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MERCATO - A Chelsea, tous les chemins mènent à Riyadh en Arabie saoudite

Philippe Auclair

Mis à jour 21/06/2023 à 21:16 GMT+2

Alors que l'Arabie saoudite ne cesse de s'imposer comme un acteur majeur du marché des transferts, plusieurs joueurs de Chelsea sont visés par la Saudi Pro League. Une aubaine pour les Blues qui ont besoin de vendre pour respecter les règles du fair-play financier de la Premier League. Mais les liens entre Chelsea et les Saoudiens paraissent aller au-delà d'une simple alliance de circonstance.

La Premier League a-t-elle peur de l'Arabie Saoudite ? "Pas encore mais…"

Tous les chemins mènent à Riyadh quand on part de Stamford Bridge, semble-t-il. A preuve, N'Golo Kanté, c'est fait. Le champion du monde français va rejoindre Karim Benzema à Al Ittihad, champion d'Arabie Saoudite en titre. Romelu Lukaku, ça a bien failli se faire; mais l'avant-centre belge qui s'était rendu à Riyadh pour évoquer un possible transfert à Al-Hilal a finalement repoussé l'offre du club de Saudi Pro League (*). Pierre-Emerick Aubameyang, Hakim Ziyech, Edouard Mendy et Kalidou Koulibaly? C'est en bonne voie. Le dénominateur commun de tous ces noms étant évidemment Chelsea.
Les raisons de l'exode sont claires, et relèvent davantage de la situation financière du club que de ses ambitions sportives, s'il est possible de distinguer entre les deux. Tous les joueurs précités étaient devenus surfétatoires, encombrants et, surtout, par trop coûteux au regard de ce que le nouvel entraîneur des Blues Mauricio Pochettino entend mettre en place à Chelsea. Au vu des dépenses insensées du club depuis la prise de contrôle du club par Todd Boehly et le fond d'investissement américain Clearlake (16 joueurs sont arrivés depuis l'été 2022, pour un débours de plus de 600m d'euros brut), il était devenu indispensable de faire un peu, beaucoup d'espace dans un vestiaire devenu si exigu que, comme on le sait, certains joueurs avaient été contraints de se changer dans le couloir.
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N'Golo Kanté, titulaire et capitaine face à Liverpool

Crédit: Getty Images

L'ombre du fair-play financier de la Premier League

Dégraisser l'effectif était donc inévitable pour que Chelsea ait quelque chance que ce soit de respecter les règles du fair-play financier de la Premier League. Le tour de passe-passe comptable qui consistait à faire signer des contrats longs de sept ou huit ans à des recrues telles que Mykhailo Mudryk et Enzo Fernandez, afin de pouvoir amortir le montant de leur acquisition sur la durée totale de leur séjour présumé à Stamford Bridge, n'aurait qu'une portée toute relative au vu des sommes colossales impliquées.
Il fallait vendre, et le mieux possible. Or, presque miraculeusement, pile au bon moment, est apparu sur le marché l'acquéreur idéal: l'Arabie Saoudite, qui entend faire de son championnat, la Saudi Pro League, le référent du football asiatique, en attendant qu'un format élargi de la Coupe du monde des Clubs de la Fifa (auquel le président Gianni Infantino, président de l'instance, est des plus favorables) lui permette de devenir un authentique challenger des grands championnats européens.
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La Premier League a-t-elle peur de l'Arabie Saoudite ? "Pas encore mais…"

On a déjà expliqué ici en quoi le projet saoudien, dont l'architecte-en-chef n'est autre que le prince héritier Mohammed ben Salmane, est distinct de ce à quoi on assista en Chine dans les années 2010, en ce qu'il n'est pas seulement toléré ou approuvé, mais dirigé par les autorités saoudiennes. Qui en douterait n'a qu'à se reporter à la récente nationalisation de quatre des plus grands clubs saoudiens, devenus la propriété du fond souverain de la monarchie, le PIF, lequel contrôle aussi 80% du capital de Newcastle United.

Ceci tombe à pic pour Chelsea

Ces clubs - Al Ittihad, Al Nassr (à qui Cristiano Ronaldo est lié jusqu'en 2025), Al Hilal et Al Ahli, le champion de seconde division - disposent désormais potentiellement de moyens colossaux avec lesquels aucun club européen, pas même Manchester City, pas même le Real Madrid, ne peut rivaliser, en ce qu'Al Ittihad et les autres n'ont pas l'obligation de parvenir à quelque équilibre financier que ce soit. Ce que le championnat saoudien ne peut encore proposer sur le plan sportif, encore que son niveau actuel soit loin d'être ridicule, il peut l'offrir en dollars. En millions de dollars. En dizaines de millions, voire en centaines de millions de dollars, ce dont personne d'autre n'en est capable.
Ceci tombe à pic pour Chelsea, obligé de se séparer de pas loin d'une douzaine de ses joueurs pour équilibrer ses comptes, et qui, par la grâce des ambitions saoudiennes, peut les vendre à prix d'or, les Saoudiens devant compenser le manque d'attractivité sportive de leur ligue par un premium financier qu'ils ont largement les moyens d'offrir.
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Ronaldo liczył na więcej w pierwszym sezonie w Arabii Saudyjskiej

Crédit: Getty Images

Simple coïncidence, alors, que cette complémentarité entre un acheteur qui peut presque tout se permettre et un vendeur qui a exactement la marchandise désirée en stock, et ne demande qu'à s'en débarrasser? Elle tombe en tout cas à pic, même si Chelsea n'est pas le seul club anglais à tirer bénéfice de cette manne: Wolverhampton Wanderers va empocher 55 millions d'euros pour la vente de son maestro portugais à Al Hilal. Ruben Neves, au passage, n'a que 26 ans, et était aussi désiré par Barcelone, ce qui devrait donner matière à réflexion aux commentateurs pour qui l'Arabie Saoudite n'est qu'une Chine 2.0.

Les liens entre Clearlake et l'Arabie saoudite posent questions

Il demeure que les liens entre Chelsea et les Saoudiens paraissent aller au-delà d'une simple alliance de circonstance. De nombreux médias anglais ont insisté, non sans raison, sur les rapports privilégiés que le principal actionnaire des Blues, Clearlake, entretient avec ses interlocuteurs de Riyadh et de Jeddah.
Ceci n'est peut-être pas étranger au fait que Clearlake, comme l'avait révélé le journaliste du Daily Mail Matt Hughes en août 2022, compte le fond souverain saoudien parmi ses investisseurs. Non que Clearlake soit contrôlé par PIF; sa part de capital, de 5% au maximum, pourrait même sembler modeste. Il n'empêche que la relation entre Chelsea et son meilleur client actuel était en place avant qu'on assiste aux négociations qui se tiennent aujourd'hui, et qu'il est difficile de réprimer un certain sentiment de malaise face à cette 'coïncidence', encore que la Premier League n'y ait rien trouvé à redire lorsqu'elle donna le feu vert à la reprise du club de Roman Abramovitch.
Cette convergence d'intérêts n'en est pas moins significative, en ce qu'elle est une autre illustration des liens tous azimuts qu'a su tisser l'Arabie Saoudite dans le monde du football dans un passé récent. Ce peut être en multipliant les protocoles d'accord avec un nombre étonnant de fédérations et même d'une confédération (*) à l'approche du vote qui déterminera le pays-hôte de la Coupe du Monde de 2030. Ce peut être en se positionnant pour devenir le sponsor principal de la future Super League africaine (avec la bénédiction de Gianni Infantino). Et ce peut être en sachant à quelles portes frapper pour attirer les joueurs - pas tous dans le crépuscule de leurs carrières - appelés à transformer à terme le championnat saoudien en un acteur incontournable du football mondial. Le show ne fait que commencer.
(*) 50m€ nets d'impôt sur deux ans. Lukaku, à trente ans tout juste révolus, espère toujours pouvoir demeurer à l'Inter pour la saison 2023-24.
(*) Le dernier en date, avec la fédération mauritanienne, fut signé il y a quelques jours seulement. A relever que le président de cette fédération Ahmed Yahya, proche de Gianni Infantino, figure parmi les favoris à la succession de l'actuel président de la CAF Patrice Motsepe, lequel n'entend pas briguer de nouveau mandat à la tête de l'instance continentale africaine.
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