Manchester City - Leipzig : Faut s'inquiéter pour Kevin de Bruyne ?

Cette saison, avec Kevin de Bruyne, il fut souvent question d'âge. C'est sa première sortie sur le poids des années de certains de ses collègues en sélection belge qui a créé la crise durable rencontrée par les Diables Rouges lors du Mondial au Qatar. "On est trop vieux", avait-il expliqué au moment d'évoquer les chances de sacre des siens.

Il n'avait pas tort, au vu du résultat et de ses propres performances, mais la deuxième lame fut cruelle le concernant. Car, désormais, en Angleterre, la question brûle les lèvres des suiveurs : "Kevin de Bruyne est-il trop vieux ?".

La question, surréaliste s'il en est, lui fut posée lundi en conférence de presse. Surréaliste car de Bruyne est encore à ce jour statistiquement le meilleur passeur de Premier League, intrinsèquement le meilleur en Europe, il reste un pion essentiel du Manchester City de Pep Guardiola et continue d'avancer sur les bases d'une saison en double-double, une habitude le concernant. Surréaliste mais pas dénuée de pertinence : depuis la Coupe du monde, si City semble moins implacable, c'est aussi en partie en raison d'un coup de pompe certain de son milieu.

Classe, De Bruyne n'a pas pris ombrage de l'interrogation. "Je suis un vieux monsieur dans le football mais je ne suis pas un vieillard, a-t-il nuancé d'entrée. Désolé pour vous les gars mais je me sens très bien". Pourtant, depuis son retour du Qatar, où il fut franchement décevant, les chiffres ne confirment pas son impression. Avec deux buts et trois passes en 14 matches, il n'a pas retrouvé son rythme de croisière.

"Si je devais utiliser un mot pour décrire sa saison, je dirais mitigée, s'avance Pete Sharland, journaliste pour Eurosport en Angleterre. Il a eu de super matches, surtout plus tôt dans la saison mais aussi quelques difficultés, comme depuis le retour du Mondial. Celui-ci a eu une influence, c'est sûr mais je crois aussi qu'ils ont fait un pacte avec Guardiola. L'idée, c'est de donner la priorité à la C1. Ils sont à la lutte pour le titre ici, bien sûr, mais il y a peut-être une ouverture pour la Ligue des champions donc ils font un peu comme le Real Madrid avec Cristiano à l'époque, avec des périodes de repos lui permettant d'être au summum les soirées européennes".

La théorie se tient puisque c'est depuis le banc que le Belge a assisté à la victoire des siens à Crystal Palace (0-1) samedi, n'entrant que pour les dix dernières minutes. C'est ce nouveau statut qui interroge tant ce Manchester City fut le sien par le passé. Mais ces Citizens apprennent à moins dépendre de leur maître à jouer.

"Les gens ont des attentes différentes vis-à-vis de moi que vis-à-vis d'autres joueurs, c'est la vérité, a-t-il commenté, rappelant à quel point il était exigeant envers lui-même. En fait, certains attendent que je marque ou que je fasse une passe décisive à chaque match. Mais même si j'ai peut-être moins de passe que par le passé, je ne crois pas que je crée moins. […] Peut-être que ce n'est pas mon meilleur football mais c'est d'un bon niveau".

Le format de la saison ne correspond pas non plus au rythme physique d'un joueur habitué à profiter des coupures en cours de saison. "Plus que d'autres, il a besoin de petits breaks et ici et là dans la saison et avec tout ce calendrier condensé, il faut se préserver", estime Pete Sharland.

La dépendance de City à son égard reste malgré tout prégnante, surtout quand il est absent. A l'aller, face à Leipzig (1-1), Erling Haaland avait traversé la rencontre comme un fantôme. Le lien de cause à effet n'est pas compliqué à deviner. "La relation entre eux est très bonne et dessine l'animation de City, affirme le journaliste anglais. C'est le seul à pouvoir offrir de tels ballons à Haaland. D'ailleurs, si vous regardez bien ses stats, De Bruyne passe beaucoup plus que par le passé où il était parfois plus à la finition".

D'ailleurs, alors que la logique voudrait le voir prendre du recul à mesure que les années passent et que son explosivité diminue, le Belge réfute cette thèse. "Les gens disent parfois qu'il faut reculer avec l'âge mais pour moi c'est tout l'inverse, a-t-il plaidé. […] Je ne serai jamais un Fernandinho, qui fut un formidable numéro 6". Reste cette question : peut-il redevenir le vrai De Bruyne, celui qui portera enfin City au sommet de l'Europe ?