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Spielberg : 5 grands prix d'Autriche mémorables

Stéphane Vrignaud

Mis à jour 19/07/2014 à 10:47 GMT+2

Spielberg a accueilli son premier GP d'Autriche en 1970. Voici quelques souvenirs parmi les 25 éditions disputées sur l'Österreichring et sa version écourtée.

Michael Schumacher et Rubens Barrichello (Ferrari) sur le podium du Grand Prix d'Autriche 2002

Crédit: AFP

1971 : le sacre de Stewart

Après une expérience désastreuse à Zeltweg, sur un aéroport militaire, en 1964, Spielberg a conquis les pilotes en 1970. Niché dans les montagnes de Styrie, l'Österreichring se dévale en quatrième vitesse… au minimum, et la courbe Bosh se négocie à fond de 5 sans erreur possible. Non, le tracé n'est pas un modèle de sécurité...
Dans cet hymne absolu au pilotage intrépide, si ce n'est inconscient, l'Autriche invite donc les plus grands. Et en cette année 1971, Jackie Stewart a l'occasion de succéder à l'Autrichien Jochen Rindt, champion du monde en titre, sacré à titre posthume. Le Britannique compte 51 points contre 19 à Jacky Ickx et 17 à Ronnie Peterson (March).
Aux essais, l'Ecossais de Tyrrell, déjà couronné en 1969, s'est incliné face à Jo Siffert (BRM) pour la pole position, et au premier tour l'ordre est identique. Victime de sous-virage à cause d'un choix de pneus avant erroné, Stewart doit laisser filer "Seppi", et bientôt son coéquipier, François Cevert.
Au 32e tour, l'horizon se dégage : Ickx, déjà en retrait, vient d'abandonner. Mais quatre tours plus tard, Stewart est à pied : l'axe de la roue arrière gauche de sa Tyrrell a cassé et l'a envoyé dans le décor. Mais Ronnie Peterson (March) ne s'autorise pas de le priver de son rêve. Anonyme huitième à un tour, le Suédois rend lui aussi les armes. Stewart peut savourer sa nouvelle gloire, seul pilote encore titré à ce jour en terre autrichienne.

1975 : Le fantasque Brambilla

Vittorio Brambilla a placé sa March en pole position au Grand Prix de Suède, en milieu de saison, mais pour le reste, il brille rarement dans des circonstances normales. Quoi de mieux, donc, que cette pluie qui noie cette édition autrichienne 1975, pour se refaire une réputation ? Sur la grille, il est huitième mais il s'installe vite derrière Niki Lauda (Ferrari) et James Hunt (Hesketh). Avant de prendre les commandes au 19e passage, en surprenant le Britannique à l'entrée de la courbe Bosh. "Le gorille de Monza" n'a pas froid aux yeux quand d'autres craignent pour leur vie comme Jacques Laffite, qui a préféré stopper. "Je faisais de l'aquaplanage à 150km/h en pleine ligne droite. La voiture faisait des écarts de trois à quatre mètres. On ne pouvait pas suivre une voiture à moins de cent mètres", justifie le Français. Compréhensible, sauf pour son employeur Frank Williams, qui ne lui pardonnera pas.
Brambilla fonce donc, toujours et encore, jusqu'à l'arrêt prématuré mais raisonnable de l'épreuve, au 29e tour. La course n'a pas atteint les trois quarts de la distance totale prévue, la moitié des points distribués empêchent donc Lauda d'être champion du monde. Mais le festival Brambilla n'est pas fini, puisqu'il a reçu le drapeau à damier en tête-à-queue... Fou de joie, il saluait frénétiquement le public quand sa machine lui a échappé. Et c'est l'avant sérieusement rectifié contre un rail, il poursuit son tour d'honneur.
On croit les pilotes sauvés de cet enfer mais le lendemain est un jour de tristesse : Mark Donohue (March), accidenté aux essais, n'a pas survécu à ses blessures.

1982 : De Angelis et Rosberg sprintent

Cette édition survient une semaine après le terrible accident de Didier Pironi (Ferrari), qui s'est broyé les jambes à Hockenheim en décollant sur la Renault d'Alain Prost. Pironi est encore leader du Championnat du monde mais il n'est pas réaliste de le voir tenir cette position à l'issue des quatre Grands Prix encore au calendrier. John Watson (Mclaren), Keke Rosberg (Williams), Alain Prost (Renault) et Niki Lauda (Mclaren) sont autant de champions en puissance, sans que l'un d'eux n'allie vitesse et fiabilité.
Au départ, personne ne fait vraiment attention à Elio de Angelis, qualifié septième… Au 13e passage, Patrese mène devant Piquet, Prost, Arnoux, De Angelis à 38", Rosberg à 50". Arnoux abandonne (16e tour - turbo), tout comme Patrese (28e tour - moteur), Piquet (32e - électricité) et Prost (49e - alimentation). De Angelis et Rosberg se disputent soudain la victoire. A l'attaque du dernier tour, l'Italien compte 1"6 d'avance sur le Finlandais, qui prend tous les risques. Dans la dernière courbe, la Lotus sprinte, la Williams déboîte jusqu'à sa hauteur. Enfin, pas tout à fait puisque De Angelis conserve un capot et 0"050 d'avance pour signer sa première victoire en Formule 1.
Cette arrivée est la quatrième plus serrée de l'histoire des grands prix après le Grand Prix d'Italie 1971 (0"010 entre Gethin et Peterson), le Grand Prix des Etats-Unis d'Amérique 2002 (0"011 entre Barrichello et Schumacher) et le Grand Prix d'Espagne 1986 (0"014 entre Senna et Mansell).
En 1986, Ayrton Senna et Nigel Mansell livreront une arrivée similaire à Jerez de la Frontera, pour le même résultat au profit de la Lotus sur la Williams.
picture

Elio de Angelis (Lotus) l'emporte devant Keke Rosberg (Williams) au Grand Prix d'Autriche 1982

Crédit: Eurosport

1987 : Un chevreuil décapité, deux carambolages et trois départs

Cette édition va condamner le fabuleux Österreichring, considéré alors comme le plus beau circuit du monde ; intimidant, peu rassurant et pour tout dire dangereux aussi. En essais libres 1, c'est tout d'abord l'accident de Stefan Johansson (McLaren) qui remet les questions sécuritaires dans les esprits. En arrivant au sommet d'une bosse en aveugle, le Suédois a décapité un chevreuil à presque 300km/h, et fini sa course brutalement dans un rail…
Si la suite des essais se déroule normalement (un accrochage Fabre/Piquet à signaler quand même), le lancement de l'épreuve est encore plus chaotique. Au départ, Martin Brundle devient le passager de sa Zakspeed - mécaniquement défaillante - dans la montée vers le virage n°1, il oblique vers le mur et rebondit au milieu du peloton… Six voitures restent sur le carreau. On redonne donc un départ, et cette fois, c'est Nigel Mansell (Williams) qui part laborieusement, obligeant la seconde moitié du paquet à des contorsions. La piste est trop étroite (9 mètres contre généralement 20) pour donner de la place et chacun et c'est une nouvelle partie de flipper… Dix voitures sont transformées en épaves. Ce constat sonnera le glas du circuit, d'autant qu'avec 85.000 spectateurs sur les trois jours, l'échec est aussi commercial.
Au troisième départ - le bon ! - le poleman Nelson Piquet, leader du Championnat, file. Mais au 21e tour, il voit son coéquipier Nigel Mansell jouer bien mieux que lui avec le trafic. A 235km/h de moyenne, le moustachu le plus célèbre de l'île de Man l'emporte mais il n'est pas au bout de ses émotions. Il s'était péniblement qualifié au lendemain d'une douloureuse extraction de dent de sagesse. Là, dans le pick-up qui l'amène au podium en compagnie de Nelson Piquet et Teo Fabi, il ne remarque pas une poutre à hauteur de tête et s'assomme presque. C'est maugréant qu'il écoute le God Save The Queen et avec une poche de glace rivée au crâne qu'il livre ses impressions en conférence de presse. Une fois de plus, il n'a pas manqué de faire rire son détracteur attitré Nelson Piquet.

2002 : Rouges de honte

A l'arrivée, la foule conspue Ferrari, les pouces sont pointés vers le bas et les casquettes à l'effigie du "vainqueur" Michael Schumacher volent de rage. Rubens Barrichello a eu la main sur toute la course mais il a freiné devant la ligne au 71e et dernier tour. Le Brésilien a cédé, pressé par Jean Todt - relayé à la radio par Ross Brawn- d'offrir sa victoire à son chef de file allemand, et "de penser à son contrat".
Pour le public, l'incompréhension est totale, l'esprit du sport foulé aux pied : "Schumi" a gagné quatre des cinq premières courses, la F2002 est irrésistible et personne ne voit ce qui pourrait l'empêcher d'être champion.
Jean Todt sait une chose : les consignes ne sont pas formellement interdites, et c'est le problème de la FIA et de Bernie Ecclestone, le promoteur du sport. "L'important est d'avoir la conscience tranquille, d'avoir bien travaillé pour l'entreprise et d'avoir pris une décision qui semble être logique pour l'entreprise. Même si ce n'est pas la plus populaire", martèle le manager français. "J'ai été désolé mais j'approuve et je partage le choix qui a été fait car les comptes se font à la fin de l'année", renchérit Luca di Montezemolo, le président de Ferrari, qui ajoute : "De temps en temps, la raison et les résultats doivent l'emporter sur les sentiments. C'était la décision juste".
Le lendemain, l'indignation est unanime dans la presse allemande, qui dénonce la victoire de son compatriote en titrant "Scandale", "Honte", "Escroquerie". L'Abendzeitung évoque "la victoire la plus laide de Schumi"… En Italie, une société de paris décide même de payer Rubens Barrichello vainqueur.
"Les consignes d'équipe font partie du sport automobile", concède Max Mosley, président de la FIA, qui confie "avoir reçu plus de faxes du monde entier qu'à la mort de Senna." L'émoi est planétaire. Mais en bon avocat, le Britannique va frapper au portefeuille puisque Schumacher a maladroitement poussé Barrichello sur la plus haute marche du podium. Pour cette infraction au protocole, Ferrari recevra une amende d'un million de dollars.
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