ATP Barcelone : Rafael Nadal satisfait mais prudent : "C'est stupide de penser que je suis favori cette semaine"

Sur terre battue, il est dans son élément naturel. Alors quand Rafael Nadal a pris aisément le meilleur sur Flavio Cobolli (6-2, 6-3) au 1er tour du tournoi ATP 500 de Barcelone, cela semblait relever de l'évidence. Mais à voir l'explosion de joie de son clan autour de son entraîneur Carlos Moya, la réalité a refait surface : celle des doutes entourant sa capacité à jouer au plus haut niveau trois mois après sa dernière apparition à Brisbane pour son premier match sur ocre depuis… son 14e titre à Roland-Garros en 2022.

"J'ai essayé beaucoup de fois dans ma carrière de revenir comme ça, mais quand l'âge avance, ça rend les choses encore plus difficiles. J'ai traversé des moments durs, mais en même temps quand je peux m'entraîner à nouveau avec mes collègues et m'aligner en tournoi, je prends encore assez de plaisir pour continuer à jouer", a savouré le Majorquin lors de son interview d'après-match sur le court qui porte son nom.

Il n'empêche : infliger une telle fessée au 62e joueur mondial – Nadal ne pointe cette semaine qu'à la 644e place au classement ATP – après avoir été privé de compétition depuis si longtemps a quelque chose de fascinant. La science du jeu sur terre battue du Majorquin, son aisance pour exploiter toute la géométrie du court en utilisant des angles courts croisés, ses frappes bombées et liftées lui donnent une marge ahurissante sur la plupart de ses adversaires.

La légende espagnole a écrasé Cobolli alors qu'elle était loin d'évoluer à 100 % de ses capacités physiques, en témoignent quelques approximations de placement en coup droit et autres difficultés légères dans les courses défensives. Le secteur où ses faiblesses actuelles ont été les plus criantes fut le service, comme attendu, avec un mouvement légèrement modifié et simplifié pour épargner le plus possible ses abdominaux. Sa première la plus rapide a été flashée à seulement 186 km/h, avec une vitesse moyenne autour des 170 km/h même s'il s'est appliqué sur le placement de ses balles.

"Je n'ai pas pu servir pendant des mois, et même si j'ai beaucoup d'envie, je vais faire preuve de bon sens et ne pas servir comme un fou, a confirmé le principal intéressé à la télévision espagnole. Je dois servir avec précaution et les moyens du moment. Quand vous revenez à la compétition, après tant de mois d'absence, vous ne pouvez pas faire abstraction des doutes sur le plan physique. Globalement, ça a été un bon premier tour et il a fait des erreurs. J'ai joué avec ce que je pouvais contrôler."

D'ailleurs, Nadal, qui n'est pas du genre à s'enflammer, a tenu à relativiser l'ampleur de sa victoire au tableau d'affichage en conférence de presse. Pas par excès d'humilité, mais par conscience que son jeune adversaire n'a pas non plus donné sa pleine mesure ce mardi. Visiblement impressionné par le contexte et ce que représente le Majorquin, Cobolli a surjoué, cherchant le coup gagnant trop rapidement et commettant pas moins de 41 fautes directes. L'Italien a largement participé à creuser sa propre tombe.

"Je sors de ce match avec une légère confiance sur ma capacité à être compétitif, bien que mon adversaire ait commis beaucoup d'erreurs, a-t-il expliqué. Mon niveau était logique, je ne me suis pas surpris. Je devrai faire plus demain (mercredi) contre un top joueur. C'est stupide de penser que je suis le favori cette semaine. Tout le monde sait que je ne suis pas encore favori pour gagner un tournoi, mais j'ai une histoire derrière moi qui compte. Peut-être que ça a joué dans le match d'aujourd'hui, mais ce ne sera pas le cas demain, non."

Pour l'heure, Nadal refuse donc de se projeter. Il revient de trop loin pour mettre la charrue avant les bœufs et exprimer des ambitions démesurées. Jouer et gagner ainsi ce match de reprise est une première étape. Il y en aura bien d'autres à franchir s'il veut rêver plus grand. Affronter un joueur de niveau Top 10 – De Minaur est 11e mais a fait partie récemment des dix meilleurs – est le prochain défi qui l'attend. Quel que soit le résultat, il aura une idée plus précise de son niveau actuel.

"Je ne suis pas à un stade où je peux me permettre d'analyser trop les choses d'un point de vue tactique ou technique, a-t-il encore insisté à la télévision espagnole. Si j'accumule de la confiance, je pourrai penser à la suite. J'essaie de m'adapter à ce que j'ai et de jouer avec le meilleur esprit de compétition possible. Je donnerai tout ce que j'ai. Je ne sais pas comment j'aborderai le match. C'est difficile d'anticiper les choses parce que je suis comme dans une jungle : vous ne savez jamais ce que vous pouvez trouver en termes de niveau physique. Je ne sais pas si je vais être capable de soutenir son rythme."