ATP Rome - Medvedev - Rune : les ambitieux outsiders sortent de l'ombre avant Roland

On attendait des retrouvailles au sommet entre Carlos Alcaraz et Novak Djokovic pour ce qui aurait pu être une répétition générale avant Roland-Garros. Mais le premier, sans doute un peu fatigué par son doublé Barcelone-Madrid, a été surpris dès le 3e tour au Foro Italico, tandis que le second a payé ses limites physiques et tennistiques du moment en quart de finale. Et le bourreau du Serbe ne s'est pas contenté de cette performance majuscule : Holger Rune l'a confirmée pour atteindre sa troisième finale en Masters 1000, la deuxième sur terre battue après Monte-Carlo.

Également titré à Munich, le Danois est tout simplement le deuxième meilleur joueur de ce printemps sur ocre derrière Alcaraz. Et s'il va chercher le titre à Rome, il dépassera même l'Espagnol dans son bilan des points engrangés sur terre avant Roland-Garros. Décidément, les jeunes loups ont donc les dents de plus en plus longues et Rune l'a encore montré dans sa capacité à sortir le meilleur de lui-même à la bagarre. Ce fut le cas dès le 3e tour face à un public hostile acquis à la cause de Fabio Fognini, puis surtout en huitième de finale contre un Alexei Popyrin inspiré.

Mais le meilleur était à venir, aussi bien tennistiquement que mentalement. En sortant le tenant du titre et numéro 1 mondial Novak Djokovic, aussi loin de son meilleur niveau soit-il, Rune a confirmé d'une certaine manière son exploit de Bercy en novembre dernier. Et quel caractère pour renverser Casper Ruud contre lequel il n'avait jamais gagné en 4 duels précédents en demie ! Mais pour aller au bout, il lui faudra encore sortir le grand jeu contre un membre du Top 5, puisque Daniil Medvedev lui fera face. Voir le Russe en finale d'un Masters 1000 sur ocre, qui plus est à Rome où il n'avait pas gagné le moindre match jusqu'ici en trois participations, n'avait rien d'évident.

Mais quelque chose a changé dans l'état d'esprit de Medvedev sur terre comme il l'avait souligné avant même le tournoi. Déjà quart-de-finaliste à Monte-Carlo et en huitième à Madrid, il a accepté de travailler davantage sur une surface qui le rebutait. Tour après tour à Rome, il est monté en puissance, envoyant un premier message fort dès les huitièmes face à Alexander Zverev. Sa solidité dans des conditions extrêmes contre Stefanos Tsitsipas a encore montré qu'il avait franchi un vrai cap : on ne le voit plus se frustrer à cause des faux rebonds ou de la lenteur de la surface. Le voilà à une victoire d'aller chercher son premier titre sur ocre et d'envoyer un sacré message avant Roland.

Le bilan est assez facile à faire : il n'y a eu qu'une confrontation entre les deux hommes précédemment et déjà sur terre battue, c'était il y a un peu plus d'un mois à Monte-Carlo. En quart de finale, Holger Rune l'avait emporté avec autorité (6-3, 6-4). Néanmoins, le contexte pour Daniil Medvedev est important à rappeler : il revenait alors tout juste d'un titre à Miami et n'avait pas eu beaucoup de temps pour effectuer la transition dur-terre battue. En outre, il sortait d'un immense combat contre Alexander Zverev en huitième, la fatigue avait donc sûrement pesé.

2e tour : bat Arthur Fils [FRA/Q] 6-3, 6-3
3e tour : bat Fabio Fognini [ITA/WC] 6-4, 6-2
1/8e de finale : bat Alexei Popyrin [AUS/Q] 6-4, 5-7, 6-4
1/4 de finale : bat Novak Djokovic [SRB/1] 6-2, 4-6, 6-2
1/2 finale : bat Casper Ruud [NOR/4] 6-7(2), 6-4, 6-2

2e tour : bat Emil Ruusuvuori [FIN] 6-4, 6-2
3e tour : bat Bernabé Zapata Miralles [ESP/31] 3-6, 6-1, 6-3
1/8e de finale : bat Alexander Zverev [ALL/19] 6-2, 7-6(3)
1/4 de finale : bat Yannick Hanfmann [ALL/Q] 6-2, 6-2
1/2 finale : bat Stefanos Tsitsipas [GRE/5] 7-5, 7-5

Holger Rune : "Ce dont je suis le plus fier, c'est que je progresse chaque jour, aussi bien tennistiquement, physiquement que mentalement, surtout sur terre battue, ça va vraiment dans la bonne direction. Et je continue à faire confiance en mes principes de jeu. Quand vous regardez les plus grands, Rafa, Roger et Novak jouer, ils imposent à chaque fois leur style. Donc j'essaie de jouer mon tennis à chaque match. Même si je n'ai que 20 ans, j'ai l'impression d'avoir déjà beaucoup d'expérience. Je sais ce que je dois faire sur le court."

Daniil Medvedev : "C'était très dur en demi-finale avec les interruptions par la pluie. Je me suis échauffé six ou sept fois. Parfois, ça peut vous faire sortir de votre bulle, et vous mettre en colère, mais je ne sais pas pourquoi, ça m'a fait rire. Avec mon coach, à chaque fois, on commençait à s'échauffer et ils nous disaient dans la foulée que la pluie s'intensifiait. On s'est dit : 'Ok, attendons et quand on peut, on joue.' Et c'est ce que j'ai réussi à faire."

7. En battant Novak Djokovic et Casper Ruud cette semaine à Rome, Holger Rune a conquis ses 6e et 7e victoires consécutives contre des membres du Top 5, une série folle à seulement 20 ans. D'ailleurs, le Danois n'a perdu qu'un match contre cette élite, lors de son premier essai au 1er tour de l'US Open 2021 contre Djokovic auquel il avait tout de même déjà pris un set (6-1, 6-7, 6-2, 6-1).

38. Grâce à sa victoire sur Stefanos Tsitsipas en demi-finale, Daniil Medvedev en est déjà à sa 38e victoire sur le circuit cette saison. Le Russe est celui qui a le plus gagné de matches en 2023 assez largement devant Carlos Alcaraz (30) et Jannik Sinner (28). Holger Rune, Stefanos Tsitsipas et Taylor Fritz suivent avec 27 succès.

2. S'il venait à remporter le titre au Foro Italico, Daniil Medvedev s'emparerait de la place de numéro 2 mondial aux dépens de Novak Djokovic. Par conséquent, le Russe serait tête de série 2 à Roland-Garros, ce qui signifie entre autres qu'il ne pourrait affronter Carlos Alcaraz qu'en finale et qu'une demie entre l'Espagnol et Djokovic serait possible suivant le tirage au sort.

Un premier titre en Masters 1000 sur terre battue : voilà l'enjeu principal pour lequel se battront Daniil Medvedev et Holger Rune. Ajoutez à cela une place potentielle de dauphin de Carlos Alcaraz pour le premier et une autre dans le Top 5 pour le second, et vous comprendrez que les deux hommes ont beaucoup à gagner dimanche, ce qui pourrait les rendre nerveux et les faire déjouer. Mais ce serait se tromper sur leurs caractères respectifs : ils ne sont pas du genre à passer à côté d'une finale.

Déjà titré quatre fois en 2023, Daniil Medvedev surfe sur une telle vague de confiance qu'il en est donc devenu dangereux sur terre battue. Le Russe, qui a davantage travaillé les aspects spécifiques à la surface comme les glissades récemment, s'épanouit d'autant plus à Rome que les conditions de jeu donnent moins d'impact au lift dont il manque dans son tennis. A hauteur de hanche, il est redoutable et il fait preuve d'une patience et d'une constance mentale remarquables. C'est d'ailleurs peut-être sur ce plan-là qu'il pourrait exploiter une certaine nervosité chez son jeune rival, notamment perceptible lors de la demie contre Casper Ruud.

Mais Holger Rune n'en finit plus d'étonner par ses qualités de compétiteur. Le Danois n'a peur de rien et possède plus d'arguments techniques pour triompher sur la surface. Sa victoire à Monte-Carlo contre le Russe ne peut que l'aider sur le plan mental même s'il semble exagéré de parler de véritable ascendant à ce stade. Une chose est certaine : il ne fera pas de complexes et sa capacité à varier les trajectoires, les angles et les effets est un atout majeur et peut-être un avantage. De quoi peut-être faire la différence dans cette finale très indécise sur le papier.

Notre pronostic : Holger Rune en trois sets.