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US Open 2024 : "Comme Carlos Alcaraz, c'est rare ce qu'elle fait" : Heureusement, Karolina Muchova a animé le tournoi
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Publié 10/09/2024 à 23:45 GMT+2
Encore demi-finaliste de l'US Open et tout proche de la finale, Karolina Muchova a fait un retour au premier plan remarqué près d'un an après sa blessure sérieuse au poignet. Si l'ex-championne Chris Evert a voulu mettre en valeur son jeu en le comparant maladroitement à celui d'un homme, la Tchèque, et son tennis-panache, a animé une quinzaine bien terne, la finale mise à part.
Muchova, le retour en force
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Avec le recul, elle a sans doute réalisé le coup de cet US Open 2024. Et ce dès le 1er tour. Alors opposée à l'Américaine Katie Volynets et contrainte de défendre, Karolina Muchova est arrivée trop vite sur la balle, alors elle a brillamment improvisé. Faisant passer la raquette derrière son dos, elle a ajusté un lob prodigieux, avant de conclure l'affaire au smash. Voilà le genre d'exploit dont est capable la Tchèque, en toute décontraction et assez régulièrement dans une saison. Si près de disputer sa première finale à Flushing Meadows - elle menait 6-1, 2-0 balle de double break contre Jessica Pegula -, elle a ravi les foules.
À New York, elle a été un rayon de soleil dans une quinzaine bien morose malgré une finale de qualité entre Aryna Sabalenka et Jessica Pegula. Voir Karolina Muchova en action, c'est souvent l'assurance de passer un bon moment devant un match de tennis. Avec elle, le fan de petite balle jaune boude d'autant moins son plaisir qu'il sait qu'il est rare. D'ailleurs, la Tchèque aurait très bien pu ne jamais retrouver ce niveau après une blessure au poignet contractée il y a tout juste un an à… l'US Open déjà. Après neuf mois sans jouer et une opération au poignet en février, elle est passée de la 8e à la 52e place mondiale. Pas de quoi la décourager puisque son 6e tournoi depuis sa reprise a donc consacré son retour au premier plan.
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C’est le coup de la saison : le geste de défense fabuleux de Muchova
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Un palmarès pas à la hauteur de son talent
Souvent blessée, Muchova renaît perpétuellement de ses cendres. C'est un peu l'histoire en clair-obscur de la carrière de cette joueuse si spéciale, bien que pas (encore ?) titrée en Grand Chelem.
"Indépendamment des blessures, je pense qu'elle a payé jusqu'ici un manque de caisse physique par rapport aux joueuses ultra-puissantes que l'on a aujourd'hui, fait remarquer Justine Henin, consultante pour Eurosport. Et quand il y a des petites failles physiques, le mental suit moins aussi : on sent toujours un peu qu'elle s'excuse d'être là. Elle est discrète et sobre, des qualités que j'aime beaucoup. Mais a-t-elle pleinement conscience de ce qu'elle est capable de faire sur un court de tennis ? Elle a évolué sur ce plan-là l'an dernier néanmoins et j'espère qu'elle ira chercher un grand titre un jour parce qu'elle joue d'une telle manière… ça joue autrement par rapport à la majeure partie des filles."
C'est vraisemblablement aussi ce qu'a voulu dire Chris Evert, au micro d'ESPN, quand elle commentait le 8e de finale de Muchova, en affirmant que cette dernière "voulait jouer comme un homme". Reprise de volée par Ons Jabeur notamment, l'ex-championne américaine a précisé sa pensée en faisant l'éloge des qualités au filet et de déplacement qui distinguent la Tchèque de la plupart de ses collègues féminines. Ces dernières frappent fort à plat en fond de court, un tennis stéréotypé qu'on retrouve néanmoins de plus en plus chez les hommes également.
Il n'empêche, l'intéressée elle-même affirme s'inspirer de son idole de jeunesse, Roger Federer, et de Novak Djokovic. Son goût pour le jeu au filet, la qualité de ses slices en revers pour changer le rythme des échanges ou encore son toucher en sont les illustrations. "Globalement, elle joue avec l'adversaire. Elle n'a pas seulement comme objectif de frapper fort dans la balle, d'y imprimer une cadence. Elle joue en fonction de ce qu'elle aime faire sur un court, elle joue le tennis qu'elle veut jouer. Et puis, elle s'adapte aussi très bien à ce que son adversaire essaie de mettre en place. Quand on voit du retour-volée dans le tennis féminin, ça me parle beaucoup. On en voit peu chez les hommes aussi de toute façon", souligne Justine Henin.
Peu importe l'inspiration, un remède contre les stéréotypes tennistiques
Et la quadruple championne de Roland-Garros d'enchaîner : "Je ne vois pas de polémique derrière tout ça. Je suis parfois la première à dire quand je vois certaines préparations en coup droit chez certaines joueuses que ça me fait davantage penser à la manière dont préparent les joueurs dans leur globalité. Il y a des différences, et ce ne sont pas des généralités heureusement. Il n'y a pas de problème à en parler. Et où va-t-on chercher son inspiration ? Je me distinguais aussi par mon jeu et je suis allée chercher les inspirations tant chez Steffi Graf que chez Stefan Edberg. C'était lié à deux choses : leur jeu et leur personnalité pas excentrique qui parlait à l'enfant que j'étais."
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Muchova pleine d'autorité écarte Paolini et file en quarts : les temps forts en vidéo
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Dans un tennis moderne de plus en plus physique, marqué par l'uniformisation des surfaces, la force de frappe et la constance à l'échange ont été érigées en valeurs suprêmes. Il en résulte un danger, que ce soit chez ces dames ou ces messieurs : le formatage du style, que tout le monde joue de la même manière. Au cœur de cette dynamique, Muchova fait figure d'ovni - et ce même si Aryna Sabalenka a montré en finale qu'elle était plus qu'une simple cogneuse. Son sens tactique et son panache apparaissent comme un remède contre un jeu de plus en plus stéréotypé, et donc contre l'ennui.
"Ce qui me frappe, c'est cette envie de faire beaucoup de choses, mais de les faire de manière pas non plus trop instinctive : il y a des schémas bien en place. C'est une fille qui a un bon œil, elle est capable d'observer où sont les espaces disponibles et de ralentir sa vitesse pour aller chercher un angle qui soit différent. Tout ça est assez mûri et construit", observe encore Justine Henin.
Avant de conclure : "Ce n'est pas facile de se donner du temps dans le tennis d'aujourd'hui. Elle arrive à le faire par différents biais. Il y a une intelligence de jeu. Quand je la vois jouer, c'est complet. Elle arrive à venir bousculer ces rivales ultra-puissantes d'une autre manière et j'aime bien ce contrepied, cette idée de jouer différemment. Et c'est agréable évidemment. Hommes et femmes confondus, avec Alcaraz qui nous impressionne mais dont on souligne la créativité, c'est rare ce qu'elle fait."
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