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Parcage abandonné et Dugarry chahuté : en 99, l’OM s’offre une crise XXL en sombrant au Chaudron

Cyril Morin

Mis à jour 16/01/2019 à 20:12 GMT+1

LIGUE 1 - Dans une position très délicate après une série de mauvais résultats, l’OM de Rudi Garcia se déplace ce mercredi à Geoffroy-Guichard en match en retard de la 17e journée (21h). 20 ans plus tôt, un OM prometteur sur le papier avait sombré face à la furia stéphanoise, s’offrant l’une des crises les plus spectaculaires de son histoire moderne. Récit.

Christophe Duggary à l'OM en 1999

Crédit: Eurosport

Il y a des dimanches soir qui marquent une génération. Des dimanches soir où le tube cathodique fait office de diffuseur d’émotions hors normes, si éloignées de la monotonie d’un jour comme celui-ci. Le dimanche 12 décembre 1999, tous les supporters de Saint-Etienne s’en souviennent. Mais ceux de l’OM peut-être encore plus. Ce jour-là, un OM dans un piteux état se fait gifler par l’ASSE, promu en plein état de grâce, dans un Chaudron en ébullition (5-1). Le genre de soirées à éviter à tout prix pour Rudi Garcia et les siens vingt ans plus tard, sous peine de s’offrir une réplique d’un séisme qui n’a pas encore eu d’équivalent dans l’histoire moderne de l’OM.
Tout a commencé de travers pour l’OM dans cette saison 1999-2000. Pourtant, sur le papier, l’équipe a fière allure. La saison d’avant, celle du centenaire, a porté le club en finale de la Coupe UEFA face à une équipe de Parme magnifique (0-3). La défaite finale a fait mal, certes, mais l’épopée a marqué. En championnat, le titre s'est joué à la dernière journée, où Bordeaux était allé gagner sur la pelouse du Parc, unique scénario qui privait l'OM du sacre. Alors, à la reprise, les espérances entourant l’équipe de Rolland Courbis sont grandes. William Gallas, Laurent Blanc et Lamine Diatta sont censés former une défense à trois hermétique, Stéphane Dalmat et Peter Luccin, les deux pépites, sont encadrées par Ivan de La Pena et Robert Pires au milieu tandis que devant Ibrahima Bakayoko et Kaba Diawara viennent d’arriver pour épauler Christophe Dugarry, Florian Maurice et Fabrizio Ravanelli. Que du beau monde en somme.
Mais, comme souvent à l’OM, rien ne se passe comme prévu. À la surprise générale, "Le Président" Laurent Blanc quitte la Canebière. Capitaine et leader de vestiaire, il rejoint l’Inter Milan après s’est vu signifié la fin de son aventure par Courbis. "On avait une offre de 25 millions de francs (18 en fait) pour un joueur de 35 ans (33 en fait) qui pouvait tripler son salaire et bénéficier d’une semaine pour préparer les matches, vu que l’Inter ne disputait pas la Ligue des champions, avait nuancé Courbis en 2015 dans les colonnes du JDD. Je ne voyais pas comment on pouvait le retenir." Eduardo Berizzo débarque en provenance de River Plate pour remplacer le taulier mais le leadership et le talent de Blanc font cruellement défaut à cet OM. Surtout qu’il s’additionne aux départs d’autres joueurs d’expérience comme Eric Roy, Cyril Domoraud, Daniel Bravo ou Jocelyn Gourvennec.
Assez rapidement, la pression autour du coach olympien se resserre. Malgré une victoire épique en Ligue des champions face au grand Manchester United (1-0), l’équipe phocéenne ne réussit pas à séduire dans le jeu et présente des résultats indignes de son potentiel, illustrés par la défaite à Montpellier (3-1) ou la déroute à domicile face à Sonny Anderson et l’OL (0-1). Une addition de couacs, combinés à une tension avec le président Yves Marchand finissent de pousser Courbis à la démission. Le 26 novembre 1999, après une défaite face à la Lazio de Rome (0-2), l’OM se retrouve sans coach et sans projet lisible.
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Rolland Courbis en 1999

Crédit: AFP

4-0 après une demi-heure de jeu

Le 12 décembre, Marseille est cependant encore dans le coup pour l’Europe, calé à la 7e place à cinq points du podium. C’est Bernard Casoni qui a repris les rênes et tente de remodeler un groupe où aucun leader n’émerge malgré un talent certain. En face, Saint-Etienne, rival historique, est un promu surprenant, neuvième avant le match, porté par un duo d’attaquants brésiliens inattendus : José Aloisio et Alex Dias de Almeida, appelé sobrement Alex. Le tandem est arrivé à l’été et n’a pas tardé à faire parler la poudre. Marseille peut souffler, Aloisio est absent pour ce match, privant l’ASSE de sa doublette carioca. Mais ce soir-là, c’est le soir d’un seul homme. L’OM va s’en rendre compte bien assez vite.
Dans un Geoffroy-Guichard de gala où se sont massés près de 34000 spectateurs, dont un parcage entier de supporters marseillais - le détail a son importance -, la partie prend rapidement un virage inattendu. 5e minute : Un centre dévissé de Revelles atterrit sur la transversale d’un Stéphane Porato surpris. Alex a suivi et ouvre le score. Six minutes plus tard, sur un corner botté par Stéphane Pedron, Lionel Potillon profite de l’incroyable passivité de Porato pour doubler le score. 11e minute et l’OM est déjà mené 2-0. Plus que le score, c’est l’attitude marseillaise qui pose question. Chaque attaque des Verts semble destinée à terminer au fond.
20e minute, nouvelle incursion dans la surface marseillaise et Alex bat Porato de près. Sa célébration panthère, qu’il étrenne pour la première fois, fait chavirer un Chaudron au bord de la fusion. Le parcage marseillais explose. Entre 2000 et 3000 personnes en colère grondent contre leurs joueurs. Des sièges sont arrachés, des fumigènes échangés entre les tribunes, forçant Pascal Garibian à interrompre brièvement les débats. Pas suffisamment pour endiguer la furia stéphanoise.
En état de grâce, l’ASSE s’offre un but digne d’Olive et Tom. Après une déviation ratée d’un Christophe Dugarry encore transparent, Pedron, dos au jeu, lance Revelles d’une retournée acrobatique aussi exceptionnelle qu’efficace. L’attaquant des Verts centre à destination d’Alex. À l’instinct, le Brésilien tente une demi-volée légèrement de l’extérieur sublime qui vient se loger dans le petit filet d’un Porato complètement dépassé. La demi-heure de jeu n’est pas encore arrivée que l’OM est mené 4-0 par un promu. Pire, aucune révolte ne semble pointer le bout de son nez sur le terrain.
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Stéphane Pedron félicite Alex face à l'OM

Crédit: AFP

Y a pas de respect à avoir pour eux puisqu'ils ne nous respectent pas
Dans les tribunes, en revanche… À la mi-temps, après les échauffourées, le parcage marseillais se vide. Intégralement. Il y a une chose avec lesquels les supporters marseillais ne transigent pas, c’est l’honneur. Ce 12 décembre 1999, il a été piétiné. À Libération, les représentants des groupes de supporters crachent leur venin : "On n'avait plus rien à faire là, puisqu'on n'avait plus de représentant dans l'équipe" explique Christian Cataldo des Dodgers. "Y a pas de respect à avoir pour eux puisqu'ils ne nous respectent pas" continue Lionel Tonini des Yankees. "Niveau honte, on a battu le PSG de Canal Plus !" complète-t-il.
Le reste du match n’est finalement qu’anecdotique pour l’OM. Pas pour Alex qui signe un quadruplé de légende pour porter les Verts à la 5e place du classement après coup. Et surtout humilier les Olympiens (5-1). La peur gagne alors l’effectif marseillais. Après le match, au lieu de rentrer sur la Canebière, les joueurs et le staff restent dormir dans le Forez. Le décrassage du lundi après-midi est annulé à la Commanderie, pour éviter tout débordement des supporters.
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Christophe Dugarry à l'OM en 1999

Crédit: Panoramic

Ils arrivent quand même. Le lendemain, les voitures de Robert Pirès et Sébastien Perez sont prises pour cible et des fumigènes entourent le camp de base marseillais. Certains joueurs, en particulier Dugarry, sont pris à partie par les supporters selon le quotidien français. Une légende prend alors corps : l’international français aurait été forcé de se cacher dans un coffre pour quitter la Commanderie. Version démentie par l’intéressé récemment sur les ondes de RMC : "Mais arrêtez avec ça ! Ce n’était pas moi, a-t-il avancé. Je suis reparti avec Robert Pires, qui avait une Classe A. Sa vitre était cassée parce qu’on lui avait balancé un fumigène dans la voiture."
Il n’empêche, la crise est violente, durable et majeure. L’OM enchaîne avec une nouvelle défaite, à domicile cette fois face à Lens (1-2), à onze contre dix, histoire de boucler la boucle, avant que la trêve ne pointe le bout de son nez. Le mercato d’hiver prend des airs de fuite massive. Dugarry est exfiltré à Bordeaux, Kaba Diawara, arrivé à l’été, prend la poudre d’escampette vers le PSG, Ravanelli retrouve son Italie à la Lazio et Daniel Montenegro retourne au pays. Franck Dumas, Jean-Pierre Cyprien, Jérôme Leroy et Cyrille Pouget débarquent pour stopper l’hémorragie. Sans grand effet.
L’OM s’enfonce. S’enlise. Et devient même candidat à la descente. Ce n’est qu’à la 34e journée, la dernière, à la faveur d’un nul face à Sedan (2-2), que Marseille se sauve officiellement. 15e place. A égalité de points avec Nancy qui descend, à cause d’une différence de buts moins bonne que celle des Olympiens (-2 contre 0). Une saison en enfer. Où la virée dans le Chaudron aura servi de détonateur violent vers l’une des crises majeures de l’histoire olympienne. A Rudi Garcia et ses hommes de s’en inspirer. Pour faire tout l’inverse.
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Garcia sur le Vélodrome : "Ça ne nous aide pas, c'est une évidence"

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