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Roland-Garros : Stefanos Tsitsipas, le retour en grâce

Maxime Battistella

Mis à jour 09/10/2020 à 14:05 GMT+2

ROLAND-GARROS – Pour la deuxième fois de sa jeune carrière, Stéfanos Tsitsipas joue vendredi une demi-finale de Grand Chelem. Après une période de doute en Majeurs, le Grec impressionne à Paris où il rêve de décrocher la Coupe des Mousquetaires. Mais pour ce faire, il lui faudra déjà triompher de l'invincible (ou presque) Novak Djokovic.

Stefanos Tsitsipas in Roland-Garros 2020

Crédit: Getty Images

Mardi 29 septembre dernier. Pris par la fraîcheur d’un soir d’automne sur le court Suzanne-Lenglen, Stéfanos Tsitsipas est au bord du gouffre. Il vient de perdre les deux premiers sets de son 1er tour face à l’Espagnol Jaume Munar, 109e joueur mondial. Le Grec n’a pas le choix, il doit réagir, sous peine de faire ses bagages prématurément, pour la cinquième fois d’affilée avant la seconde semaine en Grand Chelem. Un énième camouflet potentiel pour celui qui avait pourtant claironné en novembre dernier après avoir gagné le Masters son nouvel objectif : s’adjuger un Majeur, malgré l’omnipotence du "Big 3".
Péché d’orgueil ou conscience aiguisée de sa propre valeur ? Le débat est ouvert mais un constat prend forme : Tsitsipas commence à faire un blocage au meilleur des cinq sets, comme Alexander Zverev avant lui. Et pourtant… Dix jours plus tard, après 15 manches gagnées consécutivement - un record pour lui -, voilà le fougueux Stéfanos aux portes de la finale de Roland-Garros. Que s'est-il donc passé ce 29 septembre ? "J'ai pris le temps de réfléchir : pourquoi est-ce que je fonçais comme cela, et pourquoi je ne prenais pas mon temps à l'échange ? Cela m'a aidé à calmer le jeu, et à redémarrer de manière nouvelle", expliquait l’intéressé sorti in extremis de sa torpeur en ce soir de 1er tour.
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Du cauchemar au bonheur absolu : la magnifique remontée de Tsitsipas face à Munar

Du traumatisme au déclic : Tsitsipas a bouclé la boucle

Décidément, le personnage dénote dans le tennis moderne : il n’hésite pas à s’épancher en conférence de presse, ce qui n’est pas pour nous déplaire il faut l’avouer, dans une époque où les discours convenus succèdent aux analyses réductrices. Quatorze mois plus tôt, Tsitisipas, encore lui, avait fait preuve d’une sincérité tout aussi désarmante après sa cruelle et épique défaite en cinq sets et plus de cinq heures contre Stanislas Wawrinka, toujours sur la terre battue parisienne.
"Ça fait longtemps que je n'ai pas pleuré à l'issue d'un match de tennis et là, ça a été le cas. J'étais si près de l'emporter, j'ai eu tellement, tellement de balles de break, j'étais si près... J'espère que cela va me servir à l'avenir. Mais pour l'instant, je suis incapable de voir comment et quand. Mon cerveau est vide, complètement vide. Se battre ainsi et perdre en cinq sets, c'est terrible", avait-il confié à l’époque, inconsolable. Cinq sets et le court Suzanne-Lenglen : voilà les deux points communs entre ce huitième de finale inoubliable en 2019 et ce 1er tour 2020 qui ne restera pas dans les annales, lui.
Sauf pour Stéfanos Tsitsipas. Car malgré les balles lourdes, la terre humide, un niveau médiocre par rapport à ses standards et un bras qui a parfois tremblé, cette fois, le Grec a gagné. Et d’une certaine manière, il a bouclé la boucle, réglé ses comptes avec lui-même et surmonté ce qui avait constitué, l’air de rien, un petit traumatisme à son échelle. "C'est tout dans la tête. Tout est dans le mental. Vous prenez les conditions, vous essayez d'en faire quelque chose. Et je suis très content d'avoir gagné ce match, d'avoir trouvé des solutions. Je me suis battu, et j'ai trouvé des petits détails qui m'ont permis de mieux jouer", a-t-il encore observé.
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Roland-Garros - Tsitsipas : "Je rêve de triompher en Grand Chelem"

Thiem, l'exemple à suivre

En quelque sorte, Tsitsipas a retrouvé lors de cette quinzaine le battant qui sommeillait en lui. Celui qui avait terrassé, à la surprise générale, son idole Roger Federer lors d’un autre fameux huitième de finale, cette fois à Melbourne il y a presque deux ans. En Australie, sa présence dans le dernier carré avait fait sensation. Cette année, c’est une confirmation après la lente mais complète digestion d’un échec qu’il n’avait pas vu venir. Si sa défaite contre 'Stanimal" l’avait autant meurtri, c’est aussi parce que, galvanisé par une progression fulgurante, le jeune Hellène se voyait déjà abonné aux sommets. Mais tout le talent du monde ne préserve pas de certains revers de fortune.
Il y a quelques semaines, Tsitsipas l’apprenait encore à ses dépens lors d’un 3e tour de l’US Open où la peur de gagner l’a saisi malgré 6 balles de match contre Borna Coric. Persuadé que seul le travail le tirerait de ce mauvais pas, il a retrouvé l’inspiration chez un de ses collègues : celui qui a mis fin au règne sans partage du "Big 3" en Grand Chelem, le tout récent vainqueur à New York. "Dominic (Thiem) a eu des résultats fabuleux. Il a joué deux finales de suite ici. C'est quelqu'un qui m’aide à comprendre le jeu, qui m'inspire pour aller encore plus loin, et suivre son exemple. Il est sympa hors du court, et c’est un accro au travail sur le court. C'est un joueur incroyable et passionné. C'est un bon ami. Je pense que je peux apprendre beaucoup de lui", a-t-il estimé.
Remis sur les rails de son ambition ultime, Tsitsipas se voit-il pour autant la concrétiser à Paris et imiter donc Thiem ? "Oui, c'est un rêve. J’espère triompher dans ces Grands Chelems depuis que je suis tout jeune. Je suis heureux d'être dans la position où je suis aujourd'hui. C'est quelque chose de très satisfaisant. Je vise des résultats spectaculaires", a-t-il réaffirmé. Le Grec n’a pas peur de dévoiler ses objectifs, on l’avait déjà compris après son triomphe lors du tournoi des Maîtres. Mais vraisemblablement, s’il veut aller chercher la Coupe des Mousquetaires, il devra renverser deux monstres en demi-finale et en finale : Novak Djokovic et Rafael Nadal. Une performance que seul Stan Wawrinka a accomplie dans un passé récent lors du même Majeur à l’Open d’Australie 2014.
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Djokovic : "Je ne veux pas trop en dire, je suis encore en course"

L'occasion idéale de faire tomber un "Djoker" diminué ?

A chaque jour suffit sa peine et le regard du numéro 6 mondial sera entièrement tourné vendredi vers l’invincible (à la régulière : 36 victoires et une défaite sur disqualification) "Djoker". La démonstration du Grec en quart de finale contre Andrey Rublev (7-5, 6-2, 6-2) en moins de deux heures en a impressionné plus d’un. De quoi aborder ce défi majuscule avec une confiance au beau fixe et une jauge d’énergie bien remplie. Le Serbe lui-même est conscient du danger.
"Ces 12 derniers mois, il a gagné le World Tour Finals. Il est très régulier dans ses résultats sur toutes les surfaces. Son service et son coup droit sont des armes. Il met beaucoup d'effet lifté sur son revers. Il vient au filet. Il peut jouer de façon agressive et bien défendre parce qu'il se déplace très bien. C'est vraiment un joueur très complet. Je pense que c’est un de ceux qui travaillent le plus. Il a une excellente équipe avec son père, Patrick Mouratoglou. Il a grandi dans son académie, une des meilleures académies de tennis au monde", a noté un numéro 1 mondial plus qu’élogieux après sa victoire laborieuse en quart de finale contre Pablo Carreño Busta.
Djokovic a d’ailleurs laissé planer le mystère sur son état physique, avouant souffrir de l’épaule et du cou sans en dire plus. Pour notre consultant Mats Wilander, l’alerte est réelle et il y a lieu de s’inquiéter. "C’est sûrement une blessure qu’il ressentira encore, et s’il ne prend pas un bon départ, ça pourrait être un problème. Son corps a clairement mis du temps à se chauffer mercredi et ce sera pareil vendredi et potentiellement dimanche en finale. Quel que soit le joueur concerné, ces deux prochains matches vont être brutaux en termes de durée et sur le plan physique. Ce sera deux marathons, il faudra beaucoup courir", a considéré l’ex-champion suédois.
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Un départ poussif, puis la démonstration : Tsitsipas a survolé son quart contre Rublev

Je ne suis plus un joueur de la Next Gen désormais, je suis adulte
Si le Serbe est effectivement diminué, l’occasion semble d’autant plus belle à saisir pour Tsitsipas qui l’a battu déjà à 2 reprises sur leurs 5 duels précédents. Mais l’intéressé refuse d’entrer dans ce potentiel jeu de dupes. "Un adversaire est un adversaire, qu'il soit blessé ou non. Je jouerai le jeu que j'ai à jouer. Et puis, on va arrêter là sur cette question, car j’aborde ce match avec la même intensité et la même concentration qu’au cours de mes derniers matchs", a-t-il asséné avec fermeté.
Tsitsipas ne le sait que trop bien, dominer un membre du "Big 3" au meilleur des cinq sets est un tout autre défi que de le faire sur un format plus court en Masters 1000. Ce sera d’ailleurs la première fois qu’il défiera Djokovic en Grand Chelem. A Melbourne en 2019, il était tombé sur un os au même stade en la personne de Rafael Nadal, mais il sortait alors d’un exploit face à Federer dont il n’était pas totalement remis. De l’eau a coulé sous les ponts. "Je ne suis plus un joueur de la Next Gen désormais. Je suis adulte", a encore affirmé le joueur de 22 ans. A lui de le montrer sur le court Philippe-Chatrier.
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