"Un grand champion", "Monumental" : Samuel Umtiti, deuxième vie à Lecce

"Umtiti ! Umtiti ! Umtiti ! Umtiti !". Dans les travées du Stadio Via del Mare de Lecce, scander le nom du défenseur français serait presque devenu une habitude. Samedi dernier, encore, face à l'AC Milan (2-2), les tifosi du promu n'ont eu d'yeux que pour "Big Sam", qui semble enfin redevenir un joueur de football. Après un début de saison consacré à sa remise en forme, ce qui lui a fait manquer plusieurs journées, Umtiti ne cesse de monter en puissance sur le terrain, où il retrouve ses repères et ses sensations au fil des matches.

Lors des dix dernières journée de Serie A, le défenseur de 29 ans, prêté par le Barça, en a disputé huit, dont sept titularisations. Il vient même d'en enchaîner trois en dix jours (Lazio, Spezia et Milan). C'est peut-être un détail pour vous mais, pour lui, ça veut vraiment dire beaucoup. Comme si son cauchemar des dernières saisons prenait fin. Il suffit de rappeler que depuis son titre de champion du monde avec l'équipe de France en 2018, Umtiti n'avait disputé que 41 matches de Liga avec le FC Barcelone.

Enchaîner, c'est bien. Mais le faire en étant bon, c'est encore mieux. Depuis la fin de la trêve internationale liée au Mondial au Qatar, qui a notamment permis au natif de Yaoundé de peaufiner sa préparation, l'ancien Lyonnais impressionne. Sa moyenne de notes dans La Gazzetta dello Sport va dans ce sens : 7,5 face à la Lazio (4 janvier), 6,5 face à Spezia (8 janvier) et 6,5 contre Milan (14 janvier). Le tout pour un total depuis le début de saison de 6,43.

"Il s'améliore de match en match, précis dans les passes, leader dans la voix. Il commence à être fondamental", écrivait le quotidien le 9 janvier dernier. S'il garde les pieds sur terre et estime que le chemin est encore long avant de pouvoir crier victoire, son club savoure les performances de son défenseur. "Il est en train de redevenir le grand champion que le monde connaissait", s'est félicité Corry Liguori, vice-président des Giallorossi. "Ce n'était pas une simple opération de marketing, on avait vérifié sa condition physique avant de le faire signer l'été dernier, a confié le président du club Sticchi Damiani à l'émission "Tutti Convocati" début janvier. Il payait les choix du Barça après sa blessure et il s'est remis sur pied. La pause hivernale lui a fait du bien, on le revoit dans sa forme d'antan. Pour lui, Lecce était le bon club pour se relancer."

Ancien gardien du club, l'ex-international italien Marco Amelia semble également sous le charme du numéro 93. "Son expérience rassure tout le monde, confiait-il au Corriere dello Sport la semaine dernière. Il a changé de pays, de langue et de championnat. En quelques mois, c'est déjà un leader. Dans le vestiaire, l'attitude peut faire la différence : celui qui a joué au très haut niveau sait affronter des situations délicates. C'est normal que ses coéquipiers moins expérimentés fassent de lui un exemple."

Et ce n'est certainement pas anodin si Lecce possède, avec vingt buts encaissés, la cinquième meilleure défense du championnat, à égalité avec l'AC Milan et l'Atalanta Bergame. "Il apporte tout son savoir-faire à l'équipe et n'hésite pas à guider sa défense, c'est un vrai leader pour nous, tant sur le terrain qu'en dehors", estime Marco Baroni, son entraîneur. Dans la ville des Pouilles, la folie Umtiti se ressent partout. Son numéro 93 fait partie des maillots les plus vendus. "C'est l'un des joueurs les plus forts que le club a connu, peut-on lire sur le site spécialisé CalcioLecce. Depuis la reprise, il a disputé trois matches parfaits (...) Contre l'AC Milan, il a été monumental."

Entre-temps, malheureusement, Umtiti a dû également faire face à un premier épisode de racisme lors de la 16e journée et la réception de la Lazio Rome. D'après les médias italiens, le défenseur français a d'ailleurs terminé le match en larmes, consolé par ses coéquipiers et dirigeants. Mais aussi par ses tifosi, qui ont rapidement réagi pour le soutenir. Des "Umtiti, Umtiti, Umtiti" ont ainsi jailli des tribunes en défense du champion du monde 2018, qui a terminé la rencontre sans broncher. Et en patron. "Dominant au marquage et dans les anticipations. Il répond avec un caractère de champion du monde à des chants honteux", rapportait la Gazzetta le lendemain, n'hésitant pas à l'élire homme du match.

"Les chants racistes ont été submergés par les encouragements. Le peuple jaune et rouge s’est mis à hurler un seul nom : Samuel Umtiti", publiait l’US Lecce sur Twitter. "Lorsque l'arbitre a arrêté le match, attendant que le speaker appelle à la fin des chants racistes, Umtiti a demandé la reprise de la rencontre, car il voulait répondre aux insultes reçues sur le terrain. Il a réagi comme un vrai champion. C'était beau de voir nos fans chanter le nom d'Umtiti et étouffer ces horribles hurlements. C'était une réponse civile et intelligente", saluait Saverio Sticchi Damiani. "Il est temps d'en finir avec tout ça (…) Ce sont des comportements honteux. Nous sommes fiers de (Lameck) Banda, (Samuel) Umtiti et (Assan) Ceesay (autre joueur noir de l’équipe, ndlr)", réagissait son entraîneur.

Une prise de position générale qui a touché l'intéressé. Heureux à Lecce, où il se sent enfin aimé et apprécié, tout l'inverse de ces dernières années à Barcelone, on le décrit comme "épanoui" et "souriant". Dans ce contexte paisible et familial, sans pression majeure, Umtiti est parvenu à redonner une direction à une carrière qui n'en avait plus. "Big Sam" est bel et bien de retour.