Le paradoxe Monfils

Alors que le deuxième trimestre de la saison a été entamé, que les joueurs ont déjà un Grand Chelem et bientôt trois Masters 1000 dans les pattes, la hiérarchie 2016 commence à prendre un peu de sens. Dans ce que l'on nomme le classement "Race", à savoir les points engrangés uniquement depuis le 1er janvier de l'année en cours, un homme survole la concurrence. Malgré sa sortie de route prématurée cette semaine à Monte-Carlo, Novak Djokovic devance son dauphin de plus de 2400 points. Il y a lui et les autres.

Parmi ces autres, Gaël Monfils fait mieux que se défendre. En accédant aux demi-finales vendredi, le Français s'est hissé au 5e rang, dépassant Stan Wawrinka et Dominic Thiem. En fonction des résultats du week-end, le sien mais aussi celui de Rafael Nadal, il oscillera lundi entre la 4e et la 6e place. On peut donc avancer sans exagération que Monfils livre une campagne pour l'instant assez remarquable en termes de résultats bruts. Quart de finale à l'Open d'Australie, deux autres quarts et au moins une demie sur les trois premiers Masters 1000 à Indian Wells, Miami et Monte-Carlo, plus une finale en ATP 500 à Rotterdam.

Tout cela combiné lui donne une base de 1380 points avant d'affronter Jo-Wilfried Tsonga samedi, pour ce qui est sans doute la meilleure entame de saison de sa carrière. La grande force de Monfils en 2016, c'est sa constance. Presque un comble pour la Monf'... Mais le plus improbable dans tout ça, c'est que ce parcours ne recèle aucune victoire contre un joueur du Top 20. Sur les 19 matches gagnés par le Parisien cette saison, sa victime la mieux classée pointait au… 25e rang. C'était Pablo Cuevas, à Miami. Pour le reste, chaque fois qu'il a ferraillé avec un membre du Top 20, il a perdu : deux fois contre Milos Raonic, et Kei Nishikori à Miami.

C'est un fait, Gaël Monfils a plutôt la baraka. Dans tous les tournois majeurs, il a bénéficié de circonstances favorables, à l'image de son parcours à Melbourne, où il a pu atteindre les quarts avec en guise de meilleure perf' un succès sur Andrey Kuznetsov, alors classé 63e à l'ATP. Monte-Carlo confirme cette joyeuse tendance, avec un quart de finale face au lucky loser Marcel Granollers. Mais Monfils n'y est évidemment pour rien. Et on l'a suffisamment souvent vu connaitre des éclipses face à des joueurs en-dessous de son standing pour ne pas se satisfaire de sa constance retrouvée. A de rares exceptions près (comme sa défaite d'entrée à Montpellier contre Edouard Roger-Vasselin), Monfils gagne les matches qu'il ne doit pas perdre.

Mais incontestablement, un succès contre une pointure du circuit lui ferait du bien. Le coup était passé près en Floride contre Nishikori, avec plusieurs balles de match non converties. Parallèlement à la place en finale, tel sera pour lui l'enjeu de sa confrontation avec Jo-Wilfried Tsonga. Pour Monfils, une victoire face au Manceau serait la première face à un joueur du Top 10 depuis... Monte-Carlo 2015, il y a tout juste un an. Il avait alors sorti Roger Federer en huitièmes. Depuis, Monfils fait le job, mais plus d'extras.