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"MotoGP Unlimited", captivant, moins frileux et plus authentique que "Drive to survive"

Stéphane Vrignaud

Publié 14/03/2022 à 00:13 GMT+1

MOTOGP - C'est peu dire que "MotoGP Unlimited" était attendu au tournant, pour donner la réplique à "Drive to survive", la série documentaire sur la Formule 1 lancée en 2019. Tout au long de ses huit épisodes, la série de l'élite de la vitesse sur deux roues fait bien mieux que ça à travers ses choix éditoriaux qui la démarquent sans trop en faire…

Francesco Bagnaia (Team Ducati) et Fabio Quartararo (Yamaha MotoGP) lors de la présention du championnat, le 3 mars 2022 à Losail

Crédit: Getty Images

Attention : cet article dévoile une partie des intrigues figurant dans la saison 1 de "MotoGP Unlimited", accessible à partir de ce lundi 14 mars en France sur Amazon Prime Video. Si vous ne souhaitez pas les découvrir avant d'avoir regardé la série, cliquez-ci.
La moto avait doublé la Formule 1 en organisant son premier championnat du monde un an avant sa rivale, en 1949. Elle n'a par la suite pas manqué de prendre les devants en instaurant par exemple la première course en nuit, en 2008 à Losail. Mais elle s'est fait prendre de vitesse dans la course au recrutement de nouveaux fans en voyant la série sur quatre roues "Drive To Survive" débarquer sur Netflix, en 2019. La notoriété de la MotoGP était sans doute beaucoup trop centrée autour d'un Valentino Rossi vieillissant, et le promoteur du championnat, la Dorna, ronronnait, dépourvu d'imagination, voire incapable d'appréhender l'ère post-VR46.
Fabio Quartararo (Yamaha) sur le podium du Grand Prix d'Emilie-Romagne après son titre, le 24 octobre 2021
Elle en a sans doute payé le prix fort au plan médiatique en ne réalisant pas que la Formule 1 venait de passer sous pavillon américain en 2017. L'ambition et les moyens qui l'accompagnaient étaient pourtant clairs. Ils annonçaient la conquête de nouveaux territoires et un élargissement de l'audience au-delà des initiés et fans hardcore. Le coup fut rude pour la Dorna et la pandémie sanitaire de 2020 n'a fait que retarder son projet de feuilleton autour de ses héros, admirés de tous et spécialement respectés par leurs collègues de la F1.

Chronologie, pédagogie

Nous étions évidemment impatients de voir dans quel prisme la Dorna nous offrirait de revivre la saison 2021, quel point de vue elle adopterait, et dans quelle mesure "MotoGP Unlimited" échapperait à la comparaison avec "Drive To Survive", pour créer sa propre patte afin de ne pas être systématiquement ramené à une version deux-roues de la série pionnière.
Le résultat est une réussite et les curieux prêts à découvrir un nouvel univers vont s'y retrouver autant que les passionnés de la première heure. La série dont la réalisation a été confiée à Amazon Prime Video prend le parti de dérouler l'action de façon chronologique, de sorte de faciliter la lecture des événements et donner une idée de progression à l'histoire mouvementée de ce championnat du monde 2021 auquel le public français a été spécialement sensible avec le titre de Fabio Quartararo. Soucieuse de pédagogie, elle nous rappelle même que l'auteur du meilleur tour en qualification s'élance en tête de grille le dimanche…
La première séquence donne le ton des huit parties de 50 minutes en nous emmenant dans l'intimité de Marc Marquez, sur un terrain d'entraînement de motocross où les efforts impossibles à soutenir le persuadent qu'il ne retrouvera sa forme physique qu'à la fin d'une saison qui n'a pas encore débuté… L'Espagnol est un colosse aux pieds d'argile, loin de ses six titres mondiaux élite. De tout le paddock, il est sûrement celui qui revient de plus loin mais son compatriote Maverick Vinales ne va pas tarder à devenir l'inattendu personnage central de cette saison 1.
Maverick Viñales mis à pied par Yamaha au Grand Prix d'Autriche 2022

Vinales se saborde

On sait le natif de Figueras friable, et il ne tarde pas à le devenir après sa victoire en ouverture du Mondial. Le reste est un condensé de ce qu'un pilote peut vivre dans une carrière, dans les limites du raisonnable qu'il dépasse à cause d'une frustration récurrente. La scène entrevue dans le trailer, lors de laquelle il prend à partie son directeur Lin Jarvis dans le garage Yamaha, au milieu de toute l'équipe, est proprement hallucinante. Submergé par la vitesse de Fabio Quartararo, il accuse l'équipe d'avoir saboté sa machine. Du Biaggi en perdition à l'époque Honda qui annonce une fin pitoyable et décrédibilisante pour lui seul. Sa prochaine paternité et son transfert chez Aprilia ne seront qu'un répit avant le désarroi de la mort accidentelle de Dean Berta, son cousin de 15 ans, en Superbike.
Au fil des Grands Prix, "MotoGP Unlimited" dévale des montagnes russes et se laisse porter par les événements, sans recours aux effets spéciaux. C'est le choix de la sobriété, loin de tout sensationnalisme. Dans ces "behind the scene", Aleix Espargaro peste contre son frère Pol qui lui saccage ses trajectoires, Valentino Rossi nous ouvre les portes de son ranch où s'entraînent ses poulains, et se fait de plus en plus à l'idée d'une retraite bien méritée. La légende au crépuscule de son extraordinaire carrière revient de temps en temps au premier plan mais il ne fera pas exception à la règle : aucun pilote ni aucune équipe n'a droit à un épisode dédié.
Le nouveau casque de Valentino Rossi (Yamaha Petronas SRT) au Grand Prix de Saint-Marin, le 18 septembre 2021

"MotoGP Unlimited" n'oublie pas le business

Chez Ducati, Jack Miller coule peu à peu face à son coéquipier Pecco Bagnaia et s'en ouvre, tandis que le rookie Jorge Martin occupe déjà une place de choix. Sa sérieuse blessure l'a coupé dans son élan et permet de rappeler la fragilité de tous ces destins. D'ailleurs, cette saison 2021 est d'une rare intensité émotionnelle, jusqu'au tragique, et "MotoGP Unlimited" en est le témoin : avènement d'un nouveau champion après huit ans de domination espagnole, der de VR46, naufrage de Maverick Vinales, drame de la mort de Jason Dupasquier, éclosion de Pecco Bagnaia… rien ne manque à cette trame hollywoodienne.
La série surfe sur les rebondissements mais elle sait les anticiper. Sa caméra est là lorsque le patron de l'équipe SRT, satellite de Yamaha, annonce à son staff en colère qu'il va proposer Morbidelli pour remplacer Vinales dans le team d'usine. Et elle est encore là lorsqu'il annonce le retrait de Petronas, et par conséquent la fin de l'équipe. En montrant ce côté business qui effraie la F1, "MotoGP Unlimited" va plus loin, sans crainte, prouvant qu'elle sait faire mieux sans artifice.
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