Evra prépare le terrain

Un mois et demi après le grand déballage annoncé et qui a fait pschitt, Patrice Evra est revenu à la charge, lundi matin dans les colonnes du Figaro. A froid, le latéral apporte quelques éléments nouveaux. De là à être plus convaincant… Le latéral gauche de Manchester United, capitaine des Bleus déféré devant la commission de discipline de la FFF, se montre circonspect quant au sort qui lui a été réservé avec Ribéry, Anelka, Abidal et Toulalan. "Je suis surpris, parce que j'avais l'impression que tout le monde voulait tourner la page du Mondial… Il faut penser au futur. Pourquoi nous sanctionner plus que d'autres ? On l'a déjà été. La sanction de ne pas sélectionner les 23 mondialistes pour le match en Norvège est cohérente. Elle montrait qu'il n'y avait pas cinq ou six meneurs, comme cela avait été écrit", tente de se défendre le gréviste de Knysna qui ne voit pas son avenir sans l'équipe de France. "C'est mon pays et j'y tiens. La Marseillaise me fait vibrer."

Si tout cela est vrai, pourquoi Knysna ? Pourquoi un tel comportement en Afrique du Sud ? "Dans notre bunker de Knysna, on vivait dans une bulle. On n'était plus dans la réalité. On a pris conscience de la fracture avec le public en recevant des appels de nos proches. Ce qui s'est passé en Afrique du Sud est vraiment grave. (...) Le Mondial a été un véritable cauchemar. On a oublié l'essentiel, plus parlé de problèmes quotidiens que de foot. Mais il n'y avait plus de dialogue avec le coach. Il n'y avait aucune structure collective, ni de projet. (...) On a fait tous les matchs de préparation avec un système avant d'en changer pour celui d'ouverture du Mondial contre l'Uruguay. Ce n'était pas cohérent."

Comme les autres cadres de l'équipe de France, Patrice Evra cible Raymond Domenech. "Les joueurs lui reprochaient son manque de travail tactique et le décalage avec les exercices auxquels ils sont habitués en club. J'ai essayé de faire passer le message à ses adjoints. Sans résultat. Le groupe l'a alors peu à peu lâché", explique-t-il. En filigrane, le Mancunien laisse entendre que ce désamour a entrainé les événements du 20 juin et la grève de l'entrainement. Sa version est d'ailleurs quelque peu différente de celle de ses partenaires ou de Raymond Domenech.

Durant la mi-temps de France - Mexique, "pendant dix minutes, le coach n'a pas parlé puis, d'un coup, il a dit à Anelka : "Putain, je te dis de rester en pointe mais tu décroches !" Nico lui a répondu. Il y a eu un échange de mots. Mais pas ceux retranscrits en une de L'Équipe. (...). Quant au boycott, "tout était prévu la veille". "Le coach sentait que quelque chose se tramait, reprend Evra. Un joueur venait de lui dire qu'il était dégoûté du football. L'attaché de presse devait transmettre le communiqué aux journalistes. Le coach a tenté de nous en dissuader. J'ai demandé alors plusieurs fois à mes coéquipiers s'ils voulaient descendre du bus. Personne n'a répondu. Domenech voulait qu'on lise le communiqué. Je me suis levé pour le faire. Je serais allé au feu pour mes partenaires. Mais Domenech a alors décidé de le lire lui-même…"

Enfin, Patrice Evra a tenu à répondre à Lilian Thuram, membre du conseil fédéral et qui souhaiterait son exclusion à vie des Bleus. "Ce n'est pas le rôle d'un membre du conseil fédéral. Il est temps que Lilian arrête de jouer un rôle qui n'est pas le sien en disant que les Bleus contribuent à faire augmenter le racisme. Il ne suffit pas de se balader avec des livres sur l'esclavage, des lunettes et un chapeau pour devenir Malcolm X…" Lilian Thuram n'est peut-être pas Malcolm X mais a déjà passé le premier tour d’une Coupe du monde.