Le forfait de Julian Alaphilippe, un mal pour un bien pour Quick-Step en vue des Ardennaises ?

Le postulat de départ est brutal. Un brin exagéré. Et pourtant. Blessé à un genou après sa chute au Tour du Pays Basque, sommet d'une semaine galère, le récent porteur du maillot jaune sur Paris-Nice ne pourra défendre ses chances sur les Ardennaises, ces courses qui l'ont fait connaître du grand public avec trois podiums (deux 2e places à la Flèche Wallonne, une à Liège-Bastogne-Liège) et cinq Top 10 en sept participations.

La forme affichée par Alaphilippe à Paris-Nice - une victoire d'étape et une cinquième place finale - puis à Milan-San Remo - à la lutte pour la victoire mais battu par Kwiatkowski et Sagan au sprint - avait fait naître le rêve d'une victoire, enfin, sur une Ardennaise cette saison. Sa formation Quick-Step Floors devait présenter une hydre à trois têtes Alaphilippe-Gilbert-Martin mais va devoir se "contenter" d'un duo composé du dernier vainqueur du Tour des Flandres et du troisième de Paris-Nice 2017. Moins fort évidemment mais plus facile à gérer ?

Quick-Step, c'est l'histoire d'une armada parfois gagnante (Terpstra à Roubaix en 2014, Gilbert sur les Flandres en 2017) mais aussi souvent raillée pour son incapacité à gérer ces fameux "problèmes de riches". Et pour cause, entre 2013 et 2017, les hommes de Patrick Lefevere, n'ont levé les bras sur des grandes courses d'un jour qu'à trois reprises : Terpstra sur Paris-Roubaix 2014 donc, Kwiatkowski sur l'Amstel Gold Race 2015 et Gilbert sur le dernier Tour des Flandres.

La victoire du Belge sur le "Ronde" et celle de Terpstra à Roubaix sont les deux seules fois où Quick-Step a su profiter de son avantage numérique parmi les prétendants. Dans le détail, les Belges ont toujours été plus forts avec un leader unique (souvent Tom Boonen). C'est pourquoi le forfait d'Alaphilippe n'est peut-être pas une si mauvaise nouvelle pour une équipe toujours très bien armée sur les courses d'un jour, parfois même trop.

La position du Français au sein de son équipe a toujours été ambigüe. Chantant sans cesse les louanges d'un coureur qu'elle a été cherchée dans les rangs de l'équipe amateur de l'Armée de Terre, la direction rechigne à lui accorder un statut de leader à part entière. Ainsi Paris-Nice, le travail abattu par Alaphilippe pour Kittel sur la folle première étape lui a été fatal dans le final. Le Français a été un peu juste pour décramponner totalement Arnaud Démare dans la dernière côte, et il l'a finalement payé au sprint, où le coureur de la FDJ s'est imposé.

Surpuissant lors du contre-la-montre au Mont Brouilly, trois jours plus tard, Alaphilippe a une nouvelle fois montré sa force et s'est imposé naturellement comme le coureur numéro un de Quick-Step pour le reste de la semaine. Voir Dan Martin lui tomber dans les bras à l'arrivée avait d'ailleurs surpris bon nombre d'observateurs. L'Irlandais, contrairement à Philippe Gilbert, devenu l'un des meilleurs amis d'Alaphilippe, ne semblait pas avoir beaucoup d'atomes crochus avec le Français. Et dans la courte histoire de leur collaboration (depuis 2016), il a souvent été plus "protégé" par son équipe, d'où le sentiment d'injustice chez les fans d'Alaphilippe et l'impression d'une sorte de rivalité entre les deux coureurs.

Alaphilippe absent, les regards seront donc braqués sur le duo Gilbert-Martin. Le Belge arrivera en confiance après son magnifique succès au "Ronde" mais aura-t-il récupéré ? Aborder les Ardennaises après une grosse campagne de Flandriennes, Gilbert ne l'a plus fait depuis 2011… année de son triplé historique Amstel-Flèche-Liège. Sera-t-il le leader de Quick-Step avec Martin en "roue de secours" de luxe ? Quelles seront les rôles des Vakoc, Jungels, les jeune qui montent, ou d'un Brambilla, capable d'un coup lui aussi ? Même sans Alaphilippe, Quick-Step a encore beaucoup d'équations à résoudre pour espérer contrarier la tornade Valverde.