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Quand la F1 se cherche : 7 ans d'expérimentations hasardeuses et de bides

Stéphane Vrignaud

Mis à jour 22/10/2021 à 15:52 GMT+2

FORMULE 1 - Après un "sprint" pauvre en spectacle le samedi de Monza, Toto Wolff avait appelé le promoteur du championnat du monde à arrêter de "faire du freestyle" avec les formats de course. Mais ce n'est pas d'hier que le détenteur des droits de la F1 ou même une FIA mal inspirée tentent des choses maladroites. La preuve avec quelques exemples des sept dernières années.

Max Verstappen (Red Bull) derrière Valtteri Bottas (Mercedes) lors de la course sprint du Grand Prix d'Italie, le 11 septembre 2021

Crédit: Getty Images

2014 : Les points doublés

Le promoteur du Championnat du monde, Bernie Ecclestone, voyait ça comme l'assurance de faire vivre le suspense jusqu'au bout et décerner le titre de champion du monde des pilotes à la dernière course. A l'origine, il voulait même doubler les points attribués aux dix premiers pour les trois dernières épreuves du calendrier.
Avec la complicité de la FIA, l'Anglais avait instauré cet artifice sans rien en dire avant sa promulgation au règlement. Mais l'effet de surprise passé, la grande majorité des pilotes et du paddock s'est liguée contre cette règle.
C'était arbitraire, déloyal, et "Mister E" l'avait compris depuis un moment lorsqu'il a acté la fin de cette mesure avant même de l'avoir expérimentée. Pour rien heureusement. A Abou Dabi, Lewis Hamilton a remporté le titre par K.-O. face à Nico Rosberg et de 17 points, son avance a bondi à 67 unités à l'arrivée. Une conclusion ridicule quand on sait qu'il n'y avait jamais eu plus de 29 points d'écart entre les as de Mercedes.
Nico Rosberg et Lewis Hamilton (Mercedes) au départ du Grand Prix d'Abou Dabi 2014

2016 : Le jeu des chaises musicales en qualification

Ce n'était pas faute d'avoir été prévenue, mais la FIA était restée muette aux avertissements des équipes qui avaient simulé le désastre sur ordinateur. L'idée, encore une fois présentée tardivement, était de mettre en permanence tous les pilotes en danger pendant les trois parties de qualification à travers un écrémage en "live".
Après 6 minutes de roulage en Q1, le coup d'envoi de la nouvelle formule est donné : un concurrent est éliminé toutes les 90 secondes. Mais on s'aperçoit vite que les équipes connaissaient le potentiel de leurs machines et anticipent leurs éliminations avant même le gong. On touche le fond en Q3 : piste déserte pour les quatre dernières minutes, la grille est figée, faute de combattant.
Le pire dans tout ça ? Faute d'accord unanime entre les équipes, le système est reconduit à l'épreuve suivante avant le retour à l'ancien système.

2016 : Le pilote du jour

Pas branché réseaux sociaux, Bernie Ecclestone a cautionné sur le tard la création du titre de "pilote du jour". Dans le but de désigner le pilote le plus méritant du jour, que le vainqueur aurait injustement éclipsé. Une intention louable malheureusement souvent remise en question par la crédibilité du résultat du vote en direct des fans.
On s'en rend compte au fil de la saison, c'est comme s'il fallait faire plaisir à tout le monde. Dernier résultat en date sidérant : l'élection de Sergio Pérez (Red Bull), huitième à un tour du vainqueur, son coéquipier Max Verstappen, à Zandvoort.

2018 : L'horaire des départs

Démarrer à 14h les courses européennes était une tradition, et au-delà une mesure pratique. Désireux de tout remettre à plat, dans le but d'accroître les audiences TV sur le continent américain principalement, le nouveau détenteur des droits décale le coup d'envoi à 15h, et même 15h10 pour permettre aux chaînes d'envoyer une dernière fois des pubs.
15h10, c'est à cinq minutes près l'heure d'arrivée d'un Grand Prix d'Italie... Et rapidement, les équipes appellent à un retour à 14h car leurs personnels démontent leurs monoplaces et les installations dans les garages encore plus tardivement. Des délais d'autant plus pénibles que le premier "triple header" - trois week-ends de course de suite - de l'histoire apparaît au calendrier. Au milieu de doublettes de plus en plus nombreuses.
En 2021, sous la pression des équipes, l'horaire des départs sur le Vieux continent revient à… 15h.

2020 : Le Grand Prix sur deux jours

Imola restera un "one shot" qu'il fallait tenter pour en montrer les limites. Ce n'est pas ce que la F1 a expérimenté de plus stupide, loin de là, mais c'est bien le deal "perdant-perdant" que l'on pouvait redouter.
La journée du vendredi 30 octobre effacée du programme du Grand Prix d'Emilie-Romagne au profit d'un samedi normal (une séance d'essais libres + la qualification) et d'un dimanche standard, il en ressort l'impression d'une épreuve bâclée. Seules les équipes sur place, déjà bien fatiguées par un calendrier infernal, ont pu y trouver leur compte en gagnant une journée de repos. Pour le reste, les pilotes qui n'ont pu régler correctement leurs voitures le samedi matin ne s'en sont jamais remis.
Pour le public, les médias, les invités des équipes, c'est une impression d'inachevé qui domine. Et pour le promoteur de la F1, la certitude qu'il faut aller dans l'autre sens.
Pierre Gasly et des membres d'AlphaTauri avant le Grand Prix d'Emilie Romagne 2020

2020 : Le classement du pilote le plus rapide de tous les temps

Triturer les résultats pour leur faire dire quelque chose, au risque que ce soit n'importe quoi, c'est manifestement la mission que s'est donnée la F1. Poussée peut-être aussi par l'envie de faire de la publicité à son partenaire informatique officiel, à l'occasion des 70 ans du Championnat du monde. Pour un tel anniversaire, il fallait frapper fort…
L'ambition tutoie les frontières du possible, puisque l'étude en question se fait forte de désigner "le pilote le plus rapide de tous les temps". Un titre ultime, ronflant, décerné sur la base de toutes les datas du sport depuis 1983…
Il en ressort donc qu'Ayrton Senna est le plus rapide sur le tour chrono, pas une surprise en soi. Qu'il colle 0"114 à son second, Michael Schumacher, et 0"275 - un écart à peine croyable - à Lewis Hamilton.
La suite rend plus perplexe puisque Sebastian Vettel encaisse en moyenne 0"435. Et le doute n'est plus permis lorsqu'on voit apparaître Heikki Kovalainen au huitième rang, et Jarno Trulli, au neuvième.
Le pompon ? La 20e place d'Alain Prost, derrière Giancarlo Fisichella, et l'absence disqualifiante pour cette étude "objective" de Jim Clark, dont on n'a pas pris en compte les résultats stratosphériques.
"Je ne pense pas que les gens en rient", affirme Ross Brawn, le directeur sportif de la F1. Il le faut pourtant, plutôt que d'en pleurer.

2021 : Les courses "sprints"

Ross Brawn a abandonné son idée de grille inversée visant à mettre les courses sens dessus-dessous, mais il n'a pas dit son dernier mot. Son but reste de créer un temps fort pour chacun des trois jours de Grand Prix. Silverstone inaugure donc un nouveau format, avec qualification le vendredi et course sprint le samedi.
Le directeur sportif de la F1 a promis un condensé de spectacle sur les 17 tours, qui s'avèrent soporifiques. Sorti du show Alonso au départ, plus rien ne se passe dans le top 4 après le premier tour, et le top 10 est figé après le 8e... Ce n'est toutefois rien à côté du fiasco de Monza.
Sao Paulo sauvera-t-il le concept ? Réponse le 13 novembre.
Pierre Gasly (AlphaTauri) au Grand Prix d'Italie 2021

2021 : Le naming des Grand Prix

C'est un fait, seulement cinq des dix écuries du plateau incluent le nom d'un sponsor ou d'un partenaire dans l'appellation commerciale de leur équipe. En Formule 1, le naming ne prend pas vraiment et même le boss de McLaren, Zak Brown, un spécialiste de la valorisation des sponsors, en a tiré cette conclusion.
En revanche, les épreuves n'ont pas dit leur dernier mot, et elles sont même prêtes à tout à en croire les promoteurs de la manche italienne d'Imola. Qui désignent leur épreuve "Grand Prix Pirelli de Formule 1 du made in Italie et de l'Emilie-Romagne"… Fourre-tout, indigeste, et unique on l'espère.
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