Coupe d’Europe - Poules à deux vitesses, petits en pâture, qualifications idiotes : faut-il abolir la Challenge Cup ?

Sur le papier, personne ne dira le contraire : un Bayonne-Llanelli un samedi de Coupe d’Europe n’a rien de déplaisant. Chaque supporter d’une équipe du Top 14 est heureux de voir son équipe prendre part à une compétition européenne, plutôt que de rester chez elle pendant que les cadors du continent s’entrechoquent. Cela tombe bien, les 14 équipes de l’élite française jouent en Europe cette année.

Pourtant, au milieu de cette quinzaine continentale qui s’achève ce week-end, un constat s’impose : la Challenge Cup, cadette de la Champions Cup qui, elle, garde à peu près intacte sa superbe, frise un peu plus le ridicule à chaque journée. Dans la poule A, une équipe pourrait ainsi se qualifier pour la phase finale de la compétition sans avoir gagné le moindre de ses 4 matches de poule.

Une possibilité grotesque à mettre sur le compte d’un tout nouveau format qui ne l’est pas moins. Cette saison, avec l’arrivée d’équipes sud-africaines, la compétition est passée à 20 équipes, divisées en deux poules de 10. Dans chaque poule, une équipe en rencontre deux autres dans une confrontation aller-retour ; et les six premiers de chaque poule se qualifient pour le tour suivant, en plus des quatre reversés de la Champions Cup.

Une formule qui favorise la constitution de poules à deux vitesses. Dans la poule A, les cinq premières équipes ont gagné toutes leurs rencontres contre les cinq dernières, avant l’ultime journée ce week-end. La sixième place qualificative pourrait donc être allouée à une équipe ayant gratté un point de bonus, ou deux, lors de ses défaites, comme Perpignan ou Brive.

La question qui s’impose dès lors est celle-ci : Brive ou Perpignan, précisément, qui sont à la bagarre pour garder leur place en Top 14, sont-ils disposés à jouer à bloc cette compétition européenne ? Leurs quinze titulaires très largement remaniés de la semaine dernière, face à Connacht et Glasgow, laissent peu de doute. Mais comment leur en vouloir de donner la priorité au championnat, au vu du peu d’intérêt sportif de la Challenge Cup à ce moment précis de la saison ?

Certes, la finale de l’an passé au Vélodrome entre Lyon et Toulon avait attiré du monde ; mais les affiches à l’enjeu sportif tout relatif qui caractérisent cette compétition sont globalement assez peu, voire très peu suivies, et l’engouement peine à décoller avant que les équipes atteignent le dernier carré. Bayonne, en alignant dès la première journée une équipe moins compétitive en Europe, a peut-être gardé les forces qui lui suffiront pour continuer sa belle aventure en Top 14. Le Stade français mesure aussi ses efforts. La hiérarchie, chez les supporters comme chez les joueurs, est clairement établie.

L’insertion d’équipes de l’hémisphère Sud dans la compétition ne renouvelle que peu l’attrait de la Challenge Cup, et la rend même un peu plus floue. Plus lésée encore que son aînée, qui continue de réunir les meilleures équipes, elle souffre encore plus de la comparaison. La finale à l’Aviva Stadium de Dublin le 19 mai prochain opposera deux bonnes équipes de rugby, c’est une certitude ; mais les huit mois précédents auront, une fois de plus, remis en question la légitimité de la Challenge Cup, qui reste une compétition inaboutie.