ATP Indian Wells - Seul Français en 8es, Gaël Monfils reste la référence bleue : "Il a un truc que d'autres n'ont pas"

Il fait toujours de la résistance, et même bien mieux. A 37 ans, Gaël Monfils pourrait aspirer à une retraite sportive bien méritée, à l'image de ses collègues Jo-Wilfried Tsonga et Gilles Simon. Sa vie ne tourne d'ailleurs plus uniquement ou principalement autour du tennis depuis qu'il est l'heureux père d'une petite fille. Mais aussi proche soit la perspective de la fin de carrière, il s'éclate encore sur le circuit et reste plus que performant. A Indian Wells, il est même le seul Bleu à se retrouver en 8e de finale où l'attend Casper Ruud, grâce à ses victoires marquantes sur Hubert Hurkacz et Cameron Norrie. Indubitablement, il a toujours quelque chose de spécial.

Pourtant au classement ATP, il n'est actuellement que numéro 4 français (54e mondial) derrière Ugo Humbert (14e), Adrian Mannarino (21e) et Arthur Fils (43e) – mais 3e à la Race aux Jeux Olympiques (classement depuis l'après Roland-Garros 2023) – et son début de saison 2024 laissait à désirer objectivement jusqu'à la mi-février. Oui mais voilà, quand Monfils parvient à emmagasiner un peu de confiance et à enchaîner, il prend une dimension qu'aucun de ses compatriotes n'a encore effleurée. Et si finalement, il était encore le meilleur d'entre eux ?

"C'est dur de répondre. Quand Ugo Humbert vient de faire ce qu'il a fait à Dubaï notamment, dire qu'en qualité de jeu pure, Gaël est le meilleur… Là, on est vraiment sur l'instant par rapport aux deux très belles victoires qu'il vient d'enchaîner avec la manière, nuance Arnaud Clément, consultant pour Eurosport. Ugo a quand même battu régulièrement des Top 10, a gagné toutes ses finales. Mais quand on voit ce que Gaël est capable de faire à 37 ans, la manière dont il enchaîne... Alors, Indian Wells lui convient bien avec ces jours de repos, mais ça m'impressionne beaucoup de voir la qualité de concentration qu'il a pu garder pendant presque toute la partie contre Norrie. Ce n'est pas évident quand on joue beaucoup moins qu'avant. Il a trouvé quelque chose en plus dans ce secteur."

Alos que la quarantaine n'est plus si loin, Monfils compense ce qu'il a quand même un peu perdu physiquement en progressant ailleurs. S'il reste fidèle à son identité de jeu spectaculaire, il force un peu moins le trait et ne s'éparpille plus. Il y a bien eu ce service à la cuillère dans le tie-break du deuxième set contre Norrie, mais ce n'était pas un coup joué pour épater la galerie : il avait un objectif tactique assumé qu'il a atteint. Une fois réussi, il ne l'a plus retenté pour rester structuré tout en gardant une part d'imprévisibilité.

L'été dernier, alors qu'il n'était pas encore revenu dans le Top 200, il avait surpris son monde en produisant une qualité de tennis dont peu l'estimaient encore capable à Toronto et Cincinnati, s'imposant entre autres face à Stefanos Tsitsipas, Alex de Minaur et déjà Norrie. Ponctuellement, il prouvait ainsi qu'il pouvait encore évoluer à un niveau Top 10. Sur la durée, c'est encore une interrogation. Mais quand il parvient à enchaîner comme en ce moment, Monfils rappelle qu'il est une exception athlétique, et a fortiori dans le tennis français.

"Il a un truc que d'autres n'ont pas et ça marche toujours. Physiquement, ce n'est pas tout à fait la même chose que les Djokovic et Nadal – jusqu'à il y a peu pour l'Espagnol –, mais c'est monstrueux. La force et la puissance qu'il est capable de dégager sur des coups alors qu'il est à trois mètres derrière sa ligne, c'est une force pure, brute. Il est hors normes", souligne Arnaud Clément.

Et notre consultant d'insister sur la capacité de travail d'un joueur régulièrement pointé du doigt pour son dilettantisme. "Quand on le voit à ce niveau, on sait qu'il s'entraîne dur. Je le dis parce que ce n'est pas forcément quelque chose qui se dégage de lui. On n'évoque jamais ce côté-là : c'est un gros bosseur. Ce n'est peut-être pas celui qui a été le plus régulier de ce point de vue dans sa carrière, mais je l'ai vu de près quand j'étais capitaine de Coupe Davis : ce qu'il est capable de faire à l'entraînement en termes d'intensité et de longueur, c'était phénoménal. Je n'avais jamais vu ça."

Et c'est peut-être aussi ce qui explique que Monfils reste à ce jour le dernier quart-de-finaliste français en Grand Chelem chez les messieurs (Open d'Australie 2022) sur un format long si exigeant physiquement. Ajoutez-y ce charisme naturel, ce magnétisme qui fait de lui encore l'idole des foules et l'énergie qu'il sait en tirer et vous comprenez qu'il conserve ce statut à part, de celui dont on attend toujours monts et merveilles.

"C'est assez rare de voir Gaël annoncer des objectifs un peu à l'avance, observe enfin Arnaud Clément. Il a envie de jouer les Jeux, il travaille pour, et comme le physique tient… Intrinsèquement, est-ce si surprenant qu'il puisse battre Hurkacz ou Norrie par rapport au style de jeu ? Non. Et c'est peut-être le plus génial."