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MotoGP - L'armada Ducati au service de Francesco Bagnaia : pourquoi c'est un problème

Julien Pereira

Mis à jour 06/10/2022 à 14:17 GMT+2

MOTOGP - Ils sont sept. Sept pilotes Ducati à pouvoir aider Francesco Bagnaia à ravir la couronne à Fabio Quartararo. Tous ne le feront pas. Mais qu'ils soient incités à le faire par le constructeur italien traduit une forme d'iniquité. La firme de Borgo Panigale n'est pas à blâmer mais elle profite d'un système qui n'est en rien comparable à la F1. Tant pis pour l'ADN de la discipline.

Francesco Bagnaia (Ducati) et Fabio Quartararo (Yamaha) au Grand Prix de Saint-Marin

Crédit: Getty Images

D'un côté, Fabio Quartararo, leader du championnat pour deux petits points. De l'autre, Francesco Bagnaia mais aussi... Jack Miller, Johann Zarco, Marco Bezzecchi voire Luca Marini. Alors qu'il reste trois Grands Prix avant le baisser de rideau, la course au titre est tout à coup devenue déséquilibrée dimanche dernier, en Thaïlande, où les consignes d'équipes, craintes depuis plusieurs semaines, sont subitement devenues une réalité.
À Buriram, Zarco aurait pu priver "Pecco" de trois points s'il avait décidé de jouer sa carte personnelle. Mais, fidèle à ses principes et bien plus reconnaissant que d'autres vis-à-vis de lui, le Français a choisi de respecter à la lettre les ordres passés par le constructeur Ducati, dès le Grand Prix de Saint-Marin (il y a un mois) au sein de toutes les structures gravitant autour de lui : Pramac, Gresini, VR46.

Ducati a bien fait

D'aucuns s'étonneront que le problème n'en soit devenu un que ce week-end, alors qu'il n'aura pas fallu attendre la 17e manche de la saison pour découvrir que Ducati fournissait un tiers des machines de la grille. C'est vrai. Mais ce n'est pas pour autant du chauvinisme : jusqu'ici, la firme de Bologne n'avait jamais usé de ce pouvoir pour trifouiller de manière directe le résultat d'une course.
Faut-il, pour autant, blâmer les Rouges ? Jusqu'à preuve du contraire, personne n'a empêché les autres constructeurs de tisser une toile aussi imposante (certains, comme Honda, ne s'étaient pas gênés pour en faire autant dans le passé) - encore aurait-il fallu qu'ils soient capables de développer des motos suffisamment performantes pour attirer les structures privées. Consciente avant tous les autres qu'elle avait bien plus à y gagner qu'à y perdre, Ducati a accueilli les prétendants à bras grands ouverts.
Ce scénario-là n'était pas tout à fait envisagé par le promoteur du championnat qui, dans un monde idéal, aurait aimé que chaque constructeur fournisse des machines à une seule équipe privée. Avec 8 Ducati sur 24 machines, on est encore loin du compte.

Incomparable avec la F1

Pour atteindre cet idéal, il aurait été judicieux d'imposer un cadre bien moins permissif qu'actuellement. Concrètement, chaque équipe indépendante bénéficie d'un chèque de 5 millions d'euros de la part de la Dorna, avec lequel elle peut librement négocier avec le constructeur de son choix.
En Formule 1 - puisque le parallèle a beaucoup été utilisé dans ce débat - les écuries ne louent pas une monoplace dans son entièreté. Elles ont même l'interdiction de copier certaines pièces - souvenez-vous de la Mercedes Rose ! - et concernant les unités de puissance, des règles existent pour maintenir un certain équilibre entre les différents motoristes.
En MotoGP, rien de tout cela. Ducati fournit, clés en main ou presque, des machines flambant neuves ou d'un an d'âge en fonction des différents partenariats. Et en tire profit. Tout au long de la saison, on l'a ainsi vu tester des pièces sur d'autres motos que celles de sa propre équipe.Un laboratoire géant, qui lui a permis de mettre au point la monture la plus performante du plateau.
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Jack Miller, Francesco Bagnaia, Johann Zarco et tous les membres Ducati heureux après le Grand Prix de Thaïlande 2022

Crédit: Getty Images

Samedi, en Thaïlande, le rookie Marco Bezzecchi a ainsi pu devenir le septième homme capable de décrocher une pole position au guidon d'une Ducati cette saison. En F1, une pole de Pierre Gasly ou de Yuki Tsunoda devant Max Verstappen, cette saison, aurait relevé du miracle.

Le nombre plus fort que le talent

C'est là où le bât blesse. Absolument personne n'aurait déploré que Jack Miller, le seul et unique véritable coéquipier de Francesco Bagnaia, fasse une faveur à l'Italien sur demande de son employeur. Mais avec une telle influence auprès de toutes les équipes indépendantes - qui n'ont d'indépendantes que le nom - Ducati rompt ce qui fut, jusqu'ici, l'une des forces de cette discipline : la méritocratie liée au talent, et non pas au nombre.
C'est parce que les pilotes sont justement attachés à cet ADN que Francesco Bagnaia lui-même avait demandé à son employeur de ne pas lui apporter la moindre aide extérieure dans sa quête de titre. Ses qualités de pilote auraient mérité qu'il soit écouté. Ce ne fut pas le cas.
Ainsi, lorsque Marc Marquez - bien placé pour savoir à quel point il est difficile de décrocher un titre sur une machine capricieuse - livre son pronostic pour la fin de saison, il trouve les mots justes pour résumer la situation : "Je parie sur la moto de Pecco, a-t-il souligné lors de son débriefing, dimanche. Mais Fabio, c'est Fabio, il pilote brillamment. Il y a beaucoup de courses qui ressemblent à une "Coupe Ducati". C'est normal. Ducati n'a pas gagné un championnat du monde depuis 2007. Ils ont la meilleure moto et je pense qu'ils vont utiliser toutes leurs forces pour remporter le championnat."
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