Record de titres en Grand Chelem - 23, 25, 30... Jusqu'où ira Novak Djokovic ?

"Quand j'ai commencé ma carrière, je voulais gagner Wimbledon et devenir numéro un mondial." En dépit de toute sa force de conviction et de sa folle ambition, Novak Djokovic n'aurait jamais imaginé remporter 22 titres majeurs. Même une fois entré dans le cercle des vainqueurs en Grand Chelem en 2008 à Melbourne, il n'aurait pas osé rêver si loin et si grand. 15 ans plus tard, le voir achever sa carrière à plus de 25 titres apparaît pourtant aujourd'hui presque réaliste. Il ne faut jamais banaliser de tels accomplissements mais, de fait, gagner un Grand Chelem relève presque d'une forme de routine pour lui.

On peut même se demander où il en serait d'ores et déjà aujourd'hui s'il n'avait pas été privé de la moitié des tournois majeurs la saison dernière, sans oublier l'annulation de Wimbledon en 2020 à cause de la pandémie du Covid-19, sans parler de son exclusion en huitièmes de finale à l'US Open la même année. Novak Djokovic a remporté les deux derniers du Grand Chelem majeurs qu'il a disputés, à Wimbledon l'été dernier et en Australie ce dimanche, où il a survolé les débats. Sa marge sur la concurrence ne se réduit pas, bien au contraire. Oui, il a 35 ans, mais, au moins à court terme, il a toujours plus d'avenir que quiconque quand il s'agit de conquérir les plus grands tournois.

Mauvaise nouvelle pour le reste du circuit, il ne ressent aucune forme de lassitude, ni de perte d'appétit. Il en veut plus, toujours plus. "Je ne veux vraiment pas m'arrêter là, je n'en ai aucune intention", a-t-il affirmé dimanche après sa finale victorieuse contre Stefanos Tsitsipas. Lever le pied, ce n'est pas son genre et à y regarder de plus près, tous les voyants semblent au vert. "Je suis très satisfait de mon tennis. Je sais que physiquement, je me sens bien. Mentalement, je suis présent. Donc je suis confiant pour la suite. Je sais que j'ai une chance de gagner n'importe quel Grand Chelem, de battre n'importe qui." Le tout dit sans arrogance, comme un simple et inattaquable constat.

Le Serbe a conscience que beaucoup de choses peuvent se passer et il n'a sans doute pas oublié qu'après avoir signé le Grand Chelem à cheval sur deux ans à Roland-Garros en 2016, il avait ensuite traversé une période sombre et longue de deux années sans le moindre titre d'envergure. "Je ne prends rien pour acquis, assure-t-il. Je sais que beaucoup de joueurs veulent ces titres ou être numéro un mondial."

Mais pour l'heure, tout ou presque semble dépendre de lui à chaque tournoi du Grand Chelem. La question est donc de savoir combien de temps il prolongera sa carrière, et si possible avec ce niveau d'excellence. "Il lui reste sans aucun doute encore deux, trois ans", juge son entraîneur, Goran Ivanisevic. John McEnroe, lui, le voit remporter encore au moins "deux ou trois titres". "Roger en a gagné trois à 35 ans ou plus, rappelle-t-il. Rafa en a aussi gagné trois. Mais Novak est probablement le plus fort des trois au niveau athlétique et il n'a pas eu beaucoup de blessures dans sa carrière. Donc je dirais qu'il peut facilement en gagner au moins trois de plus."

Qu'est-ce qui pourrait bien inciter le "Djoker" à tirer le rideau sur sa carrière alors qu'il est si dominateur en dépit de son âge ? Côté physique, il ne semble pas vraiment inquiet. "Sur ce plan, je peux me maintenir au plus haut niveau, dit-il. Bien sûr, 35 ans, ce n'est pas 25, même si j'aimerais y croire. Mais j'ai le sentiment d'avoir encore du temps devant moi."

Alors, quoi ? Peut-être un choix de vie, une décision familiale. "Je ne sais pas combien de temps encore je vais continuer à jouer, parce que cela dépend de plusieurs choses, explique-t-il. Ça ne dépend pas que de mon corps. Je pense qu'il est extrêmement important pour moi d'avoir le soutien et l'amour de mes proches".

Lors de son départ à la retraite en septembre dernier, Roger Federer avait publiquement remercié son épouse, Mirka, pour lui avoir permis de continuer sa carrière jusqu'à la quarantaine. "Elle aurait pu m'arrêter il y a très, très longtemps. Mais elle ne l'a pas fait", avait évoqué le Suisse. A Melbourne, cette année, Djokovic avait lui aussi remercié sa femme, Jelena, pour son indéfectible soutien.

L'autre écueil pourrait venir d'une lassitude progressive qui éroderait son désir de victoires ou son appétit pour la compétition. "Il faut avoirla capacité de jouer et de garder l'équilibre avec ma vie privée, mais en même temps d'avoir la clarté mentale ou, comment dire, les aspirations pour vraiment s'efforcer de courir après ces trophées", résume le Serbe. Un jour, peut-être, il choisira de profiter des siens. Mais que ses fans se rassurent, ce ne sera pas pour tout de suite.

Très vite, Novak Djokovic va se tourner vers sa prochaine conquête, à Roland-Garros, où il pourrait devenir seul détenteur du record de victoires en Grand Chelem. "Là, nous étions chez nous et maintenant, nous allons chez Rafa. Là-bas, si Rafa entre sur le court, pour moi il est toujours le favori pour le titre", a tenu à rappeler Goran Ivanisevic. Mais Djokovic l'a rappelé lui-même : il peut gagner n'importe où, contre n'importe qui.

Tim Henman, le consultant d'Eurosport, a fait ses comptes : "Si on considère qu'il peut jouer encore trois ans au plus haut niveau, cela fait 12 chances de plus de gagner des Grands Chelems." Savez-vous combien Djokovic a gagné de titres sur ses douze dernières participations à un tournoi majeur ? Sept. Le calcul est vite fait et il ouvre des perspectives vertigineuses, avec l'approche possible de la trentaine de Grands Chelems...