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Arsenal, pourquoi je n'y crois pas

Bruno Constant

Mis à jour 16/12/2016 à 14:49 GMT+1

PREMIER LEAGUE - Emporté par la folie de Goodison Park face à Everton (1-2), les Gunners ont chuté pour la première fois en championnat depuis le 14 août. Inéluctable mais inquiétant avant le choc à Manchester City, dimanche, face à une formation de Guardiola également sous pression.

Olivier Giroud lors de Leicester - Arsenal en Premier League 2016-2017

Crédit: Panoramic

La presse anglaise s'amuse à reprendre certaines expressions françaises dans ses titres comme ses articles. Concernant Arsenal, il y en a une qui revient très souvent : "déjà-vu", que nos amis britanniques prononcent "déjà-vou". On peut bien se moquer de leur accent, ils le font aussi. Après la défaite des Gunners à Everton (1-2) mardi dans l'enfer de Goodison Park, il y avait ce sentiment d'avoir déjà vécu cette rencontre des centaines de fois et qui voit Arsenal mener, contrôler avant de s'effondrer inexplicablement.
Cette chute, au bout d'une série d'invincibilité longue de quatorze journées, devenait presque inéluctable. Elle n'est pas excusable pour autant. C'était un match du mardi soir, en plein mois de décembre, dans le nord de l'Angleterre, avec du vent et une pluie fine, qu'aucune des deux équipes ne semblaient vouloir jouer. Mais, face à un adversaire qui ne mettait pas un pied devant l'autre, les Gunners ont eu l'occasion de tuer le suspens. Je pense notamment à cette frappe d'Özil, trop gourmand en voulant aller chercher la lucarne.
Olivier Giroud et ses coéquipiers à Arsenal en Premier League - 2016

Qu'est-ce qu'Özil faisait là ?

A Everton, Arsenal a concédé deux buts sur des centres, deux suite à une erreur de marquage, le second sur corner. Certains notaient que c'était le premier de la saison. Ok, sauf que le marquage en zone est un problème historique à Arsenal où le choix d'Arsène Wenger a souvent fait débat. Cette fois, c'est Mesut Özil qui était à la faute. Oui, vous avez bien entendu : Özil. Ce n'est pas forcément le premier nom qu'on cocherait pour s'opposer à la montée d'un défenseur central adverse, en l'occurrence Ashley Williams, capitaine de la sélection galloise, dont le jeu de tête est connu de tous. Et on peut déjà se demander ce que le meneur de jeu allemand faisait là. Au vu des images, il n'avait pas envie d'y être et n'a d'ailleurs pas esquissé le moindre geste si ce n'est celui de s'écarter devant la détente de Williams.
Martin Keown raconte combien il était important pour lui, lorsqu'il portait le maillot des canonniers, de rappeler ses attaquants ou milieux offensifs à leurs devoirs défensifs sur coups de pied arrêtés, quitte à leur crier dessus. Et ceux qui se souviennent de l'image de Keown hurlant à la face de Van Nistelrooy ont une idée de l'influence que pouvait avoir le vieux briscard anglais sur ses coéquipiers. Mais, mardi soir, personne n'a parlé à Özil, personne n'a commandé la défense. On jouait la 86e minute et c'était l'une des dernières chances des Toffees d'arracher la victoire...

Pas taillé pour le titre

Ce genre de détails, cette manière de lâcher prise, de ne pas tuer le match, cette défaite... Tout cela a confirmé l'intime conviction que je porte depuis le début de saison : cette équipe n'est pas taillée pour le titre. Il lui manque toujours quelque chose, pas grand chose, mais suffisamment pour arriver derrière Chelsea, Manchester City et Liverpool. C'est toujours comme ça avec Arsenal. Chaque saison, on a envie d'y croire. Ne serait-ce que pour voir Arsène Wenger finir en beauté et soulever une dernière fois le titre avant son départ. Il le mériterait, pour bons et loyaux services. Alors on essaie d'y croire sans trop vraiment y croire. Non pas qu'Arsenal n'ait pas une bonne équipe mais parce que ses dirigeants se refusent à faire les efforts nécessaires que font ses concurrents.
Mesut Ozil lors de Arsenal - Stoke City en Premier League le 10 décembre 2016
On a encore du mal à comprendre comment ils ont pu passer à coté de Kané et/ou Mahrez. S'ils ne sont pas écartés avant dans la saison, les Gunners craquent en mars au moment où leurs illusions européennes s'envolent. Et, cette année encore, il y a eu un air de déjà-vu lors du tirage des huitièmes de finale de la Ligue des Champions. Comme un mauvais présage. Malgré sa première place de groupe, Arsenal a semblé maudit en tirant le Bayern Munich pour la troisième fois en cinq ans. Même si quelque chose me dit que, avec ce match aller en Bavière, Alexis en pointe, la vitesse d'Özil, Walcott et Oxlade-Chamberlain en contres, les Gunners ont davantage de chances... Mais revenons au championnat.
Cette saison, Arsenal est resté dans la roue du leader (City puis Chelsea), un peu caché, pas vraiment convaincant mais avec l'espoir que ses victoires difficiles prendraient plus de poids avec le temps et la progression de son jeu. Cette défaite est forcément un coup d'arrêt. Elle est inquiétante car elle arrive au mauvais moment. Juste avant un choc à Manchester City, dernier rendez-vous avant une période des fêtes durant laquelle les Londoniens ont parfois perdu pied. Or, cette saison, Arsenal peine face à ses concurrents directs : défaite face à Liverpool (3-4), nuls concédé face à Tottenham (1-1) et arraché miraculeusement à Old Trafford contre Manchester United (1-1). A ce jour, une seule victoire, face au Chelsea de Conte (3-0) mais qui n'a plus rien à voir avec le Chelsea d'aujourd'hui. Et, contre City, Arsenal a autant de chances d'exploser que d'enfoncer la formation de Guardiola. Malheur au perdant qui pourrait se retrouver à neuf (Arsenal) ou dix (Manchester City) longueurs du leader (Chelsea, qui se rend à Palace). Ce serait presque déjà un adieu au titre.

Guardiola a-t-il sous-estimé la Premier League ?

La pression est tout autant sur Guardiola qui, malgré le succès face à Watford (2-0) mercredi, reste marqué par les deux claques successives contre Chelsea (1-3) et à Leicester (2-4) où on a pu se demander comment un technicien aussi réputé a pu aussi mal anticiper d'où venait le danger des Foxes (le contre et les attaques rapides). Comme si le Catalan n'avait pas préparé ce match, comme s'il se pensait supérieur à cette équipe de Leicester qui a emballé le monde entier la saison passée sur un modèle simple : défendre bas et jouer en contre. Cela ressemblait à de l'arrogance et ce n'est pas la première fois depuis son arrivée.
Il y a quelques semaines, Guardiola avait renvoyé les journalistes anglais à leurs chères études sur l'intensité de "leur" championnat : "Aucun d'entre vous n'est allé en Liga ou en Bundesliga pour savoir à quel point ces championnats sont intenses." Depuis, le Catalan a fait machine arrière, admettant que cette Premier League était plus dure qu'il ne le pensait. Peut-être a-t-il sous-estimé la difficulté du championnat anglais. Après Leicester, il s'est attaqué à la culture anglaise du tacle, affirmant qu'il n'entraînait pas ses joueurs au tacle. On voyait où il voulait en venir : avoir la possession, jouer, marquer des buts. Il pouvait le penser mais pas le dire. Pas dans un royaume où les supporters se lèvent pour applaudir le tacle de l'un de leurs joueurs, symbole de bravoure et de combativité. Cela ressemblait à une passe d'armes avec les médias britanniques. D'autres s'y sont aventurés avant lui (Mourinho, Van Gaal...) mais c'est un combat perdu d'avance.
Bruno Constant fut le correspondant de L'Equipe en Angleterre de 2007 à 2016. Il collabore aujourd'hui avec RTL, Europe 1 et Rfi en tant que spécialiste du football anglais et vous livre chaque sa semaine sa chronique sur la culture foot de Sa Majesté.
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