L'heure de Djokovic

Novak Djokovic sait qu'il aura la vie dure. Le Serbe ne s'est mis pas le public dans la poche en décapitant le tableau de sa tête de série N.2, Roger Federer, pourtant habitué à être vu ces six dernières années en finale de l'US Open. Et la fois où le Suisse aurait pu croiser Rafael Nadal à New York, le Serbe a balayé d'un coup droit la possibilité d'un combat inédit sur le court Arthur-Ashe entre les deux meilleurs joueurs du moment. Il faut remonter à 2003 pour trouver une finale de l'US Open sans la présence de Federer, quintuple vainqueur sur ce court et encore lauréat à Cincinnati il y a quinze jours. C'est dire la portée de la victoire du N.3 mondial. "Je ne sais pas comment j'ai fait, a indiqué Djokovic sur le court après son succès. C'est incroyable. C'est un plaisir de jouer ce type de match, le genre de match dont tu te souviens toute ta vie.C'est dur de décrire le sentiment qui m'habite, il y a dix minutes, j'étais à un point de perdre le match."

Son parcours jusqu'à sa 2e finale à New York n'a pas été un long fleuve tranquille. Souvenez-vous de son premier tour face à sa compatriote Viktor Troicki. Mené deux sets à un, le Serbe s'en est finalement sorti en cinq manches. Après Philipp Petzschner et James Blake, passés en trois sets, Djokovic a marqué les esprits une 2e fois, de façon plus positive cette fois-ci, en dominant de la même façon Mardy Fish, l'Américain le plus en vue de l'été, en huitièmes de finale. Du sang-froid, Novak en a encore eu en effaçant deux balles de match sur son service face à Federer en demi-finales, en deux coups gagnants dans une atmosphère "tendue" et "électrique" selon les propres dires du Suisse. "Sur ses balles de match, je fermais mes yeux et je tapais aussi fort que possible mon coup droit", a-t-il raconté sur le court. C'est maintenant les yeux grand ouvert qu'il s'avance vers un Rafael Nadal au sommet de sa forme et de sa confiance, mais qui, comme lui, a su augmenter indéniablement son niveau de jeu au fur et à mesure du tournoi.

Après un été bon mais pas resplendissant (demi-finale à Toronto et quart à Cincinnati), lui-même se disait hors du coup physiquement. Un coup de bluff ? Lui-même ne s'en gargarisa pas. Moins que son bon parcours à NY. Rejouer une finale majeure doit être un sacré soulagement pour lui. Djokovic attend cela depuis un an et demi et sa victoire à l'Open d'Australie. Depuis dix tournois majeurs, le Serbe attend sa nouvelle heure pour soulever son 2e trophée du Grand Chelem et ramasser les miettes que veulent bien laisser Roger Federer et Rafael Nadal depuis six saisons. Avec "seulement" quatre demi-finales jouées entre Melbourne 2008 et cet US Open, la stagnation du Djoker visant les sommets laissait perplexe. Sa "résurrection" ne pouvait donc se faire qu'aux Etats-Unis. Car, de tous tournois du Grand Chelem disputés, Djokovic a la plus belle constance de résultats à Flushing Meadows. En quatre ans, il y aura joué deux finales et deux demi-finales.

En janvier 2008 à Melbourne lors de sa première finale majeure, c'était Jo-Wilfried Tsonga en face de lui. Cette année, ce sera donc le N.1 mondial. "Rafa joue un tennis fantastique cette année, il est en quête d'un Grand Chelem, je vais faire de mon mieux pour récupérer et être prêt", a indiqué Djokovic, qui a dû batailler près de quatre heures alors que l'Espagnol avait plié son affaire en un peu plus de deux heures, plus tôt dans la journée. Peut-il se considérer comme prêt ? Après un tel match face à Federer, la réponse ne peut être que positive. Un peu plus même lorsqu'on remarque que Djokovic a remporté ses dernières rencontres sur dur face à Nadal en 2009 : en Masters Cup à Cincinnati et Paris et en Masters Cup à Londres, lieu de leur dernière entrevue officielle. Mais Rafael Nadal, qui mène 14 victoires à 7 en tout sur le circuit ATP, n'a jamais perdu une finale face au Serbe...