son calendrier.
Je ne parle pas ici seulement du calendrier des compétitions, déjà chamboulé par la force des choses, et qui le sera encore davantage lorsque les ligues et les instances regarderont un peu moins leurs livres de compte et un peu plus ce qui se passe en dehors. Je parle aussi du calendrier que doivent respecter clubs, joueurs et tous ceux et toutes celles qui sont impliqués dans le ballet des contrats, et qu'on ne peut pas bouleverser comme celui du championnat de ceci ou de la coupe de cela.

La délicate question des fins de contrat

Que faire, par exemple, si la fin de la saison est décalée jusqu'au mois de septembre, voire plus tard, alors que les accords passés entre joueurs (ou membres du staff technique) et clubs arrivent à terme le 30 juin, qui est la date statutaire de fin d'une "saison" dans la majorité écrasante des ligues qui sont aujourd'hui les plus affectées par le Covid-19 ? Un Willian, par exemple, dont le contrat avec Chelsea expirera ce 30 juin, deviendra-t-il un "agent libre" le 1er juillet, ou sera-t-il contraint de demeurer au-delà de son bail ?
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Willian

Crédit: Getty Images

Et si c'est le cas, avec quel salaire ? Et quid des joueurs actuellement prêtés, qui devaient revenir dans leur club d'origine à la fin de la saison ? Et qu'en est-il des accords de transfert déjà signés, qui devaient prendre effet le 1er juillet ? Et, évidemment, quid du marché des transferts lui-même ?
Le problème - qui s'ajoute aux autres problèmes, déjà plus que conséquents - est que le football n'a pas d'instance dont les réponses à ces questions aient force de loi. La FIFA ? Non. La FIFA, via son système TMS, supervise, enregistre et homologue transferts et contrats internationaux, et ambitionne d'élargir son champ d'action à tous les contrats et transferts, professionnels ou amateurs, dans un avenir proche. Elle peut intervenir quand elle constate des infractions à ses propres réglementations. Mais elle ne peut se substituer aux ligues et aux fédérations.
Cela n'a cependant pas empêché la fédération des fédérations de se pencher sur la question et d'initier ce 18 mars un travail de réflexion dont les premières conclusions ont fait l'objet d'un rapport confidentiel, destiné à sa propre task force, auquel j'ai pu avoir accès, qui donne une idée des mesures que la FIFA entend encourager...mais pas plus. Car c'est dans un véritable champ de mines juridique qu'elle s'aventure, et elle doit prendre le plus grand soin de ne pas faire un pas de travers. Sinon...

La FIFA n'a pas la main sur le calendrier

Tout d'abord, comme elle le reconnait d'emblée, la FIFA "n'est pas le corps constitué approprié pour dire aux associations-membres ou déterminer quand le football devrait recommencer [à se jouer] dans chaque pays ou territoire". Aux associations-membres de trancher en accord avec leurs services sanitaires, donc, pour décider quand la saison actuelle sera réactivée, si elle l'est, et quand débutera la nouvelle.
Cela dit, la pandémie est bien un "cas de force majeure", que le Conseil de la FIFA a le droit et même le devoir de considérer en vue de prendre des décisions concrètes. Ses statuts l'y autorisent. Certaines de ces décisions relèvent de son autorité directe, comme le calendrier des matches internationaux et de la mise à disposition des joueurs par leurs clubs au profit des équipes nationales. Dans ce cas précis, le rapport de la FIFA est on ne peut plus clair : les matches du mois d'avril, on oublie; quant à ceux qui devaient se disputer en juin et juillet, "il est probable qu'une décision similaire sera requise" de l'instance; et plus que probable, donc, que ces matches n'auront donc pas lieu.
Mais cela, c'est l'élément le plus facile à régler du dossier, celui sur lequel la FIFA peut statuer sans craindre de voir associations-membres, clubs, acteurs et actrices du football et leurs avocats se tourner contre elle. Pour la reste, la FIFA ne peut faire que des recommandations; mais des recommandations de poids, qui serviront au moins de points de référence, et ceux-ci sont lourds de conséquence.
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Matuidi, Candreva - Juventus-Inter - Serie A 2019/2020 - Getty Images

Crédit: Getty Images

Tout d'abord, la FIFA est d'avis que, "nonobstant la primauté de la loi du territoire sur les dates de début et de fin des contrats", le facteur le plus important dans la détermination du statut contractuel des joueurs et des techniciens lors de la reprise des championnats nationaux devait être "la véritable intention des parties" - en gras dans le rapport interne de l'instance. En clair ? Ce sur quoi les parties s'étaient mises d'accord lors de la signature du contrat doit demeurer valide jusqu'au terme de la saison... y compris si le terme de cette saison est repoussé, et qu'importe jusqu'à quand.
D'où les propositions de la FIFA, dans l'ordre :
  • Les contrats qui devaient parvenir à terme à la fin de cette saison 2019-20 courront jusqu'à la nouvelle date de fin de saison.
  • Les contrats qui devaient être activés au début de la saison 2020-21 - ce 1er juillet pour la plupart - ne le seront qu'à la nouvelle date du début de cette saison.
  • Si les saisons ou périodes d'homologation se chevauchent (un scénario des plus plausibles, qui affectera les transferts internationaux), et à moins d'accord de toutes les parties, la priorité sera donnée au premier club avec lequel le joueur était sous contrat, afin de protéger l'intégrité sportive des compétitions.
  • Enfin, et ce n'est pas la meilleure des nouvelles pour les clubs dits "vendeurs", l'échéance de tout paiement contractuellement dû pour un transfert déjà agréé sera repoussée à la nouvelle date de la reprise du championnat ou de l'ouverture du marché des transferts.

Joueurs et clubs encouragés à se mettre d'accord sur des réductions salariales

Qu'en est-il de ce marché des transferts, d'ailleurs ? Le protocole de la FIFA précise que ses dates ne peuvent être modifiées qu'en cas de "circonstances exceptionnelles", ce qui est clairement le cas. La FIFA a déjà ainsi permis à la Chine de prolonger son premier mercato de l'année au-delà de la date prévue pour les raisons que l'on sait. Il en sera de même pour l'Europe, conséquence logique de ces autres propositions, dans l'ordre :
  • Toutes les requêtes d'extension de la saison actuelle seront approuvées.
  • Toutes les requêtes d'extension des périodes de transferts déjà ouvertes (c'est le cas de la Norvège, de la Finlande, des USA, du Canada, du Brésil et du Japon par exemple) seront approuvées, à condition que leur durée totale n'excède pas les 16 semaines statutaires.
  • Toutes les demandes d'amendement ou de report des dates des "fenêtres des transferts" qui ne sont pas encore ouvertes seront approuvées.
  • Enfin, les associations-membres auront le droit d'amender les dates de leurs saisons et de leur propre marché des transferts après en avoir avisé la FIFA.
Les clubs auront aussi noté que la FIFA les encourage, ainsi que joueurs et techniciens, à collaborer pour se mettre d'accord sur le report ou la réduction des salaires par "un montant raisonnable" durant les périodes pendant lesquelles il ne leur sera pas possible de travailler - ce que la Juve ou le Barça ont déjà fait, par exemple.
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Cristiano Ronaldo avec la Juventus Turin

Crédit: Getty Images

Qu'a donc fait la FIFA ? Elle n'avait pas autorité pour trancher, le savait, et se devait aussi de demeurer des plus prudentes au vu des implications juridiques que ses propositions ne manqueront pas d'avoir si elles sont prises en compte. Elle a au moins fourni un cadre dans lequel ceux qui devront trancher, et vite - la Premier League dès ce 3 avril, sans doute - pourront agir en sachant à quoi s'attendre de l'instance suprême du football mondial.
Aux clubs, ligues et associations-membre de jouer, maintenant, et dès ce mercredi, quand les secrétaires généraux des 55 associations-membres de l'UEFA se réuniront à midi, heure de Nyon, pour considérer les propositions de la FIFA ainsi que le calendrier de la Ligue des Champions et de l'Europa League.
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