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Angleterre : avec Southgate, tout est plus clair

Bruno Constant

Mis à jour 09/06/2018 à 15:02 GMT+2

COUPE DU MONDE - Des choix forts, une communication limpide, un système à trois défenseurs établi, un jeu séduisant… Les deux rencontres de préparation face au Nigeria (2-1) et au Costa Rica (2-0) ont confirmé le bon management du sélectionneur des Trois Lions qui tranche avec celui de ses prédécesseurs. Et c’est déjà un progrès.

England boss Gareth Southgate

Crédit: Getty Images

Par le passé, les relations entre le sélectionneur de l’Angleterre et son équipe n’ont pas toujours été simples, loin de là. Sven Goran Eriksson n’a jamais su trancher entre Gerrard, Lampard, Scholes et a payé son manque de chaleur sur le bord de la touche. Steve McClaren était condamné avant même ses débuts et l’histoire a donné raison à ses détracteurs. Fabio Capello n’avait pas cru bon d’améliorer son Anglais ni de s’intéresser à la culture anglaise et a payé sa rigidité tactique autant que sa communication dans l’affaire Terry-Ferdinand. Roy Hodgson a échoué lors du Mondial 2014 puis à l’Euro 2016 en laissant Wayne Rooney sur le terrain et en faisant tirer les corners à… Harry Kane tandis que l’Angleterre a finalement échappé au retour du "kick and rush" de Sam Allardyce emporté par un scandale extra sportif après seulement une rencontre et soixante-sept jours en poste.
A l’inverse, les mois qui ont rapproché Gareth Southgate de la Coupe du monde paraissent presque trop calmes. Grâce à des choix forts et une communication simple et directe, le jeune sélectionneur de l’Angleterre (47 ans) a su éviter les polémiques et les embûches. Au lendemain des deux rencontres de préparation remportées face au Nigéria (2-1) et au Costa Rica (2-0) avec style, au moins lors des quarante-cinq premières minutes, celles qui comptent vraiment avant l’inévitable ribambelle de remplacements, la formation des Trois Lions s’avance vers la Russie avec davantage de certitudes que d’ambition, certes. Mais la clarté du plan de jeu proposé par son sélectionneur place l’Angleterre sur les bons rails, deux ans après le fiasco islandais de l’Euro.
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Gareth Southgate à Wembley

Crédit: Eurosport

Rooney, Hart, Wilshere : des choix forts

International à cinquante-sept reprises, manager de Middlesbrough avant de prendre en mains la sélection des U21 puis les A en 2016, Gareth Southgate a longtemps eu l’image d’un garçon trop gentil et aux manières bien trop conventionnelles pour la dureté du très haut niveau. Mais, en l’espace de vingt mois, le successeur au pied levé d’Allardyce a écarté Wayne Rooney de la sélection, puis Joe Hart des vingt-trois et n’a pas retenu les éternels espoirs que sont Wilshere et Walcott. Le "manager" de l’Angleterre a fait ce que d’autres se refusaient avant lui : trancher pour le bien de l’équipe et prendre des décisions fortes.
En ne retenant pas Rooney pour les rencontres face à l’Ecosse et la France en juin 2017 alors que celui-ci sortait d’une saison difficile à Manchester United, Southgate a habilement poussé le joueur de 31 ans à la retraite, se débarrassant au passage d’un cadre usé par quatorze années de carrière et qui avait notamment plombé l’Angleterre à l’Euro 2016. Avec l’arrêt de Rooney, il a ainsi officiellement tourné la page de la "Golden generation" (Beckham, Gerrard, Lampard, Scholes, Ferdinand, Rooney) pour se consacrer au développement d’une autre génération prometteuse emmenée par Kane, Alli et Rashford.
Il a également mis un terme au trop long feuilleton Joe Hart en écartant celui qui était encore son gardien numéro un il y a six mois mais en difficulté à West Ham cette saison. Southgate a misé sur trois jeunes talents : Pickford (24 ans, Everton), Butland (25 ans, Stoke) et Pope (26 ans, Burnley), dix sélections à eux trois. Enfin, il n’a pas cédé à une certaine pression populaire qui aurait aimé voir Wilshere dans les 23. Malgré le profil assez rare du Gunner dans le football anglais qui offrait davantage de maîtrise dans la possession, Southgate n’a pas souhaité prendre le moindre risque avec un joueur qui avait eu la mauvaise idée de se blesser en mars à l’occasion de son retour en sélection après deux ans d’absence.
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Wayne Rooney et Gareth Southgate

Crédit: AFP

Une communication simple et directe

Dans un cas comme dans l’autre, le sélectionneur des Trois Lions a été franc dans ses explications : le manque de temps de jeu pour Rooney, les blessures pour Wilshere, la méforme pour Hart tout comme la justification concernant l’absence de Smalling en défense, pas suffisamment à l’aise avec le ballon dans le jeu qu’il souhaite mettre en place. C’est clair et limpide. La gestion du cas Sterling est un autre exemple. Arrivé avec un jour de retard au rassemblement, le joueur de Manchester City a conservé sa place dans le onze face au Nigeria. "J’ai été joueur… ", a lancé Southgate qui sait à quel point la moindre sanction si près d’un grand tournoi peut s’avérer néfaste.
A deux semaines du début de la Coupe du monde, il a préféré régler le problème en interne. Rigide et souple à la fois. "Je savais que, si je le laissais sur le banc, après tout ce qui s’est passé, cela aurait fait toute une histoire (dans les médias)", a-t-il reconnu. Au final, c’est davantage le manque d’efficacité dans le dernier geste du joueur contre le Nigeria et la performance remarquée de Rashford face au Costa Rica qui pourraient modifier la donne. Le sportif, rien que le sportif. Malin. Southgate ne tourne pas autour du pot et dit les choses, presque sans filtre. C’est rafraichissant et on aimerait que cela soit toujours comme ça. Notamment chez les Bleus de Didier Deschamps…
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Gareth Southgate

Crédit: Getty Images

Une défense à trois et rien d’autre

La clarté de l’approche de Southgate vaut également pour le système de jeu mis en place : ce sera une défense à trois et rien d’autre. Si la qualification pour le Mondial a été acquise sur la base d’un "back four", le changement d’organisation a été décidé au cœur de l’été 2017 et a été introduit lors des rencontres amicales. Organisé sur le modèle d’un 3-5-2, la seule variante devrait concerner la présence d’un ou deux offensifs dans le milieu à trois.
Le onze qui sera aligné face à la Tunisie le 18 juin devrait d’ailleurs ressembler à celui qui a débuté face au Nigeria samedi dernier (Pickford – Walker, Stones, Cahill – Trippier, Lingard, Dier, Alli, Young – Sterling, Kane), à quelques exceptions près : Alexander-Arnold ou Trippier, qui a marqué des points contre le Nigeria, à droite, Dier ou Henderson, son ancien capitaine revenu tardivement après la finale de la Ligue des champions de Liverpool, devant la défense et enfin Sterling ou Rashford, impressionnant face au Costa Rica, pour épauler Kane en pointe.
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Gareth Southgate

Crédit: Getty Images

Objectif… 2022

En écartant quelques anciens qui semblaient en bout de course au profit de jeunes prometteurs mais inexpérimentés, Gareth Southgate n’a pas fait mystère de l’objectif de l’Angleterre : "Il est important d’investir notre temps sur des joueurs dans lesquels nous voyons un grand avenir." Un message en totale adéquation avec sa fédération. Depuis l’échec au Mondial 2014 qui avait vu l’Angleterre rentrer chez elle dès les poules, les hautes instances anglaises ont fait de la Coupe du monde 2022 leur objectif avec l’idée de prendre le temps, sans pression, de bâtir un groupe et le faire grandir ensemble.
On ne sait pas jusqu’où ira cette équipe d’Angleterre dans la compétition en Russie, même si elle doit légitimement sortir d’un groupe composé de la Tunisie, du Panama et de la Belgique et peut espérer atteindre les quarts en disposant de l’un des deux premiers du groupe H (Pologne, Colombie, Sénégal, Japon) avant, peut-être, de trouver sur sa route le Brésil ou l’Allemagne. Mais, au moins, elle sait comment elle y va. Et c’est déjà beaucoup pour une sélection qui a souvent ressemblé à un cirque lors des grands tournois.
Bruno Constant fut le correspondant de L’Equipe en Angleterre de 2007 à 2016. Il collabore aujourd’hui avec RTL et Rfi en tant que spécialiste du football anglais et vous livre chaque sa semaine sa chronique sur la culture foot de Sa Majesté. Pour approfondir le sujet, retrouvez mon Podcast 100% foot anglais sur l’actualité de la Premier League et du football britannique.
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