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Ligue des champions - AC Milan - Inter - "Je ne dormais plus la nuit" : 2003, l'Euroderby le plus mythique de l'histoire

Guillaume Maillard-Pacini

Mis à jour 08/05/2023 à 22:03 GMT+2

LIGUE DES CHAMPIONS - Vingt ans après le premier "Euroderby" de l'histoire, l'AC Milan et l'Inter se retrouvent, ce mercredi soir, en demi-finale aller de la C1. Une double confrontation qui, à l'époque, avait tourné à l'avantage des Rossoneri, vainqueurs grâce à la règle du but à l'extérieur (0-0, 1-1). Christian Abbiati et Stéphane Dalmat ont accepté de nous raconter leurs souvenirs de 2003.

Hernan Crespo et Paolo Maldini lors de l'Euroderby de 2003

Crédit: Imago

C'est une anecdote qui a le mérite de résumer, à elle toute seule, ce que peut représenter un derby de Milan en demi-finale de Ligue des champions. Nous sommes le 13 mai 2003, et l'Inter reçoit alors l'AC Milan pour une confrontation retour plus tendue que jamais après le match nul de l'aller (0-0). Devant 76.854 spectateurs, les deux équipes se rendent coup pour coup. Les Rossoneri, qui pensent avoir fait le plus dur en ouvrant le score à la 45e minute par l'intermédiaire d'Andriy Shevchenko, se font rejoindre à dix minutes de la fin après un face à face remporté par Obafemi Martins.
L'incandescence est totale. Un seul petit but et l'Inter s'envole pour la finale de Manchester. Mais à deux reprises, Christian Abbiati, le gardien de l'AC Milan, sauve littéralement les siens. D'abord sur une tête de Cordoba, puis grâce à une sortie rapide dans les pieds de Kallon. Deux arrêts décisifs qu'Adriano Galliani ne verra jamais, du moins en direct. Présent à Giuseppe Meazza ce soir-là, le bras droit historique de Silvio Berlusconi a en effet préféré se rendre à l'infirmerie. Trop de souffrance. C'est donc allongé sur un lit et bourré de tranquillisants que l'administrateur délégué milanais apprendra la qualification de son équipe en finale de la C1.
Pour bien comprendre la tension qui régnait dans la capitale lombarde à l'époque, nous avons interrogé plusieurs de nos confrères transalpins. Brève compilation de leurs souvenirs : "une ville paralysée" pendant les six jours qui ont séparé les deux matches, "une tension omniprésente" dans chaque coin de rue, ou encore l'impression de vivre "l'enfer sur terre". Si les deux clubs de Milan ont remis ça deux ans plus tard, mais cette fois lors des quarts de finale, la première fois ne s'oublie jamais. Carlo Ancelotti, pas vraiment le premier venu, se souvient par exemple de "la plus grande pression de sa vie" en tant qu'entraîneur, même "plus que lors des finales".
"Après ce que je viens de vivre en demi-finale, tu penses vraiment que cette confrontation me tend ?", plaisantait-il en conférence de presse juste avant la grande finale face à la Juventus, remportée le 28 mai 2003 aux tirs au but (0-0, 3-2). Gennaro Gattuso, lui, raconte dans le documentaire "Stavamo bene insieme" qu'il a pris la mauvaise habitude de "dormir sur son canapé" pendant plusieurs années suivant cette folle semaine de mai. Trop de tension, pas de sommeil. Christian Abbiati, son coéquipier, a d'ailleurs vécu la même chose.
Des jours très stressants
"C'était vraiment une semaine difficile, nous confie l'ancien gardien, titulaire au match retour après la blessure de Nelson Dida entre les deux rencontres. Je ne dormais plus la nuit, et je n'étais pas le seul. Il y avait une atmosphère bizarre dans la ville, surtout après le 0-0 de l'aller qui laissait le suspense intact. Un derby, c'est toujours particulier. Mais la différence avec le championnat, c'est que si tu perds en C1, tu ne peux plus revenir en arrière, tu es éliminé et basta. En tout cas, moi, j'étais prêt à jouer, je me suis toujours entraîné au maximum et j'étais assez serein. Une fois sur le terrain, quand je suis rentré à l'échauffement, la concentration a pris le pas sur la tension." Entré en jeu au retour, Stéphane Dalmat se souvient lui aussi d'une ville "en plein stress".
"Elle était dans l'attente d'un tel match, mais restait heureuse de savoir que l'un de ses deux clubs serait en finale, raconte l'ex-milieu de terrain. Après, un derby reste un derby. Les jours qui ont précédé les deux matches ont été très stressants. Personnellement, j'étais très excité car j'attendais avec impatience de jouer une demi-finale de Ligue des champions. Ce n'est pas quelque chose qui arrive tous les jours. C'était un privilège avec un seul objectif, celui de se qualifier pour la finale de Manchester." Après deux confrontations très équilibrées, c'est donc l'AC Milan qui est sorti grand vainqueur du tout premier "Euroderby" de l'histoire.
Le tifo lors de Inter-Milan, demi-finale de C1 2003
"Mon premier souvenir, c'est mon étreinte avec Alessandro Nesta et ma course sous notre virage à la fin du match, se remémore Abbiati. Deux ans plus tard, en 2005, il y a eu de nouveau un derby, c'est vrai, mais il y avait moins de tension, les deux équipes avaient plus ou moins les mêmes effectifs. La première fois, c'était un saut dans l'inconnu." "Moi, mon premier souvenir est mon entrée en jeu, poursuit Dalmat. On rentre avec Obafemi Martins avec l'envie de tout casser. On voulait tout faire pour renverser le match et montrer au coach qu'il avait eu tort de nous mettre sur le banc. Notre mission, c'était tout faire pour gagner."
Et elle ne fut pas loin d'aboutir au terme d'une fin de match quasiment "irrespirable" pour Abbiati, qui boxera en touche le tout dernier ballon du match sur le corner de la dernière chance pour l'Inter. Puis Gilles Veissière, sifflet à la bouche, mettra fin à "six jours d'une énorme tension", "dans la ville" et "entre deux équipes composées de grands hommes et grands champions qui se respectaient beaucoup", souligne l'ancien international italien, qui parle d'une "joie unique" après cette qualification.
Christian Abbiati célèbre la qualification des siens lors de Inter-Milan (2003)

"On a pensé que nous étions maudits"

Côté Inter, la déception est aussi grande que l'issue cruelle. Tant dans les tribunes, remplies aux trois quarts par ses tifosi, que sur le terrain, où Javier Zanetti, le capitaine, termine en larmes, inconsolable. "C'était très dur à digérer, nous étions éliminés sans avoir perdu un match mais à cause de la règle du but à l'extérieur, regrette Dalmat. Puis cette déception arrivait un an après le traumatisme du 5 mai 2002, où nous avions perdu le titre lors de la dernière journée. On a pensé que nous étions maudits."
Pour panser des plaies encore douloureuses vingt ans plus tard, il a fallu du temps. Beaucoup, beaucoup de temps. "On a quand même réussi à terminer deuxième du championnat malgré la déception. Mais on attendait qu'une chose : partir en vacances en famille et recommencer à zéro en vue de la saison d'après. Il fallait tourner la page de cette désillusion de l'Euroderby", confie le Français, qui ne manquera pour rien au monde la version 2023, tout en espérant que le final sera cette fois différent. "Malheureusement, je suis aux Etats-Unis pour le travail. Mais je vais trouver un moyen pour voir le match, d'une manière ou d'une autre", promet Abbiati. Il y a deux décennies, ce sont les tifosi du Milan qui avaient envahi les rues de la ville pour entonner le chant "C'è ne andiamo a Manchester" ("On s'en va à Manchester"). Reste à savoir qui entonnera le remake de cette année : "C'è ne andiamo ad Istanbul" ("On s'en va à Istanbul").
Les larmes de Javier Zanetti lors de Inter-Milan (2003)
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