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Murray, rayonnant crépuscule

Laurent Vergne

Mis à jour 14/01/2019 à 17:35 GMT+1

OPEN D'AUSTRALIE – Pour ce qui pourrait bien être le tout dernier match de sa carrière professionnelle, Andy Murray a livré un combat épique lundi face à Roberto Bautista Agut. Il l'a perdu en cinq sets et plus de quatre heures, mais l'essentiel était ailleurs. Melbourne lui a gueulé son amour et l'Ecossais n'oubliera pas ce moment. On a connu des crépuscules moins rayonnants.

Andy Murray après sa défaite contre Roberto Bautista Agut.

Crédit: Getty Images

Maman Judy les larmes aux yeux. Le frangin Jamie à peine moins ému. Une standing ovation du public lorsque Andy Murray servi pour rester dans le match dans le 5e set. L'Open d'Australie 2019 a vécu lundi son premier moment fort de la quinzaine. Ce sera même, quoi qu'il advienne dans les treize prochains jours, un sommet d'émotion de cette édition. Malheureusement, ce sera sans doute aussi le dernier grand moment pour l'Ecossais.
Trois jours après avoir annoncé son futur départ à la retraite, l'homme à la hanche défaillante a livré un formidable combat contre Roberto Bautista Agut. Parce que c'était peut-être son dernier match au plus haut niveau, ce n'était pas un match comme les autres.
C'était le 854e de la carrière d'Andy Murray et tous ceux qui l'ont vécu au cœur de la Melbourne Arena ne l'oublieront pas de sitôt. On a eu peur qu'il prenne trois sets un peu trop secs à notre goût. Il méritait autre chose. Avec cette baston en cinq sets et plus de quatre heures, Sir Andy a fait l'essentiel : en dépit de la défaite, il a fait plaisir et sans doute s'est-il fait plaisir.

C'est drôle, l'affection...

Murray n'avait plus perdu au premier tour d'un Grand Chelem depuis onze ans. Mais ce qui, en d'autres temps, aurait eu valeur d'énorme couac, passe aujourd’hui totalement au second plan. Ce revers-là, sur le fond, n'a aucune importance. Tout le monde s’en fout. L'ancien numéro un mondial voulait juste reprendre une dernière dose, un dernier shoot d'adrénaline. Il l'a eu, et nous avec. Au micro, sur le court, il l'a joliment et justement résumé à chaud : "si c'était mon dernier match, c'était une manière extraordinaire de finir."
Mieux valait tomber en gladiateur, en night session, après un combat de cette envergure-là, que de prendre trois sets sans mettre un pied devant l’autre dans deux jours sous le cagnard. C’était la fin ? Oui. C’est triste ? Oui. Mais cette triste fin avait de la gueule.
Cerise sur le gâteau, il a reçu un message d'amour comme il n'en a sans doute jamais eu en Grand Chelem en dehors de Wimbledon. A son entrée sur le court, d'abord, puis à sa sortie. Un vrai stade en fusion rien que pour lui. De sentir qu'il sera regretté ne change rien à sa frustration de champion, mais cela ne peut pas ne pas le toucher. Idem pour les dizaines de témoignages venus du circuit, hommes et femmes confondus. S'il ne le savait pas déjà, Murray a pu mesurer à quel point il est apprécié.
C'est drôle, l'affection. Il aura fallu attendre qu'il annonce son départ bien trop précoce pour que les gens lui manifestent de façon aussi directe et sans retenue leur amour. L'absence crée le manque. Or depuis son annonce de vendredi, Murray est là sans être là. C'est le futur retraité, le champion bientôt loin des courts, dont le public de Melbourne a voulu profiter.

Melbourne, histoire de frustrations

Est-ce son ultime image en tant que joueur de tennis de haut niveau ? Probablement. Peut-être y aura-t-il un dernier baroud d'honneur, chez lui, à Wimbledon, cet été. Dans le feu de l'action, le Britannique n'a même pas exclu de tenter une lourde opération pour permettre à sa hanche de le laisser tranquille pour de bon. Mais, comme il l'a dit lui-même, même avec cette option, il n'aurait aucune garantie de pouvoir rejouer. S'il se fait opérer, c'est surtout pour pouvoir mieux vivre au quotidien, pas dans l'optique d'un hypothétique comeback. Puis, comme il l'a avoué en conférence de presse après son match, il a vécu un moment si privilégié lundi à Melbourne que, peut-être, s'arrêter là-dessus est la meilleure chose à faire.
Andy Murray restera le grand maudit de Melbourne. Cinq finales sans jamais gagner le titre. 48 matches gagnés sans titre au bout, c'est un "record", que l'Ecossais partage avec Ivan Lendl à Wimbledon. Mais cette frustration-là, la sienne, n'est peut-être rien à côté de celle qui impose l'idée de ne plus jamais le revoir sur les courts.
D'autant que, malgré sa hanche en vrac et un évident inconfort, il a montré lundi qu'il était encore capable d'être compétitif sur une grande scène, face à un très bon joueur. C'est tout le paradoxe : il a annoncé sa retraite et pourtant nous l'avons vu jouer, et bien jouer. Mais, comme il l'a rappelé après ce combat "à la sortie du court, j'avais très, très mal". Impossible de continuer dans ces conditions.
Si l'émotion était toujours forte lundi, l'atmosphère de sa conférence de presse n'était pas empreinte de la même lourdeur que celle d'il y a trois jours, où sa peine faisait peine à voir. Il l'a d'ailleurs avoué, si le moment a été très pénible à vivre vendredi, il s'est senti "beaucoup mieux, comme libéré" une fois sa retraite annoncée. Alors, oui, c'était bien, c'était chouette. Pour lui. Pour nous. Mais on aurait quand même préféré se passer de tout ça.
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Andy Murray et Roberto Bautista Agut

Crédit: Getty Images

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