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La F1 aux Etats-Unis : des échecs multiples

Eurosport
ParEurosport

Mis à jour 16/11/2012 à 22:31 GMT+1

De l’expérience désastreuse de Michael Andretti au fiasco d’Indianapolis en passant par l’incapacité à lancer une écurie du cru, retour sur quelques rendez-vous manqués des Etats-Unis avec la Formule 1.

2005 GP des Etats-Unis Public

Crédit: AFP

Michael Andretti

La plus grosse erreur de casting de l’histoire de l’écurie McLaren. Impressionné par l’aura de l’IndyCar et de son champion 1991, Michael Andretti, Ron Dennis n’avait pas prêté attention aux essais privés décevants menés par l’Etasunien avant de le titulariser en 1993. De son côté, le fils du champion du monde1978, Mario Andretti, n’avait pas compris que la F1 avait changé d’époque depuis longtemps, que l’Indycar n’avais jamais été, de près ou de loin, une réplique locale de la Formule 1. Michael Andretti commet une première erreur en ne s’installant pas en Europe. Non seulement il prend le premier avion pour rentrer après chaque course, mais il zappe les séances d’essais fondamentales à l’apprentissage de son nouveau métier. Son bagage technique est faible et la McLaren se convertit à marche forcée au tout-électronique. La suspension active, notamment, est complexe à développer.
Pas très affûté non plus physiquement, le Yankee finit d’exploser face à son coéquipier, le triple champion du monde et star des circuits, Ayrton Senna. Il prend en moyenne 1"3 dans la vue en qualif et totalise quatre tours sur l’ensemble de ses trois premières courses, ponctuées par des crashs violents. Il ne finit que six courses, aucune dans le même tour que le vainqueur, alors que Senna gagne. Il annonce son intention de retourner aux Etats-Unis en 1994 et Ron Dennis prend immédiatement la décision de le remercier. Il s’en va au soir du GP d’Italie, conclut sur un podium, son meilleur résultat en grand prix. Son remplaçant, Mika Häkkinen, battra Ayrton Senna en qualif dès son premier gp, au Portugal.
Indianapolis

L’ovale de vitesse le plus connu du monde s’était construit une histoire avec la Formule 1 dans la désaffection de 1950 à 1960 : seuls les pilotes locaux courraient cette épreuve comptant pourtant pour le Mondial. Sortie du calendrier, l’anneau de l’Indiana avait pourtant gardé un pouvoir d’attraction : sur la route du titre suprême en 1965, Jim Clark (Lotus) avait fait l’impasse sur le GP de Monaco pour inscrire les fameux 500 miles à son tableau de chasse. L’année suivante, Graham Hill (BRM) avait succombé avec le même bonheur.
Après les expériences sans lendemain de Sebring (1959) et Riverside (1960), Watkins Glen conquit véritablement les pilotes et le cœur européen du paddock, de 1961 à 1980, avant que les Etats-Unis d’Amérique ne retombent dans le travers des circuits artificiels : les rues de Long Beach, Detroit, Las Vegas, Dallas et Phoenix sont à des années-lumière de l’écrin monégasque.
Lorsqu’Indianapolis revient à l’agenda, en 2000, l’optimisme prévaut. Le circuit emprunte l’anneau en sens inverse et se déploie sur une nouvelle portion : l’Infield. Hormis l’ambiance qui y règne, les pilotes sont sévères : ils voient surtout une addition des deux demi-pistes avec leurs niveaux de grip différents et juge l’Infield sans intérêt. Et puis, les circonstances s’acharnent vite. Si l’édition 2000 est un énorme succès populaire, celle de 2001 est dominée par la tragédie du 11-septembre. En 2002, l’engouement n’est déjà plus le même et Michael Schumacher, champion depuis deux mois et leader dans l’ennui, ralentit juste avant l’arrivée pour essayer de terminer, "en parade pour faire joli", à égalité avec son coéquipier de Ferrari, Rubens Barrichello... Le public est venu voir de la bagarre et quitte le circuit dans un abime de perplexité.
En 2005, c’est bien pire : l’épreuve est une farce à six protagonistes. Aux essais, la Toyota de Ralf Schumacher a fini dans un mur suite à l’éclatement d’un pneu en surchauffe et Ricardo Zonta a stoppé avant la catastrophe. Michelin ne peut garantir que ses gommes tiendront toute la course (un set pour le gp cette année-là) et ses équipes partenaires s’entendent pour rentrer leurs voitures à la fin du tour de formation. Le public est réduit à regarder les égoïstes procéduriers de Ferrari, Jordan et Minardi accomplir leurs pathétiques tours de manège dans une rage impossible à contenir. Le message "I want my money back !" est un moindre mal quand, ailleurs, une canette vole sur la piste. A la sortie du circuit, les représentants de Michelin ont troqué leurs chemises bleues et jaunes contre des tenues de ville plus discrètes. L’épreuve sera courue deux fois encore avant de disparaître.
AAR et Penske
Voilà deux écuries qui auraient pu s’inscrire dans la durée et s’avérer un tremplin pour les pilotes d’outre-Atlantique. En 1966, Dan Gurney choisit de poursuivre sa carrière en F1 en créant AAR (All American Racers ou Anglo American Racers). C’est la belle époque, le temps du GP des Etats-Unis sur le superbe circuit de Watkins Glen et de la magnifique Eagle bleutée. En 1967, le triomphe de Mexico n’empêche pas des lendemains trésoriers qui déchantent. L’adroit pilote étasunien n’a ni le talent ni l’entourage d’un Bruce McLaren ou d’un Jack Brabham pour pérenniser son entreprise, qui disparaît début 1968.
Fondée avec les mêmes espoirs, l’aventure Penske aura duré à peine plus longtemps. Après des saisons d’apprentissage, le team connu pour ses succès en CanAm et en Endurance, et plus tard en IndyCar, obtient la récompense ultime à l’arrivée du GP d’Autriche 1976, avec le Britannique John Watson. Si elle a des atouts techniques, l’entreprise de Roger Penske souffre de la perte de son sponsor titre. Elle n’aura pas de quoi repartir en 1978.
Ford

Mike Costin et Keith Duckworth ont révolutionné le monde des grands prix en introduisant leur V8, en 1967. Financé par Ford, leur Cosworth a été incontournable pendant une quinzaine d’année, fournissant à de multiples équipes la performance et la fiabilité dont elles avaient besoin. Cependant, ce bloc atmosphérique ne résistera pas à la montée en puissance du turbo au début des années 80, et sa déclinaison suralimentée ne sera jamais à la hauteur des Renault, Honda et autres Ferrari. L’abolition des turbo en 1989 permet au propulseur anglo-américain de jouer à nouveau les premiers rôles avec Benetton (et McLaren en 1993), jusqu’au titre de Michael Schumacher en 1994. Les grands motoristes ayant repris le dessus, Cosworth devient le partenaire d’équipes de deuxièmes et troisième zones, non sans connaître quelques succès épisodiques, le dernier des 176 étant celui de Giancarlo Fisichella (Jordan), au Brésil en 2003. La saison 2013 sera la dernière de la petite entité Cosworth, victime de son indépendance et incapable de financer l’étude du turbo 1.6 de rigueur à partir de 2014.
Il faut regretter que cette glorieuse histoire n’ait pas convaincu Ford de franchir le pas pour s’affirmer comme constructeur. La firme de Detroit s’est toujours satisfaite de la publicité autour de l’épopée Cosworth. En 1997, elle aurait pu apposer son nom sur les bolides de Jackie Stewart et a jugé préférable de racheter l’équipe, victorieuse d’une course en 1999, pour la renommer Jaguar, une filiale, à partir de 2000. Sans véritable stratégie ni moyens à mettre sur la Formule 1, les dirigeants américains de Ford ont tout vendu à Red Bull.
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1999 GP de Belgique Stewart Barrichello

Crédit: AFP

Scott Speed
Par manque de maturité, le Californien n’a pas su saisir la formidable opportunité que lui a offerte Red Bull de parvenir au sommet de la pyramide. En 2002, il en est l’un des lauréats de l’opération de détection que Red Bull mène aux Etats-Unis sous la houlette d’un ancien pilote US, Danny Sullivan. La marque de boisson énergisante cherche une tête d’affiche américaine et Colin Flemming fait aussi partie des espoirs. Scott Speed sort du lot, mais ne développe pas une approche suffisamment professionnelle. Son arrogance ajoutée à sa naïveté n’arrange rien et Helmut Marko, qui gère la filière, fait l’erreur de le propulser trop vite en F1. Une année de GP2, en 2005, et une pole position sont un bien maigre bagage pour arriver aguerri en F1, dans la nouvellement nommée Toro Rosso, sur les vestiges suffocants de Minardi. Les fautes de débutant se succèdent autant que les rodomontades. Au GP d’Europe, le pilote ne tient pas compte de la mise en garde de l’équipe sous l’orage et finit illico dans un bac à graviers. De retour au stand, il se fait cramponner par Marko et finalement virer. Au bout du compte, Red Bull voulait un pilote US mais ne s’en est pas complètement donné les moyens. Il aurait fallu répéter l’opération de détection pendant plusieurs années aux Etats-Unis pour trouver le Vettel américain.
US F1
Les Etats-Unis auraient dû avoir ce week-end une écurie en piste. Mais US F1, admise à participer au championnat à partir de 2010, n’a jamais su ni pu construire une monoplace aux standards de la F1, malgré l’expérience de son chef de projet technique, Ken Anderson, un ancien de Ligier. "Les racines des grands prix et des écuries sont en Europe et pas ailleurs", rappelle le champion du monde américain de 1978, Mario Andretti, dans la dernière édition du magazine de notre partenaire F1i. "Le gros souci, c’était le positionnement : leur usine était à Charlotte (ndlr : en Caroline du Nord). C’était trop loin du monde de la F1", confirme Arnaud Rémy, rédacteur en chef de us-racing.com. Les conseils de Peter Windsor, ex-directeur sportif de Williams, n’y feront rien.
"Ils ont démarré avec un mode NASCAR ou IndyCar ; de l’ancienne école qui ne pouvait pas fonctionner à l’échelle de la F1", estime Arnaud Rémy. "En NASCAR ou en IndyCar, il n’y a pas de gens aussi pointus. Ce sont des gens un peu comme tout le monde. La F1, c’est l’élitisme. US F1 a voulu faire une écurie américaine, à l’américaine. En F1, c’est impossible de bien faire sans recruter dans le monde de la F1". Sa vision centrée sur les Etats-Unis, US F1 avait aussi annoncé vouloir engager deux pilotes américains. Aucun ne présentait la garantie de pouvoir satisfaire les 107% requis en qualif et José Maria Lopez, un Argentin fougueux ayant couru une saison en F3000 et deux en GP2 sans convaincre, avait été engagé.
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