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Masters 2022 Turin - L'antisèche : Djokovic, une finale sans histoire et pour l'Histoire

Laurent Vergne

Mis à jour 20/11/2022 à 23:30 GMT+1

ATP FINALS –Maître Novak Djokovic, 6e du nom, a mis fin à sa longue disette au Masters pour égaler le record de titres de Roger Federer. Que retiendra-t-on de cette finale face à Casper Ruud ? Sincèrement, pas grand-chose, tant elle a suivi un scénario prévisible que le trop timide Norvégien n'a pu dévier d'une ligne. Il n'empêche que le "Djoker" a écrit une nouvelle page d'Histoire de son sport.

Un set accroché avant de foncer vers un 6e trophée : comment Djoko a égalé Federer

Le pourquoi du comment

C'était un scénario trop bien écrit. Mais Novak Djokovic aime suivre le script à la lettre, quitte à sacrifier l'originalité. Il a fait du Djokovic, et comme Casper a fait du Ruud, cette finale a ressemblé à ce que l'on aurait pu imaginer. Pour que cette finale du Masters prenne une autre tournure ou, au moins, une épaisseur supplémentaire, il aurait fallu que le Serbe soit à distance raisonnable de son meilleur niveau et que son dernier adversaire dans ces ATP Finals affiche un visage différent de ses deux finales de Grand Chelem perdues cette année à Roland-Garros et à l'US Open. Mais rien de tout cela n'est arrivé.
Djokovic, qui a pourtant paru en délicatesse avec son physique en tout début de rencontre, a capitalisé sur son gros point fort tout au long de la semaine turinoise, son service. Il a signé dans ce secteur du jeu une démonstration, avec des stats que son coach Goran Ivanisevic n'aurait pas reniées : 85% de points gagnés sur sa première balle, 69% sur la seconde, soit deux fois plus que Casper Ruud, limité à 35% derrière son second service, comme Taylor Fritz la veille.
Quand on sert aussi bien et que l'on expose à ce point l'adversaire sur sa deuxième balle, il est rare de ne pas sortir vainqueur. Comme un symbole, "Nole" est allé chercher le titre sur un ace. On se souviendra donc davantage de cette finale pour ses conséquences historiques que pour ce qu'elle avait à offrir.
Casper Ruud s'est accroché autant qu'il le pouvait mais il y avait quelque chose d'inexorable dès le début du premier set. On ne parlera pas de syndrome des grandes finales pour lui. Comme à Paris et New York, il est tombé sur plus fort que lui. Beaucoup plus fort, même. Mais dans ce type de rencontres, il touche clairement ses limites. Et comme il ne dispose pas dans son jeu d'une arme fatale susceptible de vraiment faire mal à un joueur comme Novak Djokovic, il n'a jamais pu l'inquiéter.
Il serait injuste de lui faire le procès de la résignation. Il se bat, il ne renonce pas, il pousse jusqu'au bout. Il n'empêche qu'on aimerait le voir plus autoritaire. Trop agneau, pas assez loup. Dans un match de cette importance, face à un adversaire de cette envergure, cela pardonne rarement. Novak Djokovic, lui, reste fidèle à lui-même : Maître et saigneur, désireux d'imposer sa loi, celle du plus fort.
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Novak Djokovic soulève le trophée du Masters pour la 6e fois, record égalé.

Crédit: Getty Images

Le moment-clé

Première manche. 6-5 Djokovic, 30 A. Casper Ruud sert un ace. Puis Novak Djokovic challenge. A raison. Et ça change tout. Le Norvégien se retrouve avec une deuxième balle à négocier. Il perd ce point puis part à la faute sur la balle de set qui, chacun le sentait bien, avait des allures de balle de match. Jusqu'ici, Ruud avait repoussé l'échéance, mais c'était le troisième de ses six jeux de service où il faisait face à des balles de break. Il était sur un fil et celui-ci s'est cassé dans ce 12e jeu.

Le point du match

L'avant-dernier de cette finale. 36 coups de raquette, de l'intensité qui avait souvent manqué jusque-là et, au final, Casper Ruud qui craque, permettant à Novak Djokovic d'obtenir sa première balle de match. Elle lui suffira. C'est peut-être le seul moment où le Serbe est apparu un peu nerveux. On peut le comprendre. Il guettait ce moment depuis sept ans et sa précédente victoire aux ATP Finals. Il avait commis deux grosses fautes sur ce début de jeu mais à 30-30, Rudd n'a pas pu, ou pas su appuyer davantage.
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Le point du match à 36 coups avant de s'offrir le titre : Djokovic a tout pris à Ruud

La stat : 0

Le nombre de balles de break en faveur de Ruud. Le Scandinave a mené 0-30 sur un jeu de service de Djokovic dans la première moitié du premier set, mais ce fut tout. Il n'a jamais entrevu la moindre ouverture. Il n'aura remporté que 11 points sur les... 11 jeux de service adverses. La moyenne est vite faite et elle est très insuffisante pour envisager de chahuter son rival serbe, qui s'est promené sur son engagement d'un bout à l'autre de la soirée.

La décla : Novak Djokovic

Sept ans, ça faisait un bail. Mais le fait que j'ai dû attendre sept ans rend cette victoire plus savoureuse et encore plus importante.

La question : Ruud y croyait-il lui-même ?

Lors du Rolex Paris Masters, Holger Rune était parvenu à déboulonner Djokovic en finale, surmontant à la fois une entame de match compliquée et une fin étouffante. A 19 ans, pour une grande première dans un tournoi de cette importante, cela avait de quoi forcer l'admiration.
Mais le jeune Danois est habité par une force de conviction assez frappante. "C'est le genre de gamin, tu lui mets Nadal face à lui à 16 ans à Roland-Garros, il est certain de pouvoir gagner. Il se trompe, il n'a aucune chance, mais peu importe, ce qui compte, c'est que lui soit convaincu de pouvoir le faire", expliquait alors son entraîneur Patrick Mouratoglou. Tout tient là.
Ce n'est pas une condition forcément suffisante, bien sûr, mais il s'agit d'un préalable indispensable. Si vous n'avez pas ancré au fond de vous cette certitude-là, vous ne pourrez pas battre un Novak Djokovic dans une finale de Masters ou de Grand Chelem. A Roland-Garros, contre Rafael Nadal, l'attitude dès le couloir avant de rentrer le match avait donné le ton. Tête basse rasant les murs, il donnait presque l'impression de s'excuser d'être là.
Alors, bien sûr qu'il est rentré sur le court pour gagner dimanche à Turin. Mais on parle d'une conviction qui vient du fond des tripes, pas du bout des lèvres. S'il n'a pas été aussi fantomatique qu'à Paris, il est malgré tout resté trop spectateur de la page d'histoire qui s'écrivait. Ruud a formidablement avancé cette année en faisant mieux que confirmer sa belle saison 2021. Il fait partie du gratin. Mais s'il veut aller encore plus haut et franchir le dernier cap qui sépare le très bon joueur qu'il est du grand champion qu'il n'est pas encore, il devra se montrer encore plus acteur. Sans quoi il sera condamné au statut de témoin aux premières loges. Un rôle privilégié mais peu enviable..
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Casper Ruud et Novak Djokovic après la finale du Masters

Crédit: Getty Images

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