Les plus populaires
Tous les sports
Voir tout

Liga, 38e journée - Atlético, Real : une semaine dans les médias espagnols avant le dénouement

Elias Baillif

Mis à jour 22/05/2021 à 11:08 GMT+2

LIGA - Le grand final de la Liga, c'est pour samedi. En déplacement sur la pelouse de Valladolid, l'Atlético de Madrid dépend de lui-même pour remporter le 11e titre de son histoire. En même temps, le Real Madrid reçoit Villarreal, déjà plongé dans sa finale de Ligue Europa. Avant de laisser place au terrain, retour sur une longue semaine avec les médias du pays et leur folklore.

Luis Suarez lors du derby madrilène entre l'Atlético et le Real Madrid en Liga

Crédit: Getty Images

Lundi 17 mai : L'Atlético aime souffrir, le Real fier de sa "résilience"

À l'heure du réveil, les cœurs madrilènes battent encore anormalement vite. La journée de la veille a drainé tout le monde émotionnellement. Les supporters de l'Atlético ont désespéré au-devant des occasions ratées de leur équipe avant d'exulter à la la 88e grâce au but salvateur de Luis Suárez. Du côté du Real, on se sera vu champions durant exactement 19 minutes. Pour le dénouement, il faudra patienter encore jusqu'à samedi. Alors, avant de se livrer à nouveau corps et âme dans la dernière bataille de la saison, les deux camps de supporters profitent du lundi pour resserrer leur lignes. D'un côté comme de l'autre, on est fier de son équipe et on tient à le faire savoir.
Un audio de Koke envoyé à ses coéquipiers après une défaite mortifiante contre l'Athletic refait surface. À cette époque-là, fin avril, l'Atlético vivait le pire moment de sa saison. Le titre semblait glisser entre ses doigts tremblants. "Putain d'Atlético, jamais les choses ne seront faciles pour nous. Quand ça faisait 14 ans qu'on n'avait pas battu le Real, c'était une finale de Coupe au Bernabéu, on commence par perdre. Et, ensuite, on remonte au score pour gagner. L'année suivante, on joue la Liga à Levante... On perd. On joue contre Málaga à domicile, si on gagne on est champions, et on fait nul. Tout se joue au dernier match. On commence par perdre au Camp Nou et on finit par égaliser pour gagner la Liga. C'est ça l'Atleti. C'est ça le club que nous sommes", martèle le capitaine colchonero, sa voix nouée par l'émotion. "Plus les choses sont difficiles, plus on y arrive. Plus c'est facile, moins c'est bien pour nous. Rappelle-toi de ce que je te dis : on va gagner cette Liga. Personne ne croit en nous, et quand personne ne croit en nous, c'est là où on fait le mieux les choses".
Dans les colonnes d'El Mundo, le journaliste pro-Atlético Iñako Diaz-Guerra en rajoute une couche : "Simeone est à un pas du titre avec un effectif dont les stars sont Oblak, le gardien qui a été signé car on n'avait pas pu garder le titulaire du Real, un joueur maison, Koke, qui ne comptait même pas pour le sélectionneur il y a un an, un milieu, Llorente, qui était de trop au Real et qui maintenant est le meilleur joueur de la Liga, et un buteur, Suárez, qui a été offert par le Barça", lit-on dans El Mundo. Côté Real, on ricane.
L'Atlético, équipe du peuple, ça valait peut-être il y a 15 ans. Aujourd'hui, João Félix est l'un des transferts les plus chers de l'histoire, Simeone l'entraîneur le mieux payé du monde et l'Atlético a tout simplement l'effectif le mieux garni du championnat. Dans le camp d'en face, on préfère se rallier derrière le discours terre à terre mais non moins inspiré d'Alvaro Odriozola. "Je me sens très fier de tous les joueurs de cet effectif. Les choses ont été très compliquées cette saison. Il y a un très beau mot dans le dictionnaire : résilience. Ça définit notre saison. Résilience. On est en train de résister envers et contre tous", affirme le joueur basque, l'un des meilleurs représentants de la ténacité merengue du moment malgré son statut de joueur de complément.

Mardi 18 mai : Passage à l'offensive

Le mardi, les hostilités commencent pour de vrai. On la croyait enterrée et voilà qu'avec sa Une - "La discussion qui a retourné la Liga" - Marca ravive la polémique du week-end. L'un des termes les plus prononcés de la journée de dimanche avait été la "pausa de hidratación" ou "cooling break" en anglais. La pause de la discorde intervient à la 77e minute. À cet instant-là, l'Atlético perd 0-1 contre Osasuna. Simeone ordonne à Savic de se joindre au groupe rassemblé autour de sa personne. Le temps est compté, il faut alors trouver les mots justes. "On va être fort dans la tête. On va jouer tranquillement et le but va venir. Allez, allez, allez", commande El Cholo. 11 minutes plus tard, la prémonition de l'Argentin se vérifie, l'Atlético est de retour sur le trône.
Il n'en fallait pas plus pour offrir un angle d'attaque aux chroniqueurs pro-Real les plus véhéments. Sur le plateau d'El Chiringuito, Juanma Rodríguez y croit dur comme fer : "Cette pause d'hydratation est un temps mort illégal". On lui explique alors qu'elle résulte d'un consensus entre les deux équipes, fixé le matin du match. Mais le monsieur a tout prévu. Il sort une feuille de la poche de son jeans et se met à lire le règlement de la Fédération concernant les fameuses pauses d'hydratation. Son argument : le règlement stipule qu'il faut minimum 30 degré pour qu'une telle pause ait lieu, il ne faisait pas 30 degrés dimanche après-midi à Madrid, par conséquent, une telle pause est illégale. Le plateau est alors secoué par des chroniqueurs se mettant à débattre de la météo, du règlement et de la probité de la Liga comme si leur vie en dépendait.
Une semaine plus tôt, un éditorialiste avait tenté de démontrer dans le journal AS l'inconstitutionnalité d'un pénalty sifflé contre Eder Militão lors du match contre Séville, textes de lois à l'appui. "Selon l'article 25.1 de la Constitution", "selon l'article 10 du code pénal", "par conséquent", "j'en conclus donc". Ça ne vaudra pas un Pulitzer, mais c'est original. Certaines plumes ne savent plus quoi inventer pour défendre les théories du complot arbitrales, mais elles ont le mérite d'essayer.
Chez les Colchoneros, on prend les choses avec humour. Le défenseur Mario Hermoso poste sur Instagram une photo de lui en train de s'hydrater, les supporters proposent de floquer des maillots avec le mot "hidratación" dans le dos et le numéro 77 tandis que d'autres rappellent que cette saison, certaines voix du Real se sont plaintes tour à tour de la neige, de l'absence de contrôle technique de la Fiat Panda avec laquelle un groupe de joueurs de l'Atlético se rendaient à l'entraînement ou encore de l'heure de fermeture de l'aéroport de Grenade.
picture

Même sans Ronaldo, Benzema a-t-il vraiment évolué tactiquement ?

Mercredi : Place à l'accalmie

Pas grand-chose à se mettre sous la dent en cette journée de mercredi. On y parle du retour de Karim Benzema en bleu, du dîner entre Suárez et Messi à Madrid et de Kylian Mbappé, l'occasion de tout de même remarquer une pépite audiovisuelle 24 carats. "Peut-être que c'est une bêtise, mais moi je me dis : programme avec une audience maximale, une attente énorme autour de cette interview de Mbappé. Tout le monde connaît la relation entre Mbappé, le Real, le PSG… et il est venu habillé en blanc !" s'enflamme Edu Aguirre sur El Chiringuito.
Un jour, Sergio Ramos s'est pointé dans un costard blanc à un rassemblement de la Sélection espagnole afin d'envoyer un signe au Real, avec qui il était en train de négocier sa venue. Ce que Ramos n'avait pas anticipé, c'est que depuis 2004, à chaque fois qu'un joueur dans le viseur de Florentino Pérez s'habille en blanc, les médias y voient un "clin d'œil au Real".

Jeudi : La presse pro-Real mêle Ronaldo dans l'histoire

Invité dans un late-show, la légende de l'Atlético Milinko Pantic ouvre les hostilités. Une chose à dire aux supporters du Real ? "Le pire dans la vie est quand vous ne dépendez pas de vous-même. Du coup, vous êtes dans la merde". Simple, efficace. À moins que… le Real dépende un peu de lui-même. C'est en tous cas ce que croit Marca qui titre "Ronaldo joue pour le Real". En plus d'être un grand ami de Florentino Pérez, Ronaldo Nazario est accessoirement le président de Valladolid, rival de l'Atlético lors de la dernière journée. Et pour pimenter cet affrontement, Valladolid est dans la nécessité absolue de battre l'Atleti s'il entend garder son strapontin en première division. Autant dire que le peuple du Bernabéu compte sur R9 pour motiver correctement ses joueurs.
Problème, ledit R9 a d'autres préoccupations, comme par exemple profiter du soleil des îles Baléares. "En bien, comme en mal, Ronaldo est très médiatique. La Real Sociedad t'en met quatre, tu es sur le point d'être relégué et toi tu postes une photo depuis Ibiza…", s'étranglait jeudi un supporter de Valladolid sur la SER. Depuis une semaine, Valladolid tout entier ressemble à un club de morts-vivants. Même si la relégation n'a pas été mathématiquement actée, l'entraîneur Sergio González reconnaissait déjà le naufrage en conférence de presse d'avant-match. Voilà qu'en plus de scandaliser ses propres supporters, Sergio scandalisait par la même occasion les supporters du Real ! Mais comme Unai Emery a prévu de ne pas aligner l'entièreté de son équipe A face à la troupe de Zidane, finale de Ligue Europa en approche oblige, les Atléticos peuvent aussi tourner le scandalomètre au maximum si bon leur chante.
Scandale est d'ailleurs le mot du jeudi. Dans une longue diatribe, la légende rojiblanca Paulo Futre s'en prend aux arbitres, exprime sa préoccupation quant à l'arbitrage de la dernière journée et prend les journalistes à témoin et toute l'Espagne pendant qu'il y est. "Écouter Futre me fait constater que désormais c'est l'Atlético qui postule au titre de porte-drapeau de la plainte", cinglait en retour sur Radio Marca le journaliste Raúl Varela. Pourtant, sur la chaîne TV du Real Madrid, le corps arbitral en prend aussi pour son grade. Les chroniqueurs du jour en sont convaincus, la Fédération a nommé des arbitres anti-madridistes pour le match décisif.
La journée se termine toutefois sur une note plus légère grâce aux interventions de la femme de Koke sur la COPE et José Luis Martínez-Almeida, le maire de Madrid sur la SER. "J'aimerais beaucoup que le but de la Liga soit marqué par Koke. Il nous représente tous. Figurez-vous qu'aujourd'hui on m'a donné un motif d'espoir : le samedi, c'est le jour de Santa Rita, la patronne des impossibles. Il n'y a pas de meilleur jour pour gagner la Liga", se félicite le maire de Madrid, qui n'a jamais caché son amour déraisonné pour l'Atlético. Quelques heures plus tard, il déclarera néanmoins : "J'ai un bon feeling mais je ne suis pas optimiste car étant pour l'Atlético, c'est impossible".

Vendredi : Une journée de réflexion avant la grande explication

Curieusement, 24h avant la date fatidique, on cherche à prendre un peu de hauteur. Il ne reste plus grand-monde de pertinent à interviewer côté Atlético tant les ex-joueurs du club ont occupé l'espace médiatique lors des derniers jours. Les légendes du Real, elles, sont restées muettes, comme à leur habitude.
Tout a beau déjà avoir été dit, on passe en revue une énième fois les différents scénarios possibles, on répète les mêmes statistiques (le Real n'a jamais été champion de Liga en arrivant deuxième à la dernière journée, toutes les Liga de l'Atlético sauf un ont été remportées à la dernière journée), mobilise les mêmes souvenirs et écoute les mêmes conférences de presse des mêmes entraîneurs avec les mêmes questions et les mêmes réponses. Dans moins de 24 heures, la furie du football envahira à nouveaux les rédactions. En attendant, les cœurs se remettent à battre au-dessus du rythme conseillé.
Rejoignez Plus de 3M d'utilisateurs sur l'app
Restez connecté aux dernières infos, résultats et suivez le sport en direct
Télécharger
Sur le même sujet
Partager cet article
Publicité
Publicité