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US Open - Daniil Medvedev, pas le plus beau de tous mais souvent le meilleur des deux

Cyril Morin

Mis à jour 06/09/2019 à 17:14 GMT+2

US OPEN - Après un été canon qui l’a propulsé au 5e rang mondial, Daniil Medvedev continue sur sa lancée lors du dernier Grand Chelem de l’année. S’il a fait parler de lui pour son rapport ô combien abrasif avec le public new-yorkais, le Russe a surtout ressorti sa plus belle partition pour arriver en demie : celle qui fait déjouer l’autre.

Daniil Medvedev à l'US Open

Crédit: Getty Images

Une dégaine improbable. Daniil Medvedev, c’est d’abord ça. Un grand échalas de près de deux mètres dont rien ne laisse penser, à première vue, qu’il s’agit d’un des plus gros bosseurs du circuit. Voilà pour la première impression visuelle. Et que dire de la première vision technique ? Des gestes rustres et la sensation que le Russe est anachronique avec le tennis d’aujourd’hui. Anachronique mais ô combien efficace.
Gros service et jeu de fond de court très régulier. Grossièrement, Medvedev, c’est ça. Pas un coup droit canon, un revers atypique et des coups à plat, sans effets décisifs. Sur le papier, rien d’alléchant. Sur le terrain, c’est tout l’inverse. S’il ne fait pas lever les foules par son jeu, il fait en revanche perdre le fil à tout le monde. C’est ça l’ADN Medvedev.

L’homme qui a le plus gagné sur le circuit en 2019

Au fond, Medvedev revient aux origines du tennis. Un duel. Rien de plus. Il n’est pas le plus beau, n’a pas les meilleurs coups intrinsèques. Mais, en face à face, c’est souvent lui qui gagne. Cette saison plus qu’une autre puisque le protégé de Gilles Cervara affiche le plus grand nombre de victoires (49) devant Rafael Nadal et Roger Federer. Medvedev, c’est ce joueur que vous affrontez le dimanche, que vous croyez moins fort que vous car moins spectaculaire mais qui finit par rafler la mise.
Tout s’est accéléré cet été avec ces trois finales successives à Washington, Montréal pour finalement s’offrir son premier Masters 1000 à Cincinnati. On attendait Alexander Zverev (comme d’habitude), Stéfanos Tsitsipas voire le très précoce Felix Auger-Aliassime mais le représentant de la Next Gen le plus à même de prendre le pouvoir, c’est peut-être lui. Pour cela, il faudra battre un Grigor Dimitrov qu’il n’a plus joué depuis 2017 (1 victoire, 1 défaite). Au moins, le Bulgare sait à quoi s’attendre.
Ce n’est pas Stan Wawrinka qui dira le contraire. Après avoir sorti Novak Djokovic, le Suisse est tombé sur un os qu’il n’avait pas imaginé aussi indigeste. "Il a un jeu pénible, a expliqué Wawrinka après coup. Il a un jeu différent. Très solide, revers très plat. Il est très fort pour vous faire perdre votre rythme. Je n'ai pas bien commencé aujourd'hui, je n'ai jamais trouvé mon rythme".
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Touché mais inspiré, ce diable de Medvedev a complètement étouffé Wawrinka

Défait à chacun de leurs affrontements, l’offensif Tsitsipas ne disait pas autre chose il y a quelques semaines : "Je dirais que son jeu est désordonné mais dans le bon sens. C'est juste pénible de jouer contre lui, vous n'êtes jamais à l'aise". Même Kei Nishikori, l’un des meilleurs tacticiens du circuit, s’incline face à "l’intelligence tactique" hors-norme de son adversaire. Reprenant le titre du best-seller Winning Ugly de Brad Gilbert, le New York Times avait tout résumé dans un titre accrocheur "Daniil Medvedev gagne moche mais gagne beaucoup". Difficile de faire meilleur résumé.
La façon dont j’ai gagné était moche
Certains auraient pu se braquer. S’inventer une guerre contre les médias. Le Russe, lui, en joue. Sa première réponse post-succès sur Wawrinka dit tout du personnage qu’il est. "Après le match, c’était dur pour moi d’exprimer des émotions parce que j’ai trouvé que la façon dont j’ai gagné était moche, avait-il lancé, s’appuyant sur ses difficultés physiques du moment pour justifier sa stratégie. Je savais que je devais jouer sans rythme". Et le Suisse, tout grand champion qu’il est, a fini par tomber dans le panneau. Lui aussi.
À l’été, Medvedev évoquait lui-même les ressorts d’un jeu qu’il n’a aucun intérêt à lâcher : "Je dirais que j'essaie de faire rater aux joueurs des coups qu'ils n'ont pas l'habitude de jouer. J'ai gagné de nombreux matches simplement parce que l'adversaire ne s'habituait pas à mon jeu et ratait beaucoup".
A New York, le polyglotte - il parle parfaitement l’anglais et le français - a ajouté une corde à son arc pour faire déjouer. Involontairement, certes. Mais, face à Wawrinka, les nombreuses coupures médicales effectuées lui ont permis de renforcer ce faux rythme qu’il aime tant. Mais ce n’est pas tout. Car Medvedev s’est aussi fait un nom en devenant un ennemi public dans la capitale américaine.
Un mauvais geste envers un ramasseur et des sifflets du public lors de son 3e tour face à Feliciano Lopez ont changé la face de son tournoi. Certains auraient été tétanisés par une telle adversité. Lui s’en est nourri. Au point de remettre ça pendant son huitième de finale, "trollant" même la foule lorsqu’il a fini par lever les bras. C’est aussi dans ce genre d’ambiance que naissent certains grands champions.
Ainsi va la vie de tennisman de Medvedev. L’anti-héros par excellence, ou presque. Pas le plus beau certes, mais peut-être le plus efficace. Et puis, après tout, la beauté est une notion subjective.
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