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Garmisch-Partenkirschen I Cyprien Sarrazin et Luc Alphand se ressemblent tant : "Deux chiens fous qui se sont canalisés"

Vincent Bregevin

Mis à jour 27/01/2024 à 10:02 GMT+1

Auteurs chacun d'un fabuleux doublé à Kitzbühel, Cyprien Sarrazin et Luc Alphand cultivent les points communs bien au-delà de ces succès prestigieux. Les ressemblances sont nombreuses, avec des parcours chaotiques dont ils ont su apprendre pour tirer la quintessence de leur talent et dominer la descente. Un drôle de parallèle expliqué par nos consultants, Pierre-Emmanuel Dalcin et Johan Clarey.

Sarrazin nous a fait vibrer : "C'est féérique, c'est magique !"

Ils ont poussé le mimétisme jusqu'à sa forme la plus glorieuse. La plus mythique, même. Claquer un doublé la même année à Kitzbühel, ce n'est vraiment pas donné à tout le monde. Luc Alphand l'avait réussi en 1995, signant ainsi ses deux premières victoires en Coupe du monde, avant de remporter son premier globe de la descente quelques semaines plus tard à Bormio. Cyprien Sarrazin a imité son compatriote 24 ans plus tard, donnant une nouvelle dimension à sa saison flamboyante qu'il tentera de confirmer samedi sur le premier Super-G de Garmisch-Partenkirschen (11h45, en direct sur Eurosport). C'est certainement leur similitude la plus marquante. Mais c'est loin d'être la seule.
Il y a des ressemblances frappantes dans leurs parcours respectifs. A commencer par le stade de leur vie où ils ont goûté à leur première victoire en Coupe du monde de descente. "Si leurs carrières se ressemblent, c'est déjà parce qu'ils gagnent au même âge (28 ans pour Alphand, 29 ans pour Sarrazin, NDLR), souligne notre consultant Pierre-Emmanuel Dalcin. On savait tous les deux qu'ils avaient un potentiel énorme. Mais il y avait 50% de chances que ce soit un talent gâché, et 50% de chances pour que ça devienne deux mecs qui vont marquer le ski français. Tant mieux, c'est tombé du bon côté."
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Alphand : "Je suis fier de passer le relais à Sarrazin"

Pour Alphand comme pour Sarrazin, il y a la même impression. Le potentiel était évident mais il manquait un petit quelque chose pour qu'il s'exprime pleinement : une victoire pour tout déclencher. "Ils explosent d'un seul coup, résume Johan Clarey, également consultant pour Eurosport. Cyprien, c'est encore plus violent que ce qu'a fait Luc. Luc, une fois qu'il s'est mis à gagner une fois, il a enchaîné trois saisons extraordinaires derrière. J'espère que ce sera la même chose pour Cyp, mais pour l'instant c'est ce qu'on voit. Il gagne à Bormio pour la première fois, c'est peut-être le déclic qui lui donne la confiance nécessaire pour enchaîner à Wengen et à Kitzbühel."

Blessures et doutes

Il leur a chacun fallu du temps pour goûter à la gloire. Et emprunter un chemin tortueux, jalonné par les chutes et les blessures, avec tous les doutes que cela engendre fatalement. "Luc, à 27-28 ans, il se retrouve encore une fois à plat ventre à Garmisch je crois, avec les adducteurs pétés, se souvient Pierre-Emmanuel Dalcin. Il s'était déjà cassé le genou plusieurs fois. Je pense qu'à un moment donné, il s'est posé la question de savoir s'il allait plier bagages… Cyprien, peut-être pas, mais à force de tomber à des endroits improbables, de prendre des boîtes que personne n'avait jamais pris, avec des fautes improbables…"
"'Cyp', ça a été compliqué ces dernières années, abonde Johan Clarey. Il a eu quelques points de réussite en géant avec un podium à Alta Badia, Luc je crois que c'était la même chose, il avait eu quelques fulgurances avant dans sa carrière mais jamais la régularité pour prétendre à ce qu'il a réussi. Je pense que les deux se ressemblent à ce niveau-là, sur les blessures, les doutes, ils ont vraiment eu le même style de parcours. Avec quelques fulgurances où on a quand même vu qu'ils avaient le potentiel pour faire de grandes choses. C'est là qu'on a vu le parallèle, leur parcours qui se rejoignent."
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"Autorise-toi à gagner" : Sarrazin, le déclic

Le doute était vraisemblablement un passage obligé pour Sarrazin et Alphand. Ce sont les échecs dont il fallait tirer les enseignements pour bâtir les victoires et exploiter pleinement leur potentiel. Un processus d'apprentissage vers une maturité qui fait leur force désormais. "Si tu te blesses et que tu n'apprends rien, à un moment tu as la blessure de trop et c'est fini, estime Pierre-Emmanuel Dalcin. La maturité leur a appris à trouver des solutions pour arrêter de se blesser. Tous les deux ont eu une démarche mentale pour se stabiliser."

"Les déclics viennent quand on est au fond du trou"

Johan Clarey était lui aussi passé par ces moments délicats. "Quand on se retrouve dans un fauteuil roulant ou dans un lit d'hôpital, à ne plus pouvoir marcher, on se pose vraiment les bonnes questions, explique-t-il. 'Cyp' en a parlé, il s'est retrouvé à regarder les championnats du monde l'année dernière à Courchevel devant sa télé et il ne voulait plus revivre ça. Les déclics viennent de là, dans les moments où on est au fond du trou à se dire 'qu'est-ce que je dois faire de différent pour ne plus vivre ça'. Moi je l'ai vécu, Cyp l'a vécu, Luc l'a vécu… On fait vraiment le point sur ce qu'on fait de bien et ce qu'on fait de mal, et on a le temps de réfléchir malgré tout."
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"Je pensais que c'était impossible" : Le coup de folie de Sarrazin décrypté par Clarey

Comme Alphand, Sarrazin a su sortir grandi de ce parcours chaotique. "Ce sont deux chiens fous qui se sont canalisés", résume Pierre-Emmanuel Dalcin. "C'est exactement ça, confirme Johan Clarey. Luc n'arrivait pas à contrôler sa fougue, c'était un fou de vitesse, il prenait des risques incroyables et il se mettait dans les filets tout le temps. Cyp, c'était un peu la même chose mais en géant. On l'a vu l'an dernier. Il s'est mis dans les filets à de nombreuses reprises en début de saison, à Wengen, à Bormio… Il a pris beaucoup de chutes et à partir de là, il a réalisé qu'il devait changer sa manière d'aborder les courses et le déclic s'est fait cette année."

"La similitude serait vraiment parfaite s'il gagne le globe"

Sarrazin y a gagné cette stabilité qui fait ressortir tout son talent. Alphand a été dans le même cas. Et la vie privée a aussi son importance quand il s'agit d'expliquer le phénomène. "Luc, ses entraîneurs m'avaient dit qu'il était tombé fou amoureux de sa femme et que ça l'avait stabilisé, confie Pierre-Emmanuel Dalcin. Je pense que ça a été grandement bénéfique pour lui." "Quand on commence à avoir une vie un peu chaotique à côté de ça, forcément, ça joue sur nos performances sportives, rappelle Johan Clarey. Et 'Cyp', tout ce qui ressort de ses interviews, c'est qu'il se sent bien dans sa vie, en phase avec lui-même, heureux comme il est, avant d'être un skieur."
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Les points communs ne manquent pas entre les deux skieurs tricolores. Leurs parcours se ressemblent jusqu'à leur faculté à dominer la concurrence en descente, même s'ils n'ont pas le même style. "Mais la descente a changé à ce niveau-là, souligne Johan Clarey. Les tracés sont différents, on évolue de plus en plus vers des courbes à haute vitesse où ça demande des qualités techniques, ce que ne demandait pas l'époque de Luc. Quand il vient sur les pistes maintenant, il ne reconnaît pas les tracés parce que ça a totalement changé par rapport à son époque. Luc était un descendeur pur, Cyp' vient du géant. Donc ce n'est pas le même style de skieurs, mais le résultat est le même."
Jusqu'au bout ? Le scénario de la saison ne l'interdit pas. Alphand avait dû attendre la dernière course à Bormio pour remporter le globe de la descente en 1995, avec 11 points d'avance sur l'Italien Kristian Ghedina. Seulement six unités séparent le leader Marco Odermatt de Sarrazin au classement de la discipline à quatre courses du verdict. "Je pense que ça va être très serré, ça se jouera forcément à la fin, prédit Johan Clarey. La similitude serait vraiment parfaite s'il gagne le globe à la fin de l'année." On ne serait pas contre ce mimétisme poussé à l'extrême.
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