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Marinette Pichon : "Faire son coming out dans le foot reste difficile, c’est un monde plus macho"

Cléo Hénin

Publié 24/07/2023 à 23:33 GMT+2

C'est une légende du football français et une figure de la lutte contre l'homophobie. Nous avons rencontré Marinette Pichon à l’occasion de la sortie du film "Marinette" en juin dernier. Avec 81 buts en 112 sélections, l’ancienne footballeuse a été une pionnière sur les questions d’égalité hommes – femmes dans le sport et à parler librement de son homosexualité.

Marinette Pichon

Crédit: Getty Images

Marinette Pichon jette un regard tendre sur sa femme et son fils Gaël, qui joue au babyfoot. Voilà qui contraste avec le film dont elle est l’héroïne, "Marinette", et la vie tumultueuse d’une femme et sportive qui a affirmé ses convictions.
"On ne devrait pas être lésés pour ce que l’on est", nous confie Marinette Pichon à la terrasse du Studio 28, un cinéma parisien où a lieu l’avant-première de son biopic, en partenariat avec le Crédit Agricole. "Je parle, parce que j'estime que ma voix compte. Si j’étais une anonyme, je parlerais de la même façon, je militerais de la même façon et je porterais les mêmes messages. Mais j'ai cette chance d'avoir peu de notoriété."
Dans les années 2000, l'attaquante est la première footballeuse française à parler publiquement de son homosexualité et devient, par la force des choses, l’une des figures de la lutte contre l’homophobie. Si quinze ans ont passé depuis son arrêt du football, son regard sur l’évolution des mentalités est nuancé : “Je ne sais pas si c'est plus compliqué [de faire son coming-out, NDLR, les choses évoluent. Mais ça a toujours un impact sur des potentiels sponsors“.
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Marinette Pichon

Crédit: Getty Images

"Je n'en ai jamais souffert parce que j'ai une grande gueule"

Néanmoins, elle a pu observer des changements. “Les gens n’ont plus vraiment peur, ou alors se disent 'Le jour où j'aurai décidé par moi-même, et non parce que la société m'y oblige, je sauterai le pas'. Je ne veux pas que ce soit une obligation pour les gens. C’est toi qui décides ou non de franchir le cap. C’est ton choix“, déclare-t-elle. ”Après, peut-être que c’est plus difficile dans le foot parce que c'est un monde plus macho avec une identité plutôt patriarcale.“
Quand on lui demande si le fait d’avoir toujours été transparente sur sa vie personnelle a parfois été douloureux, sa réponse est sans équivoque : “Moi, je n’en ai jamais souffert parce que j'ai une grande gueule. Du moment que ça ne m’atteint pas, je ne peux pas en souffrir. Par contre, ça me fait souffrir quand je vois des gamins qui sont jetés de chez eux ou des jeunes filles qui coupent les liens parentaux parce qu’ils n’ont pas d'écoute parentale. Il y a une incompréhension, un mur, une rupture brutale, sauvage, qui peut amener à la dégringolade.“
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"J'aimerais ne plus voir de banderoles à la con"

En 2002, Marinette Pichon devient la première joueuse française à devenir professionnelle en rejoignant la MLS, la ligue américaine de football : une reconnaissance du milieu et un accomplissement personnel. Mais sa force et son ancrage viennent d’ailleurs. “Je sais d’où je viens et je n’oublierai jamais mes racines. Le milieu associatif m’a permis de devenir celle que je suis aujourd’hui et m’a appris ces valeurs de respect, de partage, de rigueur, de dépassement de soi, d’amour. Seul le milieu associatif peut t’apporter ça. En milieu professionnel, il y a trop de concurrence. Dans le monde associatif, le mot clé c’est le plaisir avant toute chose, s’épanouir, découvrir et être intégré dans une communauté“.
Des valeurs qui sont parfois mises à mal dans le football professionnel, à l’image des joueurs de Toulouse qui ont refusé de porter le maillot arc-en-ciel pour la journée de lutte contre l’homophobie. Pour Marinette, “ dès lors que tu évolues dans une ligue qui porte l'initiative, tu devrais porter le maillot. On n’associe pas tes valeurs, ta religion ou autre. C’est toute une équipe qui porte, ce sont des clubs qui s’y associent, ce n’est pas un engagement personnel“.
Elle demeure “optimiste“ pour l’avenir du football et du sport en général, notamment en vue des Jeux de Paris en 2024. “Si on arrive à faire de beaux Jeux avec des beaux messages, alors on aura réussi une bonne communication. Après, il faudra être capable d'estimer si oui ou non dans les stades, le taux de discrimination ou d'homophobie a changé. En tout cas, j'aimerais ne plus voir des banderoles à la con et ne plus entendre d’insultes“.
Le film "Marinette" est à voir en salle depuis le 7 juin.
L'affiche du film "Marinette", consacré à la vie de l'ancienne footballeuse Marinette Pichon / Crédits : TheJokers Films
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