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Deux chutes, une épaule démise et un Paris-Nice envolé : Primoz Roglic a vécu l’enfer

Jean-Baptiste Duluc

Mis à jour 14/03/2021 à 20:44 GMT+1

PARIS-NICE – Tombé dans chacune des deux descentes qui suivaient le passage sur la ligne d’arrivée, Primoz Roglic n’a réussi qu’une seule fois à revenir et a fini par voir sa victoire sur Paris-Nice, si certaine au départ de l’étape, s’envoler, au bout d’une journée où rien ne lui a été épargné. Récit des 92km en enfer du Slovène.

Un scénario dingue et le calvaire de Roglic : le résumé de l'ultime étape

"Ce n’était vraiment pas l’étape qu’on espérait…" Les mots, blasés et presque dégoûtés, tombent de la bouche de Primoz Roglic juste après l’arrivée. Ils sont justes mais témoignent très mal du caractère complètement invraisemblable de cette 8e et dernière étape de Paris-Nice où le Slovène, pourtant leader serein au départ, aura vécu un enfer de tous les instants, ou presque. Touché, mentalement comme physiquement, le double vainqueur du Tour d’Espagne finira l’étape à plus de trois minutes des leaders, laissant ainsi s’échapper une victoire finale que tous lui promettaient déjà.

Un début d’étape sans répit

Avec seulement 92,7 kilomètres au programme de cette ultime étape, pas question d’attendre le final pour tenter sa chance. Dès le départ, le peloton est parti à bloc et, pendant une vingtaine de kilomètres, il a été impossible de s’organiser pour toutes les équipes. "C’était le chaos total, racontait d’ailleurs Maximilian Schachmann. J’ai crevé après 7km et je pensais déjà avoir perdu la course parce que ça roulait à bloc à ce moment-là. Mais, grâce à mes équipiers, j’ai pu rentrer finalement". Un début d’étape qui n’a permis à aucun coureur de respirer une seule seconde, les laissant déjà un manque d’air et de lucidité au moment d’aborder la première descente derrière Levens.
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Et en plus, il a falli tomber : La (grosse) frayeur de Roglic

Première chute, gros dégâts…

Cette descente, Primoz Roglic en fera sans nul doute beaucoup de cauchemars dans les prochains jours. Une descente qui avait déjà fait des dégâts sur la 1re étape du Tour de France 2020 et que les coureurs ont abordé avec appréhension. "Je ne sais pas ce qu’il s’est passé avec les Jumbo-Visma mais la descente était très dangereuse, très glissante, expliquait Schachmann. On allait très doucement dans la descente pour ne pas tomber. J’ai même perdu quelques mètres à certains moments mais il fallait mieux ça que tomber comme Roglic". Car le Slovène, lui, n’a pas su éviter la chute lors du premier passage sur cette section, aux alentours du km 30.
Alors que la course n’était pas encore "lancée", la Jumbo-Visma a pu limiter les dégâts immédiats. "On a réussi à le ramener à l’avant et on a alors tenté de contrôler l’allure du peloton", expliquait Steven Kruijswijk. Mais Roglic, lui, était bien plus sérieusement touché par cette chute qui l’a notamment marqué au niveau de la cuisse droite. Mais pas seulement. "J’ai fait des erreurs aujourd’hui, avouait-il après l’étape. Et sur la première chute, je me suis démis l’épaule gauche. Mais les chutes auraient pu être bien pires". Elles lui couteront déjà bien assez chères comme ça.
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Primoz Roglic

Crédit: Getty Images

Deuxième chute, grosses conséquences

Revenu dans le peloton, Primoz Roglic pensait alors en avoir fini avec ses malheurs du jour. Ils ne faisaient que commencer. Mal remis de sa première chute, forcément pas confiant au moment d’aborder une deuxième fois cette descente, le Slovène part une nouvelle fois à la faute. Cette fois, il n’est pas physiquement touché (même si ça n’a pas arrangé les séquelles de la première) mais son vélo, lui, l’est. Obligé de remettre en place son dérailleur, il perd de précieuses secondes et se retrouve distancé par le peloton qui roulait déjà à vive allure. "Cette fois, c’était plus compliqué de l’attendre parce que la course était lancée, raconte Schachmann. Il y avait une grosse échappée devant et nous devions y aller. On voulait jouer l’étape à ce moment-là".
Une version des faits pas vraiment corroborée par les Jumbo-Visma. "La deuxième chute nous a complètement pris de court…, avoue Kruijswijk. Il a été pris et ça a commencé à rouler devant". Toujours est-il qu’au bas de la descente, la situation est encore bien loin d’être catastrophique pour Roglic, repoussé à une grosse centaine de mètres seulement de la queue du peloton et qui retrouvera qui plus est pas moins de trois équipiers pour aborder la vallée. Il ne s’en doute pas encore, mais il ne reviendra jamais.
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Primoz Roglic (Jumbo-Visma) lors de la 8e étape de Paris-Nice 2021

Crédit: Getty Images

Pas de bordures mais le vent puni Roglic

Peu présent sur les premières étapes de Paris-Nice où il était pourtant attendu, le vent aura finalement bien joué son rôle sur cette 79e édition, pour le plus grand malheur de Primoz Roglic. Repoussé à une dizaine de secondes du peloton au moment d’aborder la vallée du Var, le Slovène de la Jumbo-Visma se retrouve opposé à un peloton bien décidé à s’allier (Bora-Hansgrohe, Astana et Cofidis notamment) pour rouler le plus fort possible mais aussi et surtout au vent. Un élément pas forcément attendu à cet instant de la course mais terriblement crucial dans une chasse aussi exposée. "On a tenté de la ramener, on a tout donné mais, avec le vent qu’il y avait dans la vallée, ça n’a pas été suffisant et on n’a pas réussi à boucher le trou", racontait Kruijswijk, qui s’est pourtant sacrifié alors avec Bennett et Oomen. Et, lorsque ses équipiers se sont écartés, Roglic semblait tout proche d’opérer la jonction. Il n'en a rien été.

Un raid solitaire inutile mais courageux

Mètre après mètre, seconde après seconde, Primoz Roglic ne fera plus que perdre du temps sur un peloton plus frais, moins entamé physiquement comme mentalement. Commence alors un vrai chemin de croix pour le Slovène, qui aura la force et le courage de ne jamais rien lâcher, malgré un retard de plus en plus important. Bien aidé par-ci par-là par des relais bienvenus de coureurs distancés (Campenaerts, Bouhanni, la Groupama au départ), Roglic se livre à un combat contre le vent, ses adversaires et lui-même, pour ne rien lâcher. "J’ai tout donné mais malheureusement je n’ai jamais pu revenir sur les premiers, regrettait-il. Quand je suis en chasse, je me dis juste qu’il faut que je donne tout ce que j’ai pour revenir. Je ne pense qu’à ça. C’est toujours un combat contre toi-même et si tu gagnes ce combat, tu donnes toujours le maximum. A l'arrivée, j’ai tout donné mais ça n’était pas suffisant".
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Le cuissard arraché et seul à la poursuite des favoris, Roglic n'a pas lâché

Admirable dans l’état d’esprit et dans l’attitude, Primoz Roglic a fait honneur à son maillot jaune jusqu’au bout du bout. Malgré les chutes. Malgré la douleur. Malgré la déception. "Sans cette deuxième chute, je pense qu’on aurait pu garder le maillot, estimait Kruijswijk. C’est vraiment dommage pour lui quand on voit comment il était fort jusqu’ici…" Avant cette étape, Roglic avait même réussi à résigner ses adversaires directes. "Pour être honnête, on ne voyait pas trop ce matin ce qu’on pouvait faire pour renverser Roglic et la Jumbo-Visma, avouait Schachmann. On voulait d’abord défendre la 2e place et jouer l’étape… » Mais on ne peut pas résigner le destin, bien décidé à s’acharner contre Primoz Roglic.
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