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Tsonga et les fantômes du Saladier

Laurent Vergne

Mis à jour 24/11/2017 à 10:03 GMT+1

COUPE DAVIS – Jo-Wilfried Tsonga est le numéro un de Yannick Noah ce week-end face à Lille. Au point qu'il n'est pas impossible que le capitaine l'aligne aussi en double. Pour le Manceau, cette finale contre la Belgique est l'occasion de régler ses comptes avec les finales de 2010 et 2014 et de chasser des fantômes qui pourrissent sa mémoire.

Jo-Wilfried Tsonga rejoint le podium des vaincus et ne peut s'empêcher de regarder la Coupe Davis

Crédit: Panoramic

Le mieux, ce serait peut-être de ne pas remuer le couteau dans la plaie. Les finales de Coupe Davis, pour Jo-Wilfried Tsonga, c'est, comment dire ? Des souvenirs moisis. Les deux dernières finales jouées par l'équipe de France ont viré au cauchemar pour le Manceau. Deux occasions manquées. Une frustration et une désillusion. Deux dates qui auraient pu marquer l'apothéose de sa carrière et qui s'apparentent aujourd'hui à quelques-uns de ses pires souvenirs.
Belgrade 2010 ? Blessé au genou gauche, il n'a pas pu y prendre part. Son absence avait pesé lourd. Très lourd. Avec lui et Monfils en simple, les Bleus seraient peut-être (sûrement ?) repartis de Serbie avec un gros saladier en guise d'excédent de bagages.
Quatre ans plus tard, à Lille, contre la Suisse, Jo-Wilfried Tsonga est cette fois bel et bien là. Il dispute le premier simple contre Stan Wawrinka, mais cède en quatre sets. Rien n'était encore perdu mais pour lui, c'était déjà fini. Il ne rejouera plus du week-end, remplacé par Benneteau lors du double et Gasquet pour le premier simple du dimanche. Cette fois, c'est le bras droit qui couine (une contracture, dira l'IRM) et le contraint à renoncer au double puis au match contre Roger Federer le dimanche.
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Jo-Wilfried Tsonga, lors de France-Suisse en finale de la Coupe Davis 2014

Crédit: AFP

Aucune victoire contre un Top 15 en Coupe Davis

Mais à Lille, il y a eu pire pour Tsonga. Malgré lui, il s'est retrouvé au cœur d'une communication apocalyptique du clan tricolore. Le capitaine Arnaud Clément assure que Benneteau était prévu de longue date pour le double et que Tsonga est préservé pour affronter Federer. Jean Gachassin, le président de la FFT qui, dans la foulée, révèle sans le vouloir que JWT est incapable de jouer. Ce micmac débouchera sur une incompréhension totale de la part du public. Pour un peu, on a laissé croire que Tsonga s'était débiné après avoir perdu contre Wawrinka. Qu'il s'était écroulé psychologiquement. Résultat, lors de la cérémonie protocolaire le dimanche, le Sarthois est hué par une partie du public. Ou comment passer du rêve au cauchemar...
Cela fait tout de même beaucoup de casseroles amères pour un seul homme et pas fantômes à virer du Saladier. Dur, d'autant que Tsonga n'a jamais vraiment ménagé sa peine. Depuis ses premiers pas en Coupe Davis en 2008, il a joué 34 matches en Coupe Davis, dont 27 en simple. Et son bilan est plus qu'honorable : 20 victoires, 7 défaites en simple, et un ratio de 6-1 en double. Mais il lui manque encore LE grand moment, LA grande performance qui change tout. Car mine de rien, Tsonga n'a jamais battu un membre du Top 15 en Coupe Davis. Face à Nadal (2e, 2011), John Isner (11e, 2012), Wawrinka (4e, 2014) et Murray (3e, 2016), il a toujours échoué.
Ses frustrations individuelles comme l'absence de consécration collective, c'est tout cela que Tsonga peut mettre derrière lui à Lille. Plus que jamais, il doit apparaitre comme le leader de cette équipe. Il l'était déjà numériquement en 2014 contre la Suisse, mais Monfils et lui composaient en réalité un binôme de même expérience, de même valeur. Cette fois, avec un Lucas Pouille nettement moins galbé en matière de vécu, c'est à lui d'assumer le rôle du taulier.
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Jo-Wilfried Tsonga et David Goffin lors du tirage au sort

Crédit: Getty Images

Entre logique et paradoxe

Le scénario de rêve pour lui ? Gagner ses deux simples et offrir le Saladier d'argent en battant David Goffin dans le duel des leaders dimanche. Même heure, même endroit que trois ans plus tôt, il serait acclamé, fêté, célébré là où il avait été sifflé. Ce ne serait pas illogique au fond. De cette génération dite dorée puis maudite et qui n'était sans doute ni l'un ni l'autre, il a le palmarès le plus étoffé, en quantité et en qualité, et le CV le plus épais en Grand Chelem. Que la consécration passe par lui aurait du sens.
Ce serait pourtant, aussi, un drôle de paradoxe, quand même. Cette année, la Coupe Davis, Tsonga ne devait même pas la jouer. Avec la naissance de son premier enfant à la sortie de l'hiver, il avait choisi de faire l'impasse. Et après ? Après, peut-être a-t-il été titillé par les commentaires de son capitaine, déplorant son manque d'investissement suite à son absence contre la Grande-Bretagne en quart de finale au mois d'avril. Après, Tsonga a réussi au fil des mois à gérer de front son métier et son nouveau rôle de papa. Après, ses échecs répétés en Grand Chelem cette saison lui ont peut-être fait prendre conscience que la Coupe Davis pouvait lui apporter quelque chose d'unique.
Peu importe au fond, le résultat, c'est qu'il est là, "dans les starting blocks" comme il dit, "prêt à jouer le 1er, le 2 et le 3e jour" si Noah fait appel à lui pour le double. Rien que ça. S'il ramène trois points, ce ne sera même plus une revanche, à ce niveau-là. Mais tout ça, c'est le rêve. Comme en 2010. Comme en 2014. Pour l'instant, Tsonga n'a rien de tout ça. Que des plaies à cicatriser. Et des fantômes à chasser du Saladier.
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Pouille, Tsonga, Noah - France - Coupe Davis 2017

Crédit: Getty Images

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