US Open 2023 - Titouan Droguet, tombeur de Lorenzo Musetti : Des Challengers aux lumières de New York

Impossible de ne pas être pris de vertiges. Au moment de faire le bilan de cette première journée de l'US Open, l'histoire de Titouan Droguet saute aux yeux parce qu'elle est franchement rafraîchissante. Ce lundi, le Francilien disputait son premier match en Grand Chelem. Son premier sur le circuit ATP tout court. Et donc son premier match face à un membre du Top 20. Puisque le sport est aussi parfois une question de panache, Droguet a tout réussi d'un coup, à force d'audace, de couverture de terrain intelligente et de services bien tombés : il s'est offert le scalp de Lorenzo Musetti, en cinq sets, après 3h40 de combat (6-3, 0-6, 6-7, 6-3, 6-2). Le Français arrive de loin et c'est justement ce qui fait du bien dans son histoire.

A 22 ans, celui qui s'entraîne à la French Touch Academy du Cap d'Agde a sans doute compris que son potentiel était encore à développer. Une belle conclusion après six derniers mois complets, marqués par des progrès fulgurants et des résultats convaincants sur le circuit Challenger. Des finales à Cherbourg, Montauban, Modène ou Amersfoort et ce titre à Grasse. Ça n'a pas le même clinquant sur le CV que des titres ATP mais, dans la construction un joueur, ça a parfois la même importance. De ces succès, 24 sur ses 28 derniers matches, Droguet a tiré une confiance clairement visible depuis son arrivée à New York pour jouer les qualifications, où il a notamment éliminé Cristian Garin puis Tennys Sandgren.

"C'est une expérience incroyable depuis les qualifications, a-t-il avoué au micro d'Eurosport après sa victoire. Je suis venu une semaine en avance pour me préparer, je n'avais pas joué sur dur depuis un moment et je me retrouve dans mon premier tableau d'un Grand Chelem, premier match en trois sets gagnants et je gagne en cinq sets, en plus… C'est magnifique !" Impossible de le contredire, surtout après sa célébration toute en spontanéité. A l'écouter, ce genre de grand frisson, il l'espérait depuis longtemps.

"On se prépare pour ce genre d'évènements, a-t-il continué. Depuis que je sais que j'ai le classement pour jouer ce genre de tournois, c'est dans un coin de ma tête depuis un long moment." Encore fallait-il gérer tous les aléas d'une telle découverte : l'ambiance d'un Majeur, le match en trois sets gagnants, le statut de l'homme de l'autre côté du filet. A cet égard, son match aura été d'une maîtrise bluffante eu égard aux circonstances.

"C'était difficile car je ne sais pas trop comment gérer les matches en trois sets gagnants, a-t-il avoué. Normalement, à la perte du troisième set, j'ai perdu et je rentre chez moi. J'ai pris un break, je suis sorti, je me suis remobilisé pour repartir au combat. Et puis après, ce n'était que du bonheur avec un court rempli. J'ai juste kiffé le moment pour continuer à me battre jusqu'au bout."

Cet American Dream est encore plus dingue quand on se penche sur les chiffres. Sa victoire sur Musetti lui garantit de repartir de New York avec, a minima, 123 000 dollars. Depuis le début de sa carrière, il avait cumulé 119 000 dollars. Autant dire que le bond est immense. Mais l'essentiel est presque ailleurs. Cette victoire le place désormais aux portes du Top 150 et le rapproche des grands tableaux dont il rêve tant. "Il y a eu beaucoup de première fois cette semaine, a-t-il souri face à la presse après son exploit. C'est de l'expérience qui rentre et j'en profite au maximum. Je ne trouve pas les mots tant les émotions sont incroyables. C'est la première fois que je vis ça".

"En décembre, je m'étais fixé comme objectif de jouer les qualifs de Grand Chelem, avait-il expliqué à la FFT en février dernier. […] Si j'y arrive, on se fixera d'autres objectifs." C'est le moment visiblement. Car, mercredi, c'est un 2e tour à sa portée qui l'attend face à un autre qualifié, le jeune Jakub Mensik (17 ans) qui découvre lui aussi ces hauteurs. Pourquoi ne pas rêver plus loin avec un duel face à Taylor Fritz au 3e tour, forcément sur un grand court de Flushing ? Histoire que le grand écart soit total. Et que les vertiges continuent.