Les plus populaires
Tous les sports
Voir tout

Avant OM-PSG - Valentin Rongier, couteau-suisse ultra-affûté : "C'est du pain-bénit pour un coach"

Cyril Morin

Mis à jour 24/02/2023 à 16:34 GMT+1

LIGUE 1 - Exceptionnel cette saison, quelle que soit sa position sur le terrain, Valentin Rongier continue de rayonner avec l'OM avant de retrouver le PSG dimanche (20h45). Le Nantais, arrivé avec l'étiquette de joueur intelligent mais léger dans le duel, est devenu un athlète à l'explosivité rêvée pour Igor Tudor. Une douce ironie au vu de son parcours, jalonné de remises en cause physiques.

Valentin Rongier, l'homme à tout bien faire à Marseille

Crédit: Quentin Guichard

La légende raconte qu'avant de se coucher ce mercredi 8 février, Vitinha a vérifié que Valentin Rongier ne l'avait pas suivi jusque-là. Il faut le comprendre : sur ce 8e de finale de Coupe de France entre l'OM et le PSG, il n'a jamais eu une minute à lui, harcelé et bousculé par le milieu marseillais, aligné en défense centrale pour l'occasion. Ce fut une franche réussite autant qu'un motif de rigolade pour Igor Tudor : "A la fin du match, j’ai plaisanté avec lui en lui disant qu’il allait devenir un défenseur".
Rongier est aujourd'hui le meilleur relayeur-sentinelle-latéral droit-défenseur central d'Europe. C'est normal, c'est le seul. Sa polyvalence à toute épreuve est devenue une arme dont Tudor, comme Sampaoli avant lui, prend plaisir à utiliser au maximum. En somme, Rongier est le couteau-suisse ultime. Pas une nouveauté à écouter ses premiers coaches nantais, qui ont insisté sur cette polyvalence pour lui offrir cet arsenal à part.
"Le voir briller comme défenseur central, c'est une petite surprise, oui. Mais le voir dominant défensivement, non, pas du tout, assène Damien Bonnin, son entraîneur en U17. L'intelligence de jeu, il l'aura toujours, n'importe où sur le terrain. Il aura toujours un coup d'avance sur tout le monde. Il anticipe, il lit, il voit avant les autres, il sait ce qu'ils vont faire. Il sait tout".
picture

Valentin Rongier célèbre face à ses supporters après la victoire face au PSG

Crédit: Getty Images

Le déclic avec Sampaoli

Cette science tactique avait déjà convaincu l'OM de miser sur lui à l'été 2020. Rapidement, André Villas-Boas avait installé l'ancien Nantais au milieu où son duo avec Morgan Sanson avait été au cœur de la formidable fin de saison marseillaise. Mais c'est surtout Jorge Sampaoli qui a changé Rongier. D'un bon joueur de L1, il est devenu un international en puissance et un capitaine incontestable quand Dimitri Payet n'est pas aligné.
A l'été 2021, il ne sent pourtant pas un amour débordant de l'Argentin le concernant. "Ce qui m'a le plus marqué, je vais être honnête, c'était pendant la préparation. Le coach a parlé des milieux de terrain et il a cité tout le monde, sauf moi, rembobinait-il en décembre 2021 pour RMC. Là, je me suis dit 'il y a un problème'. Je l'ai interprété comme un message pour moi, peut-être que je me suis fait des films. Mais, à partir de ce moment-là, je me suis dit 'il compte pas sur moi ? Il va voir'".
Il a vu. Avec l'Argentin, Rongier devient le métronome du milieu autant qu'un latéral combatif dans son couloir droit. Physiquement, il y a également un vrai changement, comme le confirme David Cadier, préparateur physique qui l'a accompagné depuis 2021 dans cette métamorphose. "Au départ, c'était un très gros moteur, avec beaucoup de volume, explique celui qui voit encore Rongier une fois par semaine. Mais sur la dernière année, il y a énormément de choses qui ont évolué. Quand je l'ai rencontré pour la première fois, la priorité pour lui, c'était d'être encore plus explosif. Plus fort, plus explosif. C'est un garçon qui a besoin de se sentir fort physiquement pour être en pleine confiance".
picture

Valentin Rongier discute tactique avec Jorge Sampaoli, alors coach de l'OM

Crédit: Getty Images

1,72 m, 67 kg : qui se serait douté que ce gabarit serait aussi dominant physiquement au milieu d'une L1 athlétique ? "Sa vraie progression, c'est sur les deux-trois premiers mètres, estime Damien Bonnin. Jordan Veretout, il a eu ça plus tôt. Mais Valentin a désormais cette faculté de casser le pressing adverse sur ses premiers appuis. Pour le très haut niveau, c'est une condition sine qua none qu'il ne remplissait pas avant".

"Serait-il capable de supporter l'intensité au plus haut niveau ?"

Avant, justement, c'est de l'étiquette d'un joueur parfois trop léger dans le duel, presque fluet, que Rongier a toujours dû se détacher. "A 12 ans, Valentin a connu une fracture d'une vertèbre et a donc vécu pendant un an avec un corset. Il était en retard physiquement", concède Bonnin. Le début d'une formation placée sous le signe des promesses mais aussi des pépins. "Ce n'était pas que purement physique, c'était aussi la santé, retrace Samuel Fenillat, responsable du centre de formation du FC Nantes. Il avait déjà des qualités physiques mais il était souvent blessé. L'interrogation était là : serait-il capable de supporter l'intensité et la charge de travail au plus haut niveau ?".
A cette question, Nantes a tardé à trouver la réponse. Chaque intersaison, son cas fait débat. A la sortie de la saison U16, Damien Bonnin bataille pour arracher une année supplémentaire. En U17, son retard physique est presque rédhibitoire. Mais son sens tactique est trop développé pour le laisser de côté. "Quand on joue en U17 National, même un peu avant, il y a des grosses cylindrées au milieu, avec des jeunes costauds, formés de bonne heure physiquement. Lui, c'était le petit en retard physiquement au milieu, concède son coach de l'époque. Il avait une grosse marge en termes d'intensité physique. Malgré tout, ma priorité, c'était qu'il soit sur le terrain. Donc je l'ai utilisé à différents postes, il a joué latéral, au cœur du jeu, excentré. Ça lui a développé une intelligence qu'il avait déjà, ça l'a renforcé dans tout ce qu'il était capable de faire et ça l'a renforcé parce qu'il était sur le terrain".
Ne cherchez pas plus loin les racines de la formidable polyvalence de Rongier. De ce retard physique, il en a fait une force dans un premier temps. "Il a fait un gros travail en dehors du terrain, retrace encore Samuel Fenillat. La fameuse préparation invisible… C'est un garçon qui a avancé caché, souvent dans l'ombre. C'est quelqu'un de caractère. On arrive pas là où il est sans personnalité. Il a rapidement compris que pour être sur le terrain, il allait devoir faire différemment des autres en dehors".
picture

Valentin Rongier buteur pour Marseille contre Toulouse en Ligue 1, le 29 decembre 2022

Crédit: Getty Images

Quand Villas-Boas, Sampaoli, Tudor, Conceiçao ou Ranieri te font confiance...
A Marseille, son éthique de travail, son investissement au quotidien et son leadership par l'exemple a fini par convaincre tout le monde, de Pablo Longoria qui lui a offert une belle prolongation en septembre dernier jusqu'en 2026 à Igor Tudor qui l'a aligné dès qu'il l'a pu cette saison (1 seul match manqué, sur suspension). "Rongier me donne tout, savourait le Croate en septembre dernier. Il est intelligent, il a de la course. Il est sous-estimé par les médias et le public, c'est vraiment un joueur fantastique".
C'est avec une émotion perceptible dans la voix que ses formateurs jugent son évolution aujourd'hui. François Bourgeais, qui l'a coaché lorsqu'il était pré-adolescent, partage l'avis de Tudor. "Il a été critiqué pour son manque de réalisme, pour parfois ne pas prendre sa chance.. Il a toujours su rebondir, argumente-t-il. Aujourd'hui, les entraîneurs passent à l'OM, il enchaîne, avec Villas-Boas, Sampaoli, avec Tudor. Avant ça, il avait eu Conceiçao, Ranieri… Les mecs, ils en ont vu des joueurs. Et des grands ! Mais quand tous ces gars-là te font confiance, ça dit quelque chose. Quand tu es entraîneur, que tu as un Valentin capable de jouer 6, de jouer 8, arrière-droit, de rentrer à l'intérieur, à défendre sur son côté ou même défenseur central, c'est du pain-bénit".

Les Bleus, étape naturelle ?

A 28 ans, Rongier a atteint une forme de plénitude physique, footballistique et personnelle. Mais le caractère du bonhomme laisse penser que l'histoire n'est pas finie. "Capitaine à son âge à Marseille, ça laisse présager de choses exceptionnelles, sourit Damien Bonnin. Sa limite, honnêtement, je ne la connais pas. Je pense qu'il peut aller encore beaucoup plus haut". En Bleu, son nom a parfois été évoqué sans que Didier Deschamps ne l'inscrive encore sur une liste tricolore. Nul doute qu'il a un œil attentif à son parcours : un récupérateur formé à Nantes et capitaine à l'OM qui compense son déficit physique par un sens tactique hors-norme, ça doit lui rappeler des choses.
A Nantes, on rêve secrètement de voir Rongier et Veretout appelés simultanément à Clairefontaine. "Ce sont des joueurs qui ressemblent à ce qu'on a envie de mettre en place au centre de formation ici. Ce sont de beaux porte-drapeaux de la formation nantaise", reconnaît Samuel Fenillat. "Quand je les vois ensemble, je me régale, s'enthousiasme François Bourgeais. Ça va au-delà des préjugés sur les milieux qui doivent être grands, forts, puissants. Il y a 15 ans de ça, je mettais souvent les Top 3 de chacune de mes générations dans un tableau Excel et je les associais. J'avais fait pareil avec Valentin et Jordan. Je me disais 'tiens, si le club a besoin un jour de les associer, ils se connaissent déjà'". A Marseille, on s'en réjouit tous les jours.
Jordan Veretout et Valentin Rongier prennent en étau Joao Victor (FC Nantes)
Rejoignez Plus de 3M d'utilisateurs sur l'app
Restez connecté aux dernières infos, résultats et suivez le sport en direct
Télécharger
Partager cet article
Publicité
Publicité